Chapitre 19.2

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Quand je franchis la porte de l'auditorium, un déferlement de « salut » m'accueillirent. Ils étaient tous assis à même le sol en train de s'étirer. Je les saluai en retour et Éric me lança son sourire avenant en me faisant signe de les rejoindre. Je posai mes affaires sur un des sièges, sortis une pochette de mon sac, grimpai les quelques marches pour rejoindre la scène et m'assis en tailleur face à lui. Il finit d'étirer son dos et croisa ses jambes tendues face à lui en prenant appui sur ses mains de façon très décontractée.

– Je vous ai apporté les photos, déclarai-je enjouée.

– Ah ! Nous allons enfin pouvoir vérifier tes talents ! lança Éric badin en se redressant pour se mettre en tailleur.

Les membres du groupe s'approchèrent, j'ouvris ma pochette, séparai le tas de clichés en deux pour les tendre à Éric et Élise, une blonde aux jolis yeux verts. Ils les regardèrent avec un air satisfait avant de les passer au fur et à mesure à leurs voisins. Les clichés passant de main en main recevaient de nombreux éloges et j'en étais ravie.

– Tu es douée, me complimenta Cédric, le garçon au teint sombre et aux épaules larges.

– Elles sont vraiment réussies ! ajouta Simon.

– Merci et vous pouvez les garder. Normalement, chacun doit avoir au moins un portrait et une photo du groupe au complet. S'il en manque, je vous en ramènerai demain, spécifiai-je.

Ils me remercièrent, firent le tri pour récupérer celles où ils apparaissaient seuls et se répartirent les clichés de groupe. Je n'avais pas amené toutes celles que je possédais d'Éric, elles étaient bien trop nombreuses.

– Tu l'as ton appareil aujourd'hui ? me demanda Maxime.

– Le jour où tu verras Julie sans appareil photo sur elle, c'est qu'elle aura perdu la tête, affirma Éric.

Il avait repris sa pose décontractée et m'observait avec un sourire moqueur. Je lui rendis le même avant de répondre.

– Il est dans mon sac, je confirme les dires d'Éric, je ne peux pas sortir sans en avoir un sur moi. Pourquoi ?

– Ce serait sympa qu'on puisse en avoir une avec tout le monde, toi comprise ! précisa-t-il.

Les autres approuvèrent et je devais reconnaître que j'étais flattée. Je ne me fis pas prier et descendis le chercher.

– Prenez place sur les strapontins, ce sera plus facile pour cadrer, leur précisai-je.

J'attendis qu'ils soient tous installés, positionnai mon appareil sur la scène et terminai les derniers réglages.

– Serrez-vous un peu ! Candice et Cédric accroupissez-vous ! Élise mets-toi un peu plus à droite et...

Je décrochai mes yeux de mon appareil pour fixer le balcon. L'ombre se tenait là, immobile, contemplant la scène. Un immense frisson parcouru mon corps, tous les bons conseils de Sam ne me servaient à rien, j'étais incapable de faire semblant de ne rien voir. Je me sentis soudainement oppressée et triste. Ce sentiment que ma cage thoracique était comprimée résultait de la peur, ma peur. Mais cette tristesse ce n'était pas la mienne, c'était celle de l'ombre, Sam m'avait prévenue.

– Ça va Julie ? s'inquiétèrent les danseurs.

Je ne pouvais pas répondre, ni détourner mes yeux de cette ombre. J'avais du mal à respirer, j'entendais les voix de ceux qui se tenaient face à moi mais elles me semblaient lointaines, presque inaudibles. Des larmes tentaient de s'échapper, mais je m'efforçais de les retenir. Cette tristesse m'envahissait de plus en plus, je devais lutter pour qu'elle ne m'engloutisse pas totalement. Je tentais de me concentrer sur les détails mais je ne percevais que ses cheveux, la couleur de ses yeux et la forme de son visage encore trop flou pour en apprécier les formes.

Danse pour moiOù les histoires vivent. Découvrez maintenant