Chapitre 5 : Titouan

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Tous les regards étaient tournés vers lui. Plus un mot ne se laissait entendre.
Titouan craqua ses articulations des poignets dans un geste nerveux et déglutit une dernière fois.
Allez c'est le moment, pensa-t-il. S'il ne le disait pas tout de suite, ce serait fini, il savait qu'il n'aurait pas le courage de revivre ce moment angoissant au possible.

Puis, les mots s'échappent de sa bouche brusquement, dans une expiration incontrôlée.

- Je suis gay.

Un silence assourdissant fit suite à sa révélation. La surprise se lisait dans les yeux de tous, et le temps s'écoulait si lentement qu'il semblait s'être arrêté. L'ambiance avait changé du tout au tout, passant de la chaleur au froid le plus extrême.

Face à la non-réaction de ses amis, le bouclé commenca à se demander s'il avait bien fait de leur confier son attirance envers les garçons. Il n'avait pas un seul instant pensé qu'ils puissent être réticents envers son homosexualité, mais apparemment il s'était trompé sur toute la ligne. Sa respiration s'accélérait, l'air se précipitant rapidement hors de ses poumons, puis y entrant à nouveau dans un souffle saccadé. Qu'allait-il se passer ensuite ? Allaient-ils le rejeter ? Comment allait-il pouvoir faire sans eux, sans ce groupe de garçons avec qui il avait tout vécu et avec lesquels il partageait tout ?

Et Martin, Martin, allait-il le regarder différemment, à présent ? Tout sauf ça, pitié, pensa Titouan. Il ne voulait pas avoir à affronter un regard plein de dégoût à son égard, surtout dans les yeux du blond.
Il sentit les larmes lui monter aux yeux, ses bons moments vécus en leur compagnie repassant inlassablement dans sa tête.
Il suffoquait maintenant, la chaleur de la pièce devenait étouffante, le silence lui broyait les tympans. Il passa ses mains tremblotantes sur son visage pour essayer de camoufler son désarroi.

Sentant le bouclé au bord des larmes et prêt à s'évanouir, Tristan prit la parole.

- T'es gay ? Genre t'aimes les mecs ?
- Euh ouais c'est le principe.
La panique était passée, rapidement remplacée par la gêne. Le malaise du jeune homme était palpable, ce qui n'atténuait pas ses frissonnements. Il passait d'un visage à l'autre, essayant de déchiffrer leurs pensées, puis ramena soudainement son regard au sol après avoir croisé les prunelles du garçon blond qui occupait ses pensées.

Dylan enchaîna :
- Euh attends c'est une blague ?

Ça y est. J'aurais dû m'y attendre. Putain, je vais pas pouvoir, songea Titouan. J'vais pas pouvoir développer alors qu'ils me regardent comme ça...

Son menton se leva, résigné, prêt à affronter les expressions haineuses.

- Non, c'est la vérité.

Il se sentait oppressé, n'ayant qu'une envie, quitter la pièce au plus vite. L'air chargé de non-dits lui pesait et ses oreilles sifflaient.

- Bah écoute, même chose que pour Gale, ça nous regarde pas mec, t'aimes qui tu veux c'est pas notre problème, déclara Julio, cassant la lourde tension qui s'était installée dans le salon.

Le brun sentit toute la pression quitter son corps après avoir croisé le regard bienveillant du rasé. Il se laissa retomber dans le canapé en fermant les yeux.

Il entendit Gale renchérir :
- Je suis content que tu nous l'aie dit bro. Et c'est sûrement pas moi qui vais te juger à propos de ça. T'es libre d'aimer n'importe qui, c'est pas aux autres de le décider pour toi.
Puis Tristan :
- La même.
- Ouais mec, tu fais ce que tu veux, laisse personne te dire le contraire, ajouta Martin.

Titouan lui lança un faible sourire. Il était au fond de lui tellement rassuré. Martin ne le détestait pas. Il l'acceptait tel qu'il était.
Il avait eu tord de penser que ses amis allaient le rejeter, alors qu'ils n'en avaient au final rien à faire. Ils savaient bien que le bouclé restait le même quelles que soient les personnes qu'il aimait, et que s'opposer à sa sexualité n'allait pas le changer, juste l'enfoncer au plus bas. Et ce n'était pas ce qu'ils souhaitaient.

- Haha ouais bro, juste, évite de me draguer, rajouta Dylan.
- Ta gueule mec. Juste, ferme la, le coupa Gale.
- Non sérieux bro, t'as vu ta gueule ? Il va jamais rien tenter avec toi, ça, c'est clair, le vanna Tristan en lui donnant un coup de coude.

Tous s'esclaffèrent en cœur. Titouan posa son regard sur tous les membres du groupe le sourire aux lèvres. Il se sentait bien, là, entouré de ses amis.
Il était enfin libéré du poids qui pesait sur ses épaules depuis toutes ces années.

Les conversations reprirent de plus belle, ponctuées de rires et de bousculades. Le vent doux qui entrait dans le salon par les grandes baies vitrées effleurant les visages apaisés des adolescents.

***
Chapitre écrit par @unvisagesansnom et @poupilabouli

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