Chapitre douzième

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Livaï se tourna ensuite vers la rose.

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- Qu'arrivera-t-il quand le dernier pétale tombera ?

- Le maître demeurera une bête pour toujours et nous deviendrons.... commença Armin

- Des antiquités, continua Erwin.

- Des bibelots, poursuivit le chandelier.

- De la vaisselle d'occasion, fit Annie.

- De la camelote. Nous deviendrons de la camelote, termina Mikasa.

- Comment pourrais-je vous aider ? Il y a sûrement un moyen de rompre le charme, demanda Livaï en s'asseyant sur le bord du lit.

- Oui ! Il y en a bien un- commença Mikasa avant de se faire frapper par Armin, pour la faire taire.

- Ce n'est pas à vous de vous en inquiéter, ma colombe. C'est à nous d'assumer... les conséquences de nos actes, fit Erwin très sérieusement, alors qu'un autre pétale tombait. Des craquements se firent entendre dans tout le château, et le noiraud lança un coup d'œil au prince déchu, endormi dans le grand lit.

À quelques kilomètres de là, une silhouette s'approchait rapidement du pauvre Kenny, toujours attaché à son arbre et évanoui. La personne enleva sa capuche, révélant le visage sale de Petra. Kenny ouvrit les yeux à ce moment-là, ce qui permit à la jeune femme de le détacher et de le conduire plus facilement jusqu'à l'arbre qui lui servait de maison. C'était une vieille souche gigantesque, vestige d'un arbre qui devait être majestueux, avant qu'une quelconque raison ne le fasse tomber.
La rousse avait rassemblé toutes ces possessions dessous.

Elle aida le vieil homme à s'allonger sur son lit de fortune, avant de lui préparer un thé.

- Bois, ordonna-t-elle au vieil homme tremblant de froid.

- Merci.... Petra.

Pendant ce temps, Livaï lisait un livre à la Bête, encore alitée.

- « L'amour peut engendrer grâce et dignité. L'amour ne voit pas avec les yeux, mais avec l'âme. Voilà pourquoi-

- Voilà pourquoi l'ailé Cupidon est peint aveugle », termina Eren.

- Vous avez lu Shakespeare ?

- J'ai eu droit au meilleur des professeurs.

- Je crois que Roméo et Juliette est ma pièce préférée.

- Raah. Voilà qui n'est pas une surprise.

- Que voulez-vous dire ? fit Livaï, un peu agressif.

- Oh, toutes ces jérémiades, ces...peines de coeur. Beurk, fit-il en secouant les épaules pour bien montrer son dégoût. Il y a tellement mieux à lire.

- Comme quoi ? demanda le noiraud, légèrement sceptique.

Le prince se lève difficilement de son lit, s'habille rapidement, et demande au noiraud de le suivre. Il se dirige vers deux grandes portes qu'il ouvre, révélant une pièce énorme.

- Et bien, vous trouverez peut-être une ou deux choses intéressantes ici. Tout va bien ? demanda la Bête, en voyant que le noiraud s'était figé.
Il y avait de quoi. La pièce était une bibliothèque énorme, avec un nombre incalculable de livres. Le rêve pour tous les lecteurs, surtout autant assidus que notre noiraud. Lui qui n'avait droit qu'à la dizaine de livre de son village, il se retrouvait maintenant dans le paradis.

- C'est..... fabuleux.

- Euh, oui.... Probablement. Et bien.... S'ils vous plaisent à ce point, ils sont à vous, lui offrit la Bête, alors que le noiraud écarquilla les yeux, partagé entre un bonheur pur et un étonnement sans fin. Ce prince, soi-disant sans coeur, venait de lui offrir sans hésitation la totalité de cette bibliothèque merveilleuse ?

- Avez-vous réellement lu tous ces livres ? demanda Livaï, alors que son hôte s'en allait en boitillant.

- Quoi ? Pfff. Et bien, pas tous, non. Certains sont en grec.

- .... C'était une plaisanterie..? Est-ce que vous plaisantez maintenant ? demanda Livaï, en souriant.

- ... Peut-être bien, répondit le prince avant de partir, légèrement gêné.

Une fois la Bête hors de sa vue, le noiraud ne put retenir un petit cri d'excitation. Il avait de quoi occuper entièrement ses journées, et sûrement le reste de sa vie. Son rêve se réalisait enfin, et c'était grâce au prince.

Le soir même, ils étaient tous les deux à table, et Livaï avait un livre dans sa main. Ils se fixèrent du regard quelques secondes avant que le noiraud ne recommence sa lecture. Le prince attendit un petit moment avant de plonger sa tête dans le bol et de manger comme un chien mourant de faim le ferait. Son invité releva la tête aux bruits étranges et fixa son hôte, déstabilisé. Celui-ci releva la tête, les poils de son menton rouges à cause de la soupe à la tomate. Le noiraud pouffa pendant que la Bête détournait le regard, honteux.

Le lendemain, ils se promenaient dans les jardins, et Livaï lisait à vois haute.

- « Le ciel est bleu, intense, vivace, entouré d'un fourreau de glace. Chaque branche, chaque feuille, quand vient l'hiver, est miraculeusement recouverte.... de verre », termina le noiraud en regardant la créature à ses côtés. Ils s'arrêtent sur un pont et regardent la vue magnifique devant eux. Le lac gelé, les arbres entièrement blancs.
Un spectacle à couper le souffle.

- Il me semble le voir pour la première fois. Vous ne.... lisez plus ?

- Hahaha, hum. « Mais dans ce silence solennel, j'entends le bruissement du monde ensommeillé. Voyez ! Regardez-moi ! Sortez-moi de mon sommeil ! Je serai votre à jamais. » termina le noiraud en regardant son interlocuteur dans les yeux. Ils se fixèrent quelques secondes avant de se tourner en même temps vers le lac.
C'était un moment bien trop gênant.

Ils revinrent ensuite vers le château et Philibert était devant la porte. Eren tenta une approche, mais le cheval fit un écart.

- Chuuuut, le calma le plus petit, avant de se saisir de la main du plus grand. Il la posa sur l'encolure de l'animal avec la sienne, et se recula légèrement avant de s'en aller.

Quelque chose brille dans son regard. D'aussi fragile et d'aussi léger qu'un espoir. Voilà qu'il est plein de douceur, je ne savais pas qu'il allait s'ouvrir au bonheur, pensa le jeune Ackerman, regardant le prince imiter Philibert qui s'ébrouait, tout content de pouvoir le caresser.

Livaï, en haut des escaliers, lança soudainement une boule de neige qui atterrit sur Eren.

- Hahaha ! fit celui-ci quand elle lui arriva dessus.

Eren, en voulant se venger, en prépara une énorme qu'il balança sur notre pauvre noiraud. Quand la boule le percuta, il tomba à la renverse sous le choc.

Et la Bête rigola doucement, fière de sa vengeance.

Pendant le repas du soir, le prince était troublé. Il me regarde, c'est si nouveau. Et sa main a frôlé la mienne comme un oiseau ! Non, je n'y crois pas ! Pourtant, c'est sûr ! Jamais il n'avait eu le regard aussi pur, pensa le prince, en se levant, prenant son assiette pour se placer aux côtés de Livaï. Il lui jeta un coup d'oeil et hésita sur la façon de manger. Étrangement, il voulait mieux se faire voir par la personne assise à sa droite.
Voyant son trouble, celle-ci posa son livre, et saisit son bol à deux mains, avant de le pencher pour boire. La Bête l'imita et semblait fière, ayant réussi à faire moins de bruit que la veille.

Livaï était troublé par ces sentiments nouveaux qu'il ressentait.

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