Chapitre 59 :

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La mort n'est qu'une étape de la vie qui fait mal aux autres. 

J'enfilai une robe rouge achetée exprès pour l'occasion, c'était l'autre couleur des D.O.T.N. avec le noir, mais Emily avait imposé un dresscode et le noir était formellement interdit. "On ne va pas rendre ça plus déprimant que ça ne l'est déjà, non ? " s'était-elle justifiée auprès de moi. En effet, l'ambiance était au plus bas, il n'y avait pas besoin d'en rajouter. J'avais quand même pris un rouge tirant plus sur le bordeaux, histoire de ne pas me ramener avec une robe couleur flashy. Il ne fallait pas exagérer quand même. Je ne me maquillai même pas, de toute manière, j'aurais juste l'air de mettre pris un seau sur la tête, une fois mon maquillage coulé. Enfin, fallait-il encore que les larmes viennent. Rien n'était encore sorti et je m'en sentais presque un peu coupable. Certes, j'avais dit devoir me montrer forte pour les autres, mais même le soir, dans ma chambre, rien ne coulait. J'éprouvais une douleur terrible et j'avais envie de pleurer, mon coeur allait exploser à contenir autant de tristesse, mais c'était comme si les vannes étaient bouchées. Emily fit interruption dans ma chambre, le visage ravagé par les larmes. Elle, elle n'avait aucune difficulté à extérioriser. Néanmoins, je ne l'enviais pas : mon amie m'avait une fois confié que cela lui faisait mal à la poitrine d'autant sangloter et que ses yeux la brûlaient.  On s'observa un moment, puis elle s'effondra sur le sol. Je courus vers elle, m'accroupit à ses côtés et passai un bras autour de ses épaules. 

— Je...je ne sais pas...si je pourrais y arriver, parvenu-t-elle à articuler. 

— Tu peux le faire, Emily. Tu es forte et Aloïs ne voudrait pas te voir te morfondre. 

Elle releva son regard vers moi. Ce fut comme si on me donnait un coup de poignard en plein coeur, je lisais tant de peine dans les yeux de ma meilleure amie. 

— Je...l'ai...mais...te..tellement. 

— Je sais, Emily, je sais. 

— Tu...sais ce...ce que ça fait. 

Que voulait-elle dire ? Que je savais ce que ça faisait d'aimer quelqu'un ? De perdre quelqu'un ? 

— De...de perdre quelqu'un que tu aimes. 

Ah ! Un mélange des deux. Effectivement, je ne le savais que trop bien. J'hochai doucement la tête. 

— Je sais aussi que tu arriveras à surmonter tout ça. Qu'un jour, la douleur sera moins forte et que tu pourras avancer, respirer sans avoir l'impression d'étouffer. 

Cela m'avait pris du temps, certes, mais je lui cachais ce détail. Emily n'avait pas besoin de savoir le temps que j'avais mis, elle avait juste besoin de paroles rassurantes. Mon amie hocha la tête et déglutit avec difficulté. Je me levai et lui tendis la main pour l'aider à son tour. Elle l'a pris sans hésitation et je la serrai dans mes bras. Elle me chuchota un merci et on sortit de la chambre, main dans la main. Je serais là à chaque instant, à ses côtés, pour la soutenir. Que ce soit durant cette journée ou durant toute notre vie. Emily, elle, s'était maquillée et je lui aurais bien proposé d'y retoucher un peu, d'essuyer les coulures, je savais que le maquillage serait à nouveau dans le même état d'ici peu. Emily ne me lâcha pas la main de tout le trajet en voiture, au contraire elle la serra de plus en plus fort plus on approchait. Ma meilleure amie me lâcha la main, une fois arrivées, pour rejoindre une dame d'un âge plutôt avancé. Je devinais sans problème que c'était la mère d'Aloïs, elle lui ressemblait tellement que je dus détourner le regard. 

— On n'a jamais réussi à contacter son père, il est parti à peine Aloïs né, sans rien laisser derrière lui. Sa mère a fait du mieux qu'elle pouvait pour le nourrir, lui et ses deux frères, m'expliqua Charlie en me montrant deux jeunes hommes au loin. Elle est allée jusqu'à se prostituer, Aloïs avait beaucoup de respect pour elle, sa mère a tout sacrifié pour eux. Sauf que ça n'a jamais suffi, il a voulu l'aider, mais il était encore mineur. Rien de respectable n'acceptait de l'embaucher. Il a alors commencé à vendre des stupéfiants, Maël l'a aidé à se sortir d'un contrôle de police un soir. Personne ne sait vraiment comment, mais Aloïs disait toujours que quoi qu'il puisse faire, il ne pourrait jamais égaler le geste de Maël. Depuis, ils nous ont tous récupérés au fur et  à mesure. On formait une vraie famille. 

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