Un vol sans elle

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Il y a longtemps, entre les murs,  il y a eu d'autres soldats, d'autres secrets partagés, d'autres combats, d'autres commandants et bien d'autres douleurs.

Bien avant le major Erwin, le caporal chef Levi et la chef d'escouade Hansi.

Bien avant le trio Eren, Armin et Mikasa.

Avant les trahisons de Reiner, Annie et Bertholt.

Avant la 104e brigade d'entraînement.

Avant eux, il y a eu des histoires. Et des pertes, beaucoup de pertes, sans que quelqu'un ne réussisse à entrevoir une lueur d'espoir.

Il y avait eu beaucoup d'anges aux ailes cassées, brisées en plein vol.

Parce que pour elle, les ailes de la liberté n'ont pas été un symbole de liberté jusqu'au bout. Elles ont été le signe de sa longue tourmente, jusqu'à ce qu'elle finisse par sombrer pour elles.

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-Caporale chef, je vous en prie! Nous ne pouvons le laisser aux autorités ainsi, l'implora Rune, une recrue de son escouade.

La femme aux longues mèches noires soupira en se laissant tomber sur son siège. Cela faisait des jours qu'elle était bloquée dans cette situation, en écho à la sienne il y a longtemps. Si elle s'était évertuée à refuser la demande -la supplique- de son cadet, cela était loin d'être simple. Elle mourrait d'envie de foncer dans la capitale, de récupérer ce gamin aux autorités pour le ramener avec elle ici au près des siens.

Mais voilà, il s'avérait qu'elle savait ce qu'elle risquait si elle se mêlait de trop près à cette histoire, tout comme Rune et son petit frère. Pour avoir frôlé la sentence auparavant, elle savait bien ce qu'elle encourrait là bas, elle et tout ceux qui l'accompagnait. Et pourtant, cela la tuait de ne pouvoir agir. Elle connaissait bien les prisons de la capitale et l'horreur qui y régnait.

-Caporale, je vous en prie, la supplia Rune, la voix rauque.

Le garçon venait de s'agenouiller au centre de son bureau. Il était à genoux au sol, le front contre le carrelage. Le cœur de la caporale se serra, bien qu'elle soit autoritaire, ce n'était pas une tortionnaire et voir son cadet ainsi lui faisait du mal. La noiraude soupira et s'accroupit au sol. Elle déposa avec le plus de douceur -c'est à dire peu comparé à la moyenne- qu'elle avait une main sur la nuque de son soldat. Elle caressa le bout de peau accessible et immédiatement, Rune se laissa échapper un sanglot étranglé, le premier d'une longue série. La caporale endossa sans se plaindre toute cette douleur, bien consciente qu'il fallait qu'elle sorte et en tant que caporale, cela lui semblait normale qu'elle accepte de porter les peines de ses subordonnés. Après tout, c'était ça une escouade.

-Miria, supplia le garçon d'une voix déchirante. Mes parents sont morts dans le bataillon, Mélio est tout ce qu'il me reste, il n'a rien fait, vouloir comprendre pourquoi nos livres sont bourrés de mensonges n'est pas un crime... Laisse moi y aller, je t'en conjure, chuchota t-il avec émotion.

Miria laissa glisser ses mains sur les épaules du blond et les serra fortement. Elle obligea Rune à se relever pour être assis en face d'elle. Le garçon n'avait qu'une vingtaine d'années et était promis à un bel avenir de soldat au vu de sa force et ses compétences, c'était un gâchis pour l'humanité de le perdre par l'exécution. Toujours sans parler, la noiraude fit courir ses mains jusqu'au visage plein de souffrance du jeune homme. Elle le prit en coupe et chassa plusieurs larmes de ses pouces.

-Ce n'est pas que je ne veux pas le sauver Rune, pas du tout. C'est juste que je sais pertinemment ce qui l'attend lui et les autres qui essaieront de le sauver, arqua t-elle doucement.

Recueil de One-ShotOù les histoires vivent. Découvrez maintenant