⌜𝚜𝚎𝚙𝚝⌟

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Bonne lecture !

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Harry se fiche bien de la douleur. De ses côtes fêlées, de son visage tuméfié, de son souffle court et de sa peur grandissante. Il se sent glacé, ses jambes tremblent, mais pourtant rien ne peut le convaincre de détourner le regard.

Son estomac se retourne. Sa tête tourne.

— Alors, Draco ? C'est lui ?

Draco Malfoy a maigri, c'est évident. Il paraît si fin dans ses vêtements sombres, si pâle au milieu de l'obscurité de la pièce. Il fait froid, dans le manoir Malfoy.

Harry est déjà venu, une fois, au début de sa deuxième année. L'endroit n'a plus rien à voir.

Draco le regarde, l'observe. Harry lit dans son regard très facilement, et il se sent coupable d'être un peu heureux, au fond : de le revoir, il est en vie, Draco Malfoy est en vie. Peur, soulagement. Harry serre les dents si fort qu'il les entend grincer.

— Il a pas l'air de savoir. On devrait simplement les apporter tous les deux devant le Seigneur des Ténèbres.

— Et si on le dérange pour rien ? Pour un simple sang-de-bourbe qui tentait de s'enfuir ? Tu prendras cette responsabilité-là ?

— Draco, les coupe Lucius Malfoy. Regarde-moi.

Lui aussi a l'air complètement fou. Ses cheveux, qui avaient toujours été coiffés, lisses, d'un blond presque blanc, sont à présent secs et fouillis. Les cernes sont ses yeux sont encore pires que celle de Draco, d'un noir sombre inquiétant, et il s'appuie réellement sur la canne qu'il emmène toujours avec lui et qui contient sa baguette.

Il a vieilli. Il paraît négligé. Il force son fils à se retourner vers lui, et attrape ses épaules.

— C'est l'occasion de regagner notre place, Draco.... de regagner sa confiance....

Sa voix est à la fois rauque et aiguë, complètement épuisée. Harry sent sa tête tourner à nouveau, à genoux sur le sol : plus personne ne fait attention à lui, et Hermione serre les lèvres avec un teint blanc, de l'autre côté.

Les loups de Greyback de la lâchent pas d'un pouce. Son arcade sourcilière saigne et le sang goutte jusque sur sa joue.

— Draco, est-ce que tu le reconnais ?

— C'est nous qui l'avons trouvé, Lucius, grogne Greyback en s'approchant.

Il pointe Harry du doigt.

— On l'a senti, on l'a coursé, et on l'a ramené. Si quelqu'un doit l'amener devant le Seigneur, c'est moi. Tu ne prendras pas tous les honneurs.

Les deux hommes se fusillent du regard, argumentent un instant : silencieux, Harry voit tout avec netteté et douleur. Ils ont tous peur, ici, et pourtant ils le servent quand même. Le respect, la terreur, l'humiliation. Draco a un bleu sur la joue, Harry le remarque quand il se tourne vers lui.

Son estomac se retourne. Il s'approche de lui, et s'accroupit.

— Draco ? interroge Lucius en se retournant vers eux.

Il repousse Greyback qui grogne.

Leurs yeux se croisent, et Harry y lit beaucoup, beaucoup de choses. Leur couleur n'a pas changé, bien heureusement, mais il y voit la même chose qu'à la fin de l'année passée : des excuses, de la douleur, de la culpabilité, un soulagement pareil au sien de le voir en vie, et une peur véritable qu'il soit là devant lui. Tellement de choses dans un bleu si pâle, qu'Harry sent sa gorge se serrer.

Il a envie de dire : il n'y a pas de bonne réponse, Draco.

Parce que c'est vrai. Harry a vu son meilleur ami se replier, pleurer, envoyer des lettres à sa mère, se sentir piégé. Pour lui, c'est l'une des seules choses qui compte : il en veut à son père car lui a eu le choix, au début. Sa mère, Narcissa Malfoy, a seulement épousé le mauvais homme.

A fini par aimer la mauvaise personne.

Harry essaye de lui montrer qu'il ne lui en veut pas, qu'il le considère toujours comme son ami, que Draco Malfoy n'est pas responsable de tout ça. Il ne bouge pas, de remue pas les lèvres.

Harry regrette de s'être laissé attraper. Il regrette que le choix, ce choix-là, revienne aux mains de Draco (Sirius, Lupin, Tonks, l'Ordre : que font-ils tous ? Sont-ils au courant ? Harry ne veut pas se reposer sur les autres, mais Hermione s'agite de l'autre côté de la pièce et le regard de Draco lui donne envie de pleurer).

Il se tait.

Draco dit :

— Ce n'est pas lui.

Ces quelques mots imposent le silence le plus complet pendant de longues secondes. Hermione déglutit. Harry sent son cœur s'emballer. Il a envie de fermer les yeux, parce que le choix de Draco lui serre la poitrine : il l'a fait, il l'a dit.

— Comment ça c'est pas lui ? rugit Greyback. Y'a sa copine sang-de-bourbe, et même si on voit plus sa cicatrice c'est forcément...

— Ce n'est pas lui, répète Draco en se redressant pour plisser les yeux avec défi. Vous pensez le connaître mieux que moi, peut-être ? Vous avez passé les six dernières années avec lui ? Dans ce cas-là, apportez le au Seigneur des Ténèbres et faites-vous tous punir pour l'avoir dérangé pour rien, je m'en fous complètement.

Tout le monde trésaille, car apparemment les punitions sont nombreuses : Harry inspire, Voldemort s'impatiente, son armée a peur de lui.

Draco est là, au milieu de tout ça, et il vient de mentir.

— Envoyez-les aux cachots, qu'en finisse.

Lucius a les lèvres blanches, et regarde son fils reculer pour marcher vers le couloir. Narcissa doit être dans le manoir, quelque part, et les loups se Greyback se mettent à grogner.

— Faites-le, confirme Lucius. Nous avons la sang-de-bourbe, il viendra sûrement à nous.

Quelqu'un attrape Harry brusquement, réveillant ses douleurs et faisant remonter sa nausée. Ses genoux craquent quand il se lève, son visage l'empêche de grimacer, et soudain il se retrouve à côté d'Hermione, dans les escaliers.

Les Malfoy disparaissent, la pièce large et sombre aussi, et une odeur d'humidité lui remonte jusqu'aux narines.

Harry soupire discrètement. Il faut sortir de là, maintenant.

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Demain peut-être || DrarryOù les histoires vivent. Découvrez maintenant