7.

70 4 14
                                    

Sa dernière phrase me fit légèrement rougir. Je ne savais pas comment interpréter ce qu'elle venait de me dire. Voyant mon mal être, elle me fit entrer dans son appartement puis me débarrassa de ma veste. Je me déchaussai puis me rendis dans son salon. J'étais sans voix. Son appartement était petit mais bien décoré et très propre. Un immense piano trônait au milieu de la pièce principale. Il y avait de nombreux cadres au mur. D'artistes, d'élèves, de personnalités. Américaines sans doute. Il y avait même une guitare. Un sofa blanc et une table basse se trouvaient un peu plus loin. Quelques pots de plantes posés un peu partout venaient égayer encore plus l'appartement.

Elle m'invita à m'asseoir et je la remerciai. J'étais frigorifiée alors qu'il faisait chaud dans l'appartement. Le stress ne m'allait clairement pas. Elle partit chercher quelque chose dans la cuisine puis revint quelques secondes après avec un plateau contenant deux tasses de thé et des « Yakgwa* ».

« Merci beaucoup Mme Smith. »

Elle s'assit à côté de moi et but un peu de son thé. Elle déposa sa tasse afin de me regarder plus attentivement. Elle ne faisait que sourire. J'aimais ça. Sa bonne humeur me mettait à l'aise. « Je suis ravie de te rencontrer Ayana. »

Son accent était encore présent et je trouvais ça adorable.

« Moi également Mme Smith. »

« Hmm hmm pas de « Mme » avec moi. C'est Elizabeth. Compris ? »

« D'accord Elizabeth, pardon haha ! »

Elizabeth continua de m'observer tout en plissant ses yeux de temps en temps. C'était un peu gênant. J'avais l'impression qu'elle essayait de lire en moi.

« Je suis agréablement surprise Ayana. Je ne m'attendais pas à recevoir une métisse asiatique comme élève. »

« Vraiment ? Enfin je veux dire... Comment ? »

« Je le sais c'est tout. Tu as de magnifiques traits asiatiques mais ton regard et ton teint de peau ne trompent pas. Il y a du sang noir qui coule dans tes veines, je le sens. Je me trompe ? »

« Pas du tout Elizabeth. Vous avez tout juste. »

« Mère ou père ? »

« Ma mère. Elle était éthiopienne/japonaise mais avait la nationalité coréenne. »

Elizabeth bougea sa tête au ralenti. « Pourquoi parles-tu d'elle au passé chérie ? »

« Eh bien... elle est décédée il y a 10 ans maintenant. Elle était très jeune. Elle n'avait que 35 ans. Je... euh... »

Elizabeth posa sa main sur la mienne comme pour me rassurer. « Prends ton temps chérie. On a tout notre temps. Si tu ne veux pas en parler tout de suite, il n'y a aucun problème d'accord ? Je ne te forcerai pas.»

« Oui, merci Elizabeth. » Je bus un peu de mon thé puis redéposai ma tasse sur la table basse. « Mais pourquoi est-ce que vous avez dit que j'étais votre première élève métisse asiatique ? »

« Parce que c'est le cas. 90% des élèves que je reçois sont afro-américains, sud-américains ou africains. Certains viennent de loin pour venir prendre des cours avec moi.»

« Et les 10% restants? »

« Mystère. » Elle me fit un clin d'œil puis se mit à rire.

Je lui souris puis pris un gâteau.

« Excuse-moi, il faudrait peut-être que je me présente quand même. Où sont passées mes bonnes manières. Je m'appelle Elizabeth Catheryn Smith et j'ai 60 ans. Je suis née et j'ai vécu à New-York dans le Bronx. J'ai consacré toute ma vie à la musique et au gospel. Petite déjà, je chantais dans la chorale de l'église de mon quartier. C'était une toute petite église qui devait accueillir un peu moins de 100 personnes. En grandissant, ma mère a su voir le potentiel que j'avais. Ma voix n'était pas comme celle de toutes les petites filles de 10 ans. J'avais quelque chose de plus. Comme une force que j'arrivais à faire passer à travers ma voix. Juste avec le chant. C'est à partir de cet instant que j'ai su que je voulais en faire mon métier. Je continuais mes chants d'église tout en faisant mes études mais je n'abandonnais pas mon objectif. J'avais le soutien de mes parents et ça n'avait pas de prix surtout à l'époque. En tant que femme noire, je voulais faire passer un message fort. Ce n'était pas parce que j'avais moins de droits que d'autres que je devais me laisser marcher sur les pieds. Je voulais montrer à toutes ces personnes que nous avions une VOIX. Que j'avais une VOIX et que cette voix était capable de faire des miracles. Qu'elle était capable de faire pleurer les gens. De rassembler les gens. De faire danser les gens. De les faire s'aimer. C'était ce que je voulais et j'ai réussi. »

Fighting with LoveOù les histoires vivent. Découvrez maintenant