Le deuil.
La solitude.
Ce sentiment de manque qui reste bien ancré.
Qui me rappelle à quel point je suis seul.
Chaque jour.
Chaque heure.
Chaque minute de cette putain de vie.
Une musique douce et amère qui ne cesse de se répéter depuis ce fameux soir. Depuis qu’ils m’ont laissé.
C’est de plus en plus dur. Ça l’est particulièrement aujourd’hui.
Je prends une grande inspiration, relève la tête et fixe mon reflet dans le miroir. J’ai passé plus de temps à me maquiller aujourd’hui pour camoufler mes yeux verts fatigués. J’ai encore trop pleuré…
Aujourd’hui, je dois être forte…
Je lâche un soupire et attrape la brosse à cheveux posée sur le lavabo. Je la passe dans mes longs cheveux bruns qui tombent sur mes épaules.
Une fois prête, je prends une grande inspiration et sors de chez moi pour me rendre sur la tombe de mes parents.
Ça fait 13 ans aujourd’hui…
Leur navire a fait naufrage alors qu'ils étaient sur le chemin du retour après un long voyage.
J'en profite pour déposer une fleur sur la tombe d'à côté où gît une petite fille morte beaucoup trop tôt, comme mes parents.
Après m’être recueillis un long moment, je pars rejoindre l’université pour assister à mon cours de mathématiques. Le premier d’une longue journée…
Je termine avec mon dernier cours avant les vacances, celui de Mythes et Légendes. Le regard sur ma montre, j'essaie de retenir les larmes qui menacent de couler. Je ne veux pas pleurer devant ceux qui se moquent de moi à longueur de journée, c'est-à-dire les autres étudiants qui ne savent rien de moi, mais qui se permettent quand même de me juger.
Discrètement, je lève la tête et croise le regard de Josh, l'assistant de Mme Judenberg. Je me force à sourire pour le rassurer.
Deux heures plus tard, je sors de l'amphithéâtre en courant. J’avais oublié que j’avais patin aujourd’hui. Je dois me dépêcher de récupérer mes affaires chez moi et d’aller à mon entraînement.Arrivée à la patinoire, Fabio m'attend le regard noir. Je passe devant lui et bafouille des excuses. Il répond par un « Daphné, juste grouilles. »
J'enfile rapidement mes patins et me mets en piste pour m'entraîner.- Plus droite ta jambe ! Bon sang Daphné, tu es trop raide ! Lève-là et n'oublie pas de sourire por favor, s'égosille Fabio en perdant patience.
Rapidement, il remarque que ma concentration n'est pas optimale et me demande de m'arrêter pour discuter.
- Daphné, vide-toi la tête s'il te plaît, tu as du potentiel pour te faire un nom dans le métier.
"Donc ne me déçois pas", c'est ce qu'il sous-entend. Je ne peux me permettre d'échouer pour ce concours, je me suis tant entraîné. Ma mère souhaitait que je devienne patineuse, je ferais ainsi tout pour lui montrer que je suis capable de le devenir.
Je me repris et me concentrai davantage pour réaliser cette pirouette qui me cause tant de problèmes.
Les yeux fermés, je me concentre et me lance en ré-ouvrant les yeux pour effectuer mon enchaînement. Élancée, je commence mon exercice et arrive rapidement au moment redouté. Muée d’une envie de me dépasser, je décide de tenter une autre figure…
- Preciosa ! Mais tu es folle, reviens immédiatement ! Tu vas te casser quelque chose, tu sais très bien que cette figure est beaucoup trop compliquée. Tu n’es pas encore prête ! Si tu la tentes dans ton état, tu vas tom…
Je n'eu pas le temps d'en entendre davantage, et chute. Je sens ma cheville me lâcher, ma main se place automatiquement sur celle-ci, elle me fait terriblement mal.
- Daphné ! Crie-t-il en se précipitant vers moi.
- Ça va ! Je me lève et je recommence ! Me persuadais-je en me mettant debout.
Fabio regarde alors ma cheville, elle est gonflée avec des nuances de violet et de bleu sur les côtés.
- Je suis désolé ma belle, c'est fini pour toi…
Énervée, je lâche un juron et m'appuie sur les rebords de la patinoire pour sortir. Je boitille sur le chemin et m'approche de la plage.
Mes larmes commencent à ruisseler sur mon visage, je craque... Pourquoi le destin s'acharne-t-il autant sur moi ? Pourquoi mon rêve vient-il de se briser ?
Je m’arrête à quelques mètres des vagues qui s'échouent sur la plage et hurle ma tristesse.
- Bordel ! Qu'ai-je fait pour être puni ainsi ?
Le soleil commença à se coucher, mon regard se promène sur une petite barque attachée pas loin. Je m'élance et monte dedans comme jadis avec mon père. Une fois au milieu de l'océan, je verse mes dernières larmes. J'en ai marre de tout ça, marre d'être faible !
Ce soir, tout sera terminé…
J'ai beau lutter, entre la mort de mes parents, mes dettes et le reste, rien ne va ! Je pensais qu'à l'université, les mentalités auraient changé, mais il n'en est rien.
Ma blessure m'empêche désormais de participer au concours et Fabio ne me reprendra jamais dans son équipe. De toute façon, je n'ai aucune attache, donc à quoi bon.
- Je veux que tout ça s’arrête ! Criais-je dans le vide, le visage inondé par les larmes.
Je me mets debout et scrute le bleu de l'eau. Une dernière souffrance avant la paix, une dernière pensée avant un repos éternel. Un flocon tombe soudainement devant moi. Je le recueille donc dans mes mains. Mes larmes cessent de couler tandis qu'une multitude de flocons commence à tomber. Pour la première fois, depuis longtemps, je laisse échapper un éclat de rire.
Je lève les yeux au ciel puis les ferme avant de basculer et de me laisser tomber. Mon corps plonge dans l'eau, les battements de mon cœur ralentissent et au contact du froid, mes membres commencent douloureusement à se paralyser.
Rapidement, je sens deux bras musclés me récupérer. Je remarque en ouvrant légèrement les yeux que cet homme est blond. Il me remonte à la surface, son visage me semble étrangement familier.
Il me maintient contre son corps chaud et murmure quelques paroles incompréhensibles. Ses lèvres rencontrent les miennes et sa main me soutient la nuque.
- Oublie toute ta peine et ta douleur et deviens sirène. Ta voix te servait à crier et à pleurer, désormais, tu pourras chanter et ensorceler.
Ses paroles me bercent, mais une sensation terrible me sort de mes songes.
Mes os craquent, je lâche un hurlement, mais me sens bizarrement libéré. J’ai l’impression de revivre et reprends vite ma respiration. Il me ramène vers la plage, ma tête contre son torse.
Un mal de crâne me plongea dans le noir complet. J'étais devenu une sirène, et je ne ressentais ni la douleur, ni la tristesse, juste un désir de vengeance insatiable.
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Love Mermaid
ParanormalDaphné est une jeune sirène, au passé compliqué et au présent chamboulé. La vie l'a rendue froide, manipulatrice, et cruelle. Jouer et séduire font désormais partie de son quotidien. Ses chants mélodieux charment les hommes comme dans les légendes. ...