19 : pensées et souvenirs

21 4 5
                                    

[18 octobre]

Les décorations d'halloween que j'avais installées dans le magasin toute la journée me montaient à la tête en rentrant chez moi. Ce samedi soir était très frais et j'aurais préféré porter des gants sur mon vélo. Il faisait déjà sombre et j'étais enrhumée. Mais au moins, j'étais en vacances scolaires. Fini le lycée, les interros surprises et les schémas de dix mètres de long. J'allais enfin pouvoir dormir et profiter de mes soirées devant des films d'horreur avec mes amis. Du moins pendant deux semaines. Je n'allais travailler que la première à la supérette, ce qui m'arrangerait fortement.

J'avais également hâte de fêter mon anniversaire. J'avais la chance d'être née le jour d'halloween : le 31 octobre. Mes parents auraient dû m'appeler Sabrina en sachant cela ; je suis une sorcière dans l'âme (notons d'ailleurs que ce n'est même pas sa date d'anniversaire).

Alex a pour tradition personnelle de me faire sursauter toute la journée avec des farces de toutes les sortes. Je m'attendais également à être réveillée par des casseroles ou un seau d'eau de pluie au beau milieu de la nuit. Et même après dix-huit longues années pleines d'émotions, je ne parvenais toujours pas à m'habituer.

Ce fut sur ces pensées et souvenirs que je fermai ma porte d'entrée, enfin chez moi. Cinq secondes plus tard, mon manteau et mes bottines étaient déjà loin de moi. Mais ma surprise fut bien grande lorsque j'ai entendu une voix de femme qui n'était pas censée résonner dans notre cuisine. Je me suis avancée silencieusement vers cette curieuse pièce pour y reconnaître Carole, la petite amie de mon père, sans mon père. J'ai commencé, hésitante :

_ Bonsoir ... ?
_ Angeline ?! Tu rentres plus tôt que prévu ?
_ Absolument pas. Qu'est-ce qu'il se passe ?
_ Bonsoir Angeline, souriait Carole, tu vas bien ?
_ Ça va, merci.  Et vous ?
_ Très bien, oui. J'avais un rendez-vous dans le coin alors je suis repassée ici rapidement, j'avais oublié un parfum la dernière fois. Mais c'est l'heure de repartir si je ne veux pas rater mon train, affirmait-elle avec un coup d'œil à sa montre. 
_ Je vais te conduire à la gare, il fait déjà noir et il doit faire froid, proposa Alex.
_ C'est très gentil. 

J'aurais préféré que mon frère me prévienne sur le fait de tutoyer Carole ; je ne m'y attendais pas vraiment. Celle-ci se leva en me souriant et attrapa son manteau dans le couloir alors que je ne l'avais même pas remarqué en rentrant. En passant près de moi, j'ai senti sur elle une vague légère de parfum d'Alex que je reconnaîtrais entre mille. Avec ceci, le col de chemise de ce dernier était mal replié, lui qui déteste par-dessus tout ces détails (il pourrait passer des heures avec un fer à repasser à être maniaque sur ses chemises). Ce n'était pas normal. Et le fait qu'ils aient déjà potentiellement couché ensemble m'aurait franchement étonnée, mais personne n'est à l'abri d'une surprise. 

Alex est rentré moins d'une demi-heure plus tard, et je l'attendais dans le salon devant la télévision en me goinfrant de chips au barbecue. Il portait un sourire béat, quelque chose que je n'avais pas vu sur son visage depuis le déménagement de notre ancienne voisine. Même si j'avais été aveugle, j'aurais quand même compris ce que Carole était venue faire chez nous ce soir, que ce soit son intention première ou non. Alex ne pourra pas me le cacher bien longtemps. Et concernant mon père, il ne le saura pas de ma part. 

only fools fall for youOù les histoires vivent. Découvrez maintenant