H ê p h a i s t o s

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“Oh, non, lâchai-je, dépitée.”

L'ours en peluche gisait au sol, pauvre victime de l'agression la plus dramatique depuis l'aube de l'histoire de l'humanité : son œil avait été sauvagement arraché par le chat des voisins. Ce qui, évidemment, ne manqua pas de déclencher le chagrin instantané de /, qui se mit à pleurer à chaudes larmes, assis à deux pas de la scène du crime. Je le pris dans mes bras.

“Ça va aller, mon bébé, le rassurai-je. On va le réparer. Promis.”

Ses pleurs semblèrent se tarir et il se calma peu à peu. Neve me répétait souvent que dans mes bras, / trouvait systématiquement la paix. C'était l'une de mes plus grandes fiertés : pouvoir amener l'accalmies sur les tempêtes qui agitaient son petit cœur.

“— Pour de vrai ? renifla-t-il.

— Mais oui ! Je vais te montrer.”

J'installai sur la table tout le matériel de couture nécessaire : à savoir une aiguille, un bouton et du fil. / sur les genoux, je me saisis délicatement du doudou et entrepris de remplacer l'ancien œil par un nouveau. Lorsque j'eus finis, je le montrai à son heureux propriétaire, qui sourit grandement, faisant apparaître deux fossettes qui, j'en étais persuadée, cachaient les secrets du bonheur dans leurs plis.

“Tu vois, mon chéri, tout se répare ici-bas. On peut regretter ce qu'on était auparavant, mais au fond la vraie beauté réside dans les histoires qui nous transpercent de la pointe de leur plume. Et maintenant tu pourras raconter que ton ours a vécu une drôle d'aventure, et que c'est ainsi qu'il a eu ce nouvel œil. Il portera un regard différent sur le monde, oui, mais il n'en sera pas moins beau. Et c'est tout ce qui compte.”

GrandiosesOù les histoires vivent. Découvrez maintenant