La sorcière de Focalia

Chapitre 14_ Conséquences

      "[Comprendre] est fait des glyphes Entendre et Savoir et de bien d'autres symboles. Mais les constituants de la rune varient en fonction de la situation." Crysée

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Il pleuvait. L'averse cognait contre les vitres et suintait un peu sur la paille du grenier. Le froid s'insinuait dans les recoins des lattes et montaient du sol tel une effluve serpentine. Löy dormait dans sa chambre, ou plus tôt, veillait. Couchée en position de la bûche, grelotante malgré sa fenêtre fermé, les membres ankylosés, la gorge nouée. Ses épaules se secouaient à intervalle régulier, des larmes grosses comme des perles dévalaient ses joues. Elle s'était égarée dans les tréfonds de son esprit, entre tristesse et désespoir et ne percevait plus le monde que part une fente lointaine, comme tombée au fond du gouffre.

Cela faisait deux jours que les Inquisiteurs avaient raflé dans la forêt. Il avait découvert leur sanctuaire, saccagé la cabane, détruit tout ce qui faisait lien entre Löy et Crysée. Les rumeurs allaient bon train. Mais aucune trace de la sorcière.

Les Inquisiteurs étaient en ville. Depuis plus d'une semaine. Leur présence lui était insupportable mais lui avait fait comprendre quelque chose. Quelque chose qu'elle aurait aimé partager si elle ne se sentait pas aussi traquée. Le couvre-feu avait été rétabli. Plus aucune personne hors des maisons au crépuscule. La région se couvrait du voile triste du silence alors que glissaient dans ses entrailles des silhouettes sentinelles. Ils étaient partout : dans les rues, sur les places, sur les lisières, dans les bois, en hauteurs sur les chaînes de montagnes. Même à la table du Comte !

Löy étouffait. Sa vie devint triste et ses secrets lui encerclèrent bientôt la gorge comme une poigne meurtrière. Elle étouffait. Et ce soir là, elle avait fini par exploser. Ça avait commencé tôt dans la soirée avec une prise de tête avec ses parents dû à une futilité exacerbée par leur stress commun, et ça ne s'était plus arrêter. Ce soir-là, et pour la première fois, Clio ne lui avait pas lu d'histoire. Löy se morfondait donc entre tristesse, culpabilité et pression.

Où était Crysée ? Qu'était-il advenu de la sorcière et de son familier ? Que faire ? Comment la prévenir ou lui venir en aide ?

Ses cogitations furent tranchées par le claquement violent de la vitre contre le mur. Un éclair zébra le ciel et dessina les contours d'une silhouette. Des chrysanthèmes volèrent jusqu'à elle et roulèrent sur sa couverture. Intriguée, elle se releva. Avec horreur, elle vit une forme noire escalader sa fenêtre et, avant même qu'elle ait pu crier, la contourner prodigieusement vite pour la bâillonner. Affolée, Löy gesticula. La prise de l'assaillant se rafermit. Elle gémit mais le tonnerre avala son cri.

  __ Chut ! C'est moi !

Tombant des nues, Löy pivota alors que son assaillant bondissait du lit et enlevait sa capuche. Il faisait trop noire pour distinguer autre chose mais bientôt, une rune jaune tournoya près de son visage. Löy faillit bondir jusqu'au plafond.

  __ Crysée ?!

Elle n'en croyait pas ses yeux. La sorcière esquissa un sourire alors que la jeune fille hésitait entre lui sauter au cou pour l'embrasser ou pour l'étrangler.

  __ Mais ça va pas non, de passer par ma fenêtre ! morigéna-t-elle. Si on te trouve ici...

  __ On ne me trouvera pas, assura Crysée en retrouvant son sérieux. Il n'y avait pas de milice sous vos fenêtres et je me suis assurée d'être discrète. La chaumière a été incendié et je me suis retrouvée démunie. Ils n'auraient normalement pas dû pouvoir la trouver mais ce sont des Inquisiteurs. Leur Œil va au delà des apparences et des illusions. Tu te souviens de la première fois où je t'ai montré mon chez moi ? J'ai joué de la flûte tout le long avant de réciter une formule au croisement des deux chênes. Il s'agit en fait du rituel pour défaire l'illusion qui masque la chaume et que seuls des personne spéciales ou habilitées peuvent traverser, expliqua-t-elle.