Même dehors

OS n°2 : Escapades 25/

Samedi, 18h22, Périgueux

Quand Tina et Liam reviennent dans le café, le tableau a quelque peu changé.

Sam est toujours dans son fauteuil en rotin, mais Harry s'est assis sur l'accoudoir du canapé pour être plus près. Ils parlent avec passion et Tina devine aisément la thématique de leur conversation : la musique, la musique, la musique... Bon, et peut-être Louis, vu le regard pétillant du bouclé à cet instant.

D'ailleurs, son petit ami a retrouvé Léo sur un des sofas, puisque c'est visiblement Billy qui a pris le siège de ce dernier... Et Li est sur ses genoux, enveloppée dans ses bras.

Le couple fronce des sourcils, interloqué de les voir ouvertement si proches, puis s'affale sur le deuxième canapé. Ça fait longtemps qu'ils ne cherchent plus à comprendre le lien bizarre qui unie Li et Billy, alors soit...

— Vous avez des bisous de Eleanor et Gretchen, informe Tina.

Aussitôt, Louis redresse la tête.

— Oh, elles vont bien ?

— Très bien, leur assure Tina. Elles sont soulagées de savoir qu'on t'a retrouvé.

Le brun grimace.

— Vous avez prévenu la terre entière que j'avais disparu ou quoi ?

— Juste elles, lui assure la jeune fille.

Mais elle se ravise, puisqu'elle ajoute, plus bas :

— Et Magalie.

— Et Magalie ?! répète Louis, outré.

— On pensait que c'était elle qui avait vendu la mèche aux médias, pour l'emplacement, participe Sam.

— Et c'était elle ? s'étrangle le garçon.

Avec la précipitation des événements, Louis n'a même pas eu le temps de réfléchir à tout ça, mais il se dit que ça serait probable que les journalistes aient eu un informateur. Il n'a jamais donné aucun détail sur la secte, allant jusqu'à cacher dans quelle région il vivait à cette époque-là.

— Apparemment, non, répond Sam. Enfin, ce n'est pas comme si on pouvait vraiment lui faire confiance, cela dit.

— Peu importe, soupire Louis. Je crois que c'était un mal pour un bien, finalement.

Il y a un silence autour de la table, parce que c'est la toute première brèche qu'il ouvre sur ce qu'il s'est passé et personne ne veut la louper.

Léo pose sa main sur sa cuisse, comme pour l'encourager à continuer. C'est dur pour Louis, et il sait que le premier qui mérite des explications, c'est Harry et juste Harry. Pour autant, les autres ont fait tout ce trajet pour lui et il se doit de les rassurer.

— Je... commence-t-il. Disons qu'il y avait des choses pas tout à fait réglées dans ma tête, des questions qui restaient, il fallait que j'y retourne.

— Et tu as eu des réponses ? demande Li doucement.

— Non, admet Louis.

Il se retourne vers son ami, croisant le regard bienveillant de Léopold.

— Mais parfois, poursuit-il. Ne pas avoir de réponse est une réponse. Il ne faut pas s'épuiser à combler un trou sans fond.

Li acquiesce, lorsqu'elle sent un mouvement dans son dos. Léger, mais présent. Le front de Billy posé entre ses omoplates. Elle sait bien que ça lui parle, lui aussi court derrière des fantômes depuis des années. Le fantôme du père qu'il aurait aimé avoir, le fantôme du fils qu'il aurait dû être.

Li ne veut pas montrer l'instant de faiblesse qui frappe le garçon, alors elle joint ses mains aux siennes discrètement, celles-ci se nouent autour de son abdomen.

— Tu es courageux, dit Tina.

Louis lui sourit. C'est bête, mais ça lui fait du bien d'entendre ça. Surtout venant d'elle. Il a toujours pensé qu'ils se ressemblaient, tous les deux.

— Au fait, réalise Sam en se tournant vers Harry et Li. Comment est-ce que vous avez trouvé la secte, vous ?

— On ne l'a pas trouvée, informe la jeune femme. On a rejoint Louis et Léo à l'endroit où ils se promenaient.

Le brun fronce des sourcils, réalisant qu'il est complètement à côté de la plaque depuis tout à l'heure... Parce que : Comment ont-ils pu savoir pour la chapelle ?!

Il redresse la tête, cherchant une explication dans le regard de son petit ami. Est-ce qu'il lui a déjà parlé de cet endroit ? Il ne lui semble pas, mais peut-être que ça lui a échappé à un moment ?

— Alex, murmure Harry.

— Alex ? bégaie son copain, d'un air interdit.

— Il nous a pris en stop, ajoute Li.

Billy s'écarte du dos de sa petite amie, ramené subitement à la conversation.

— Attends, tu es montée dans la voiture d'un inconnu ?

Li ne répond pas.

Trop idiot.

Trop paternaliste.

Trop Billy, quoi.

— Vous avez rencontré Alex ? reprend Louis.

— Ton Alex ? demande Léo.

— Déjà qui est Alex ? s'impatiente Sam.

C'est plus fort qu'elle. La brune ne supporte pas quand il lui manque des éléments et là, clairement, la discussion lui échappe.

— Alex est... était, corrige Louis. Un de mes amis. Dans la secte.

— Quoi ? hurle Billy. Tu es montée dans la voiture d'un sataniste...

Il est coupé dans sa phrase, Li ayant posé sa main sur sa bouche pour le museler.

— Tu peux continuer, assure-t-elle à Louis.

— Alex et moi, on a le même âge, enchaîne-t-il alors. Nos mères étaient très amies. On était comme des frères, lui est fils unique.

— Pourquoi est-ce qu'il ne s'est pas enfui avec toi ? interroge Liam.

Louis hausse des épaules. Il n'a jamais vraiment su, dans le fond. Parfois, ça lui pèse. À d'autres moments, il se dit que lui aussi a fait son choix.

C'est juste qu'ils n'ont pas fait le même.

— C'est lui qui m'a accueilli hier soir, poursuit Louis. Il m'a donné son téléphone pour que je puisse appeler Léo.

— Et quand il nous a vus avec Harry ce matin, il s'est arrêté pour nous emmener jusqu'à toi, achève Li. Il se doutait que tu serais à la chapelle.

Le brun sourit, ça lui fait chaud au cœur de l'apprendre. Ce qu'ils ont vécu ensemble a été tellement fort, il s'en veut d'avoir douté de lui.

— Je suis content que vous ayez croisé sa route, affirme-t-il.

Louis sent le regard de son petit ami sur lui. Si lui n'a pas réussi à avoir de réponses à ses questions, il sait que le bouclé en a des tas qui s'accumulent dans sa tête depuis qu'il a fui leur appartement.

Et celles-ci ne resteront pas sans réponse.

C'est ce qu'il lui promet dans son regard.

Il attend juste le moment où ils ne seront plus que tous les deux. 

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