Partie 7 sans titre

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Les yeux de Berenilde se baissèrent enfin vers Ophélie et celle-ci comprit aussitôt, le cœur battant comme un tambour, que cette ombre qui altérait leur éclat ne lui avait jamais été destinée.


- Je vous demande pardon, Ophélie. Pour toutes les fois où je vous ai contrainte, malmenée etréprimandée. Ce soir-là, sur cette scène de théâtre, quand vous avez tenu tête à Farouk, j'ai réalisé que vous n'avez jamais cessé d'être la plus forte de nous deux. Ce fut une leçon d'humilité un peu pénible que vous m'avez donnée là, mais je l'ai finalement digérée. J'avais la prétention de vous protéger et c'est moi qui vais avoir besoin de votre aide.


- Que je vous aide ?


Berenilde lui était supérieure en charme, en puissance et en influence ; il était difficile pour Ophélie d'imaginer en quoi elle pourrait être utile. Elle se laissa faire quand Berenilde lui prit tendrement la main et la posa sur son ventre.


- Trouvez-moi un prénom.


- Moi ? Mais n'est-ce pas au parrain...


- Non. Je ne veux pas que ce soit le choix d'Archibald, mais le vôtre, Ophélie. Je vous demanded'être la marraine de mon enfant.


Les lunettes d'Ophélie s'empourprèrent sous le coup de l'émotion. Elle fit de son mieux pour ne pas montrer à quel point cette requête la paniquait. C'était la première fois que quelqu'un envisageait de lui confier une telle responsabilité. Agathe elle-même avait préféré se tourner vers une tante, jugeant sa sœur beaucoup trop maladroite pour tenir un bébé dans ses bras.


- Un prénom de fille, précisa Berenilde en caressant son ventre. J'ai toujours été capable de sentirces choses-là avant la naissance. Est-ce que vous savez ce que cela signifie ?


Ophélie ne répondit pas. Elle avait tant de pensées en tête qu'elle ne parvenait plus à se concentrer sur une seule d'entre elles.


- Au Pôle, ce sont les enfants mâles qui héritent de la totalité des successions, expliqua Berenilde.Puisque je vais donner naissance à une fille, cela fait d'ores et déjà de Thorn le propriétaire officieux de tout le patrimoine des Dragons. Il le deviendra officiellement avec l'annulation de sa condition de bâtard, quand il aura rempli sa part du contrat envers notre seigneur Farouk.


- Et vous, madame ? Et votre fille ?


- Oh, je ne m'inquiète pas pour cela. Thorn pourvoira à nos besoins. Et puis, je reste la propriétaire de mon manoir à la Citacielle. Alors, Ophélie, acceptez-vous d'être la marraine de mon enfant ?


- C'est-à-dire, madame... C'est une lourde responsabilité.


- Vous êtes la personne la plus responsable que je connaisse. S'il vous plaît, ma petite Ophélie,aidez-moi à être une meilleure mère et aidez notre seigneur Farouk à être un meilleur père. Mais plus que tout, aidez Thorn, l'implora Berenilde avec une soudaine fêlure dans la voix. Ce garçon me donne bien du souci, j'ai parfois l'impression que je ne le connais pas tout à fait. J'ignore ce qu'il a dans la tête, mais pour le reste, faites-moi confiance, je le devine mieux que lui-même. C'est de votre cœur qu'il a réellement besoin, pas de vos mains.


Ophélie bégaya une réponse sans queue ni tête. Elle qui craignait de ne pas avoir l'estime de Berenilde, elle se sentait à présent écrasée sous le poids de ses attentes.


- Pour le moment, je ne vous serai malheureusement d'aucun secours, soupira Berenilde en glissant un doigt sur la joue d'Ophélie. J'ai une mère à mettre en terre et un enfant à mettre au monde. Restez bien sagement à l'hôtel en m'attendant. J'aurais aimé que la Valkyrie vous raccompagne pour veiller sur votre sécurité en mon absence, mais c'est à mon bébé que la Toile a offert sa protection. Je vous promets toutefois d'être à vos côtés le jour de vos noces. Vous bénéficierez bientôt, en plus de votre animisme, des griffes de Thorn. Nous vous apprendrons à vous en servir afin que vous puissiez vous protéger de vos ennemis.

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