Chapitre n°18

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Le réveil strident de Dorian me réveilla et nous grognâmes d'agacement en chœur. Je me levais la première, forçant les traces de sommeil à se retirer de mon visage en frottant vigoureusement mes yeux. Tout en m'attelant à préparer les œufs brouillés et le café pour le petit-déjeuner, je dressais mentalement la liste du matériel que devais emporter en mission : kit de suture, matériel médical, armes à courtes et longues portées, arbalète, arme à feu, coup de poing américain, kit magique de protection, matériel de sorcellerie basique et quelques autres choses.

Je versais les œufs dans les bols et le café dans les tasses, y ajoutant un peu de lait, et servis le tout sur la vieille table basse en bois sombre qui faisait face au canapé multicolore dans le salon.

Quelques secondes plus tard, un Dorian échevelé aux yeux remplis de sommeil émergea par la porte de la chambre, un grognement de satisfaction lui échappant à la vue de la nourriture. Je ris doucement à sa réaction et m'installais pour dévorer mon petit-déjeuner. À neuf heures tapantes, nous prîmes la voiture que lui avait prêté le client de Dorian et filâmes vers le centre de détention militaire. Je dormis tout du long, le plaid de Dorian délicatement posé sur mes épaules. Je ne dormis pas pour me reposer mais pour oublier, pour retarder le moment où je réaliserais que mes cauchemars étaient devenus réalité et que je devais les affronter de mon plein gré.

En arrivant, je me mis automatiquement dans un état d'esprit où seule la raison régnait, mes émotions enfermées quelque part au fond de ma conscience sous un contrôle strict et absolu. Je m'exerçais pendant tout le trajet à de légers échauffement mentaux pour la performance que je devrais livrer si je souhaitais que tout se passe comme prévu. Contrairement à ce que l'on aurait pu penser, le système de sécurité sur lequel ils se reposaient véritablement trop n'était pas le détecteur de mouvement, non, c'était une arme mise en place spécialement pour piéger les sorciers. Un détecteur d'ondes vibratoires à mémoire. Cet appareil enregistrait la signature vibratoire de chaque individu qui travaillait dans le centre ou y était détenu grâce à une technologie de pointe élaborée par les experts de la section secrète de l'armée. Toute détection d'une vibration ne collant pas avec les enregistrements déclencherait l'alerte maximale. L'aisance avec laquelle ils se reposaient sur ce bouclier n'était donc pas injustifiée puisque très peu de sorciers, aucun à la connaissance de la section secrète de l'armée, pouvait modifier sa signature vibratoire. Ce dont ils n'avaient pas tenu compte en revanche, c'était que, bien qu'étant la seule dans ce cas, j'avais toujours accès au bâtiment, mais ils avaient dû m'imaginer trop brisée pour revenir sur le lieu qui m'avait causé tant de cauchemars. Ils n'étaient vraiment pas chanceux, puisqu'il s'avérait que je disposais de dons psychiques suffisant pour étendre ma vibration à celle de Dorian afin de le dissimuler. Cela nous permettrait de passer outre les dispositifs de sécurité ainsi que de couvrir nos traces: quand nous quitterions la zone, ce sera comme si Dorian n'était jamais entré.

Je m'équipais machinalement, plaçant toutes mes armes le long de mon corps, le matériel médical et magique tout autour de ma ceinture. Sans un mot, je fis signe à Dorian de me suivre jusqu'aux grilles, me concentrant pour garder ma vibration par-dessus celle de Dorian comme un bouclier impénétrable et créait une à partir de cet exercice une tâche inconsciente, cela me permettrait de ne pas avoir à être concentrée sur trois plans astraux au même moment, je n'aurais que le plan physique dont Dorian s'occuperait pour moi en grande partie et la vision télépathique d'Eliana. Le seul inconvénient était que cela drainerait légèrement plus d'énergie que si j'avais effectué la tâche de manière consciente, mais c'était un coût raisonnable. Comme prévu, à neuf heures quarante-trois les gardes laissèrent une ouverture et je fis signe à mon partenaire de rester derrière moi tandis que je me faufilais jusqu'à l'escalier de derrière. Il y avait une plaque d'égout qui menait à des tunnels permettant d'arriver jusqu'aux cellules. Nous soulevâmes la plaque avec effort et descendîmes silencieusement l'échelle, replaçant le couvercle derrière nous. Le sort de dissimulation toujours en place, je laissais ma mémoire nous guider jusqu'à l'entrée des cellules. Les souvenirs de l'état dans lequel j'étais la dernière fois que j'avais emprunté ces tunnels amenèrent des larmes dans mes yeux, je distinguais encore les traces de mon sang sur le sol couvert de saleté.

The tears we hideOù les histoires vivent. Découvrez maintenant