Danse pour moi

Chapitre 9.2

Nous étions arrivés devant la pizzeria, Sam ouvrit la porte et nous laissa entrer. Paolo fût ravi de nous voir et nous installa au fond de la pièce. Le restaurant était plein et le serveur n'arrêtait pas ses allées et venues. Il prit nos commandes et s'activa de plus belle à servir les clients.

– Et ils se manifestent comment ? demandai-je.

– La plupart du temps, ils adoptent une forme floue ressemblant vaguement à un corps humain. Ils n'ont jamais l'apparence qu'ils avaient de leur vivant, sauf dans un seul cas qui ne dure pas. Certains s'introduisent dans les rêves, et d'autres utilisent la technologie. Leur langage est très limité, tu comprends pourquoi ton danseur ne pouvait pas être un fantôme.

J'étais de plus en plus intriguée.

– Et pourquoi ils reviennent sur terre ?

– Chaque âme errante a ses propres raisons. Il y a celles qui sont attachées à leurs souvenirs, d'autres qui refusent d'accepter leur mort, certaines encore sont là pour protéger leurs proches ou sont porteuses d'un message. Il peut même y avoir des combinés. Une âme voulant prendre soin des êtres aimés et attachée à ses souvenirs. Il y a une multitude de raisons.

Je me concentrais sur le moindre détail qu'il énumérait. J'espérais trouver, grâce à ses dires, une explication qui me permettrait de comprendre pourquoi cette forme me suivait depuis des mois. Paolo s'approcha de notre table, intéressé.

– Dans mon village, en Italie, on dit que les esprits reviennent toucher les pieds de ceux qui ont été odieux avec eux durant leur existence.

– Ça, ce sont des légendes, un esprit ne peut pas te toucher. Par contre, il peut contrôler le destin d'une personne, intervenir dans ses choix. Parfois, ils se servent d'une personne étrangère pour y arriver. Bien sûr il y a toujours des exceptions, même la mort n'est pas une science exacte, précisa-t-il sourire en coin.

– Comment tu sais tout ça ? Je suis curieux dis-moi, demanda Paolo.

– On a une sorte de don dans la famille, qui se transmet de génération en génération. Seul le sexe masculin en hérite, on apprend à vivre avec dès notre plus jeune âge.

Le serveur semblait perplexe, il nous demanda d'attendre avant de poursuivre, rejoint la cuisine d'un pas rapide pour revenir avec nos plats. Nous commençâmes à manger, parlant de tout et de rien en attendant le retour de Paolo qui s'affairait à débarrasser les tables. La pizzeria commença à se vider et lorsque tout fut impeccable, que les derniers clients rejoignirent la sortie, il ferma le restaurant et appela son cousin en cuisine. Un homme d'une trentaine d'années ressemblant presque trait pour trait à Paolo arriva.

– Je vous présente Gianni, c'est lui qui mitonne toutes ces bonnes choses.

Nous le saluâmes pendant que le serveur continuait les présentations.

– J'ai beaucoup entendu parler de vous et je suis ravi de vous rencontrer.

Son accent était moins marqué que son cousin, mais il semblait tout aussi agréable que lui.

– Dites, j'espère que vous avez un peu de temps devant vous ? questionna Paolo.

– Laura et moi avons fini, nos cours prévus cette après-midi sont annulés.

Le serveur se tourna vers Sam presque suppliant.

– Dis-moi que tu peux papoter encore un peu. Tout ce que tu es en train de raconter m'interpelle. Gianni et moi avons baigné au milieu de légendes sur les fantômes depuis que nous sommes nés. Nous avons grandi avec ces histoires, dans notre village elles se racontent de génération en génération.