Prologue - Chaos

125 10 9
                                    

J'ignore quand je l'ai rencontrée, pour être honnête. De même que j'ignore ce qu'on s'est dit exactement, ce jour-là. Ce dont je suis sûre, cependant, c'est du sentiment qui m'étreignit le cœur. Puissant. Tendre. Une explosion peut-être ; une renaissance plutôt. C'est ça.

“— Salut.”

Et ça, aussi. Je m'en rappelle. Comment l'oublier ? Toute la nonchalance, l'insolence, la malice ; tout était exprimé à travers ce mot, cinq lettres : Salut. Pas la moquerie, non ; elle ne se moquait pas, jamais. Elle vous regardait, vous qui lui étiez drôle d'oiseau, avec un mélange de curiosité et d'indifférence. Mais jamais avec moquerie.

“— Salut...”

Puis le mien, moins assuré, moins loquace même ; à peine un murmure. Un murmure qui criait : Qui es-tu, toi ? Pourquoi es-tu magnifique ? Comment ai-je fait pour vivre jusqu'ici sans te connaître, sans sentir l'empreinte de ton regard sur le mien, sans écouter ta voix qui fredonne des "Salut" presque machinalement ? Qui es-tu, que m'as-tu fait, que fait-on maintenant ? Et qui suis-je ? Car il me semblait que mon identité entière venait de basculer, que mon ADN avait été réécrit. D'où l'idée de renaissance. Je n'aurai pas la prétention de me dire phénix. Les phénix meurent d'abord, et reviennent à la vie ensuite, plus majestueux que jamais. Les phénix périssent, renaissent ; moi, je n'existais pas, et j'ai été amenée à la vie. Ce qui est plutôt paradoxal, au final, c'est que j'ai cru perdre mon souffle en le retrouvant. Ça m'a vrillé le cœur. Ça l'a fait battre. Pour la première fois de ma vie, je l'entendais, bien ancré dans un bouquet d'artères et de veines, dans ma poitrine.

En mots, ça donnerait à peu près ça : coup de foudre. Mais je n'aime pas cette notion. Je n'ai pas eu l'impression d'être frappée par le ciel. Non. J'étais simplement devenue une part de lui. Un morceau de nuage dans cette immensité bleu azur, une présence.

Alors je l'ai fixée, avec toute l'intensité des émotions qui me traversaient, et je crois qu'elle a compris parce qu'elle a esquissé un sourire. La suite, je m'en souviens à peine. Ce que je sais, en revanche, c'est qu'on ne s'est plus quittées. Qu'elle s'est entichée de moi. Peut-être comme on s'encombre d'un animal, d'un enfant même. J'ai eu le sentiment qu'elle me tolérait et appréciait ce que je ressentais pour elle. Peut-être même me supportait-elle pour cette unique raison. Mais ça m'allait. C'était bien. C'était bon. Elle était là avec moi, c'était tout ce qui comptait.

GrandiosesOù les histoires vivent. Découvrez maintenant