Chapitre 3 : Futur incertain

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La veille, Jacob avait passé son examen de français qui allait déterminer s'il allait réussir ou non cette matière. En effet, avec les mauvais résultats qu'il avait obtenu depuis le début des classes, il avait de bonnes chances d'échouer dans plus d'une matière, au grand découragement de ses parents. Ceux-ci lui mettaient une pression pratiquement insoutenable sur les épaules comme ils voulaient absolument voir leur fils devenir quelqu'un d'importants ayant un métier prestigieux. Jacob n'avait plus le droit de sortir, il devait se consacrer à ses études pendant de longues heures qui lui paraissaient interminables. Jacob ne savait pu quoi faire pour faire comprendre à ses parents qu'une vie sous pression ne l'intéressait pas, que contrairement à eux, il ne rêvait pas de devenir médecin ou avocat. En y pensant bien, Jacob ne savait pas vraiment ce qu'il voulait faire de sa vie d'adulte, mais il découvrit rapidement que la vie que ses parents étaient en train de planifier pour lui ne lui correspondait pas du tout.

Il les avait entendu discuter cette semaine de son avenir entre eux en parlant de cours particuliers en vue de remonter sa moyenne et de couper le réseau Internet après 19h pour pouvoir qu'il puisse mieux se concentrer. Jacob était en colère, puisque ses parents étaient à côté de la plaque. Il n'avait pas besoin davantage de pression et de professeurs, mais plutôt de se faire rassurer en vue du futur. Pour ce qui concernait l'accès à Internet, Jacob ne comprenait pas leur résonnement, puisqu'il devait bien être l'adolescent utilisant le moins son téléphone de son école. Voir les gens montrer seulement le côté heureux et parfait de leur vie ne faisait que le déprimer de plus en plus. Il se servait donc de son téléphone uniquement pour appeler et texter ses parents, comme il n'avait pas vraiment d'amis. Il se sentit seul et atrocement différent des jeunes de sa génération. Tous les autres garçons de 16 ans avait une copine, de bons copains, ils faisaient la fête, faisaient du sport, mais lui ne faisait que les regarder vivre leur meilleure vie pendant qu'il se sentait dépérir de l'intérieur.

Jacob descendit l'escalier pour aller prendre l'autobus. Sa mère l'arrêta alors dans la cuisine pour l'informer qu'au prochain examen qu'il échouait il aurait droit à un tuteur qu'il l'aiderait tous les soirs jusqu'à ce qu'il retrouve d'aussi bons résultats qu'avant leur déménagement. Elle ajouta : « Il serait tant que tu te secoues un peu jeune homme, je n'ai certainement pas élevé un bon à rien. Un autre échec et tu ne vivras plus que pour tes études, plus de sorties, plus d'Internet, plus d'échec scolaire! »

Jacob fit un petit hochement de tête en guise de réponse, mais il était désespéré par la situation. Il n'avait aucune envie que sa vie devienne encore plus un enfer, déjà que le seul sujet de conversation qu'il avait avec ses parents étaient ses résultats scolaires. Il s'imaginait mal supporter ce que sa mère voulait sans cesse lui imposer de plus. Il se sentait incompris et inutile dans cette vie. Il avait l'impression d'être seulement le problème dans la vie parfaite de ses parents. Il se sentait comme la seule chose qui énervait sa mère au plus haut point, c'était de sa faute si elle se mettait dans tous ses états.

Il se rendit à son arrêt de bus en pensant à son examen qu'il avait fait la veille. Il doutait sérieusement d'avoir réussi cette évaluation. Au mieux, il pourrait avoir la note de passage. Peut-être. Il se dit qu'il se raccrocherait à cette idée jusqu'à vendredi quand sa professeure aurait fini de corriger. Sans le savoir, elle détenait son futur dans ses mains.

Jacob passa la semaine à penser à ce résultat. S'il échouait, c'était la fin. Le peu de libertés qui lui restait, il leur dirait adieu. Comme il était toujours incapable de dormir, il se torturait lui-même en essayant de se rappeler de chaque question de son examen de français. Il s'en voulait d'avoir perdu sa concentration au milieu de l'examen et de s'être mis à penser à un futur voyage en Philippines pour revoir ses amis, sa grand-mère et pour se sentir à nouveau chez lui. Il était revenu dans le moment présent seulement quinze minutes avant la fin de la période. Il s'était mis à écrire à une vitesse folle pour remplir la dizaine de questions qui lui restaient. Il n'avait donc pas trop réfléchi et simplement écrit quelque chose un peu au hasard. Il le regrettait amèrement, mais il ne pouvait pas revenir dans le passé, il ne le savait que trop bien.

Vendredi matin, Jacob ouvrit les yeux et regarda son plafond, profitant des dernières minutes qu'il lui restait avant de découvrir s'il avait passé oui ou non son examen de français. Il respira un bon coup comme pour se donner du courage. Puis il se leva, ouvrit son ordi et consulta ses derniers résultats. Son cœur sauta un battement. Ses yeux relurent trois, quatre fois son résultat. Il avait obtenu : 58%. Il avait presque réussi, mais ces deux pourcents lui rendraient la vie des milliers de fois plus difficiles à vivre. Il entendit sa mère hurler son nom. Elle venait aussi de voir son résultat. Jacob alla à sa rencontre d'un pas lent voulant repousser le plus possible ce moment.

Il s'imaginait en train de prendre la fuite par la fenêtre et se mettre à courir jusqu'il n'ait plus de souffle. Puis, faire du pouce jusqu'à la métropole où il se cacherait jusqu'à ce que ses parents l'oublient. Il revint vite sur Terre, il savait que c'était impossible, que sa mère le retrouverait bien assez tôt et qu'il serait puni à vie. Une fois arrivée devant sa mère, elle lui lança un regard noir. Elle commença à crier et le traitant d'incapable et en lui disant qu'il ruinait son avenir en s'entêtant à échouer. Maintenant, aucune école ne voudrait de lui, il finirait ses jours pauvre et seul. Elle continua son monologue très pessimiste envers l'avenir de son fils jusqu'à ce qu'elle se rende compte qu'elle l'avait fait rater son autobus. Elle lui reprocha de ne pas lui avoir dit qu'il était si tard, que c'était de sa faute si elle était en retard à son boulot. Le reste du trajet se déroula dans un lourd silence. Il réalisa que cela faisait de nombreux mois qu'il n'avait pas eu de véritables conversations avec sa mère. En fait, il ne s'en rappelait pas vraiment comme leurs conversations actuelles occupaient déjà la majorité de ses pensées. Il ne voyait en elle qu'une femme froide et rigide avec qui il ne partageait pratiquement pas de points communs. Ses parents avaient un esprit très cartésien et mathématique, mais lui préférait les arts et l'émotion qu'aux chiffres. Jacob avait anciennement un talent fou en dessin, un talent que ses parents ont toujours peu apprécié puisqu'être artiste ne rapportait pas beaucoup. Depuis le déménagement, Jacob avait perdu toute envie de dessiner. Il souhaitait s'enfuir de cette vie dans laquelle il ne pouvait s'exprimer.

Pendant qu'ils roulaient, son regard fut attiré par une pancarte publicitaire. Sur celle-ci on pouvait lire : « Parler de suicide sauve des vies. » Il n'avait jusqu'alors jamais vraiment compris les jeunes qui posaient un tel geste, mais ce jour-là, il trouvait que cette solution faisait du sens. Il n'aurait plus à vivre avec ses parents qui ne le comprenaient pas, il n'aurait plus à vivre avec toute cette pression, il n'aurait plu à se casser la tête pour son futur. Ses pensées continuèrent à imaginer une vie où il n'y saurait plus tout au long de la journée et des journées suivantes. Il y pensait en classe, dans l'autobus, dans les pauses, la nuit, les pensées suicidaires gagnaient un peu plus de terrain chaque jour.

La semaine suivante, en revenant de l'école, Jacob finit d'écrire sa lettre et alla la poser sur le comptoir de la cuisine. Il l'avait mis dans une enveloppe blanche qui paraissait beaucoup trop simple en comparatif aux émotions complexes que vivaient Jacob. Il entra dans le garage et prit une corde qui trainait sur le coffre à outils de son père. Il l'accrocha après une des poutres au plafond en montant sur l'escabeau.

Il se sentait tellement seul et incompris. Il passa lentement la corde autour de son cou. Il avait peur, il souhaitait que ses malheurs s'arrêtent pour de bon, que cette pression prenne fin. Ses pieds se rapprochaient dangereusement du bord de l'escabeau.


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