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Parce que les fictions servent à faire des fins heureuses...

Après être partie comme une lâche, après avoir détruit mon coeur à coup de hache.
Je me suis jetée dans les bras de la première venue. La première qui a bien voulu.
C'était la nouvelle infirmière du service, avec elle j'allais connaître l'apogée de tous mes vices.
Au début, je la tolérais, à la limite de la supporter.
Et puis une nuit de tristesse, une nuit de ténèbres, elle a voulu m'écouter, alors je lui ai tout gerbé.
J'ai été sans pitié, comme si sous ma peine je voulais l'ecraser, la disloquer.
Elle était là, compatissante, avec sa bienveillance arrogante, avec son empathie écoeurante. Je voulais lui faire mal autant que j'avais mal. Je voulais la baiser autant que j'étais brisée .
J'étais devenue cette femme sombre, qui n'etait plus qu'ombre. L'ombre de son âme, l'ombre de son mal.
Elle était jolie, bien sûr pas autant qu'Yivi mais je me disais qu'elle ferait l'affaire, qu'elle pourrait sûrement me staisfaire.
Alors, je l'ai écoutée me dire combien j'étais jolie et désirable, combien j'étais gentille et formidable, touchante et attachante mais j'étais surtout écorchée et trébuchante.
Pour étouffer mes pleurs, elle est devenue mon leurre.

Les premières semaines avec Violaine, j'ai anesthésié ma peine.
Je m'assomais dans d'autres bras, dans d'autres draps, dans d'autres parfums, dans d'autres mouvements de bassin.
Je me suis vautrée dans la baise, comme on se jette d'une falaise.
Je dépouillais son corps sans aucun reconfort.
Ses cris de plaisir avaient le goût de mes heures passées à vomir.
Moi... Je sombrais encore plus, moi....je gerbais encore plus
Puis, elle s'est mise à parler d'amour, de promesses et de toujours.
Ses mots de velours, m'écoeuraient, me dégoûtaient, mais son bonheur était à la hauteur de ma noirceur.
Et j'ai plongé dans une vie de mensonges à lui conter des songes pour oublier la peine qui me ronge.

Depuis dix longs mois, elle partage ma vie, depuis dix longs mois, je survis.
Cette nuit encore, ses lentes minutes de plaisir m'ont fait souffrir.
Je lui offre rarement mon corps pour cette petite mort.
Non...je tiens à la faire jouir pour me punir.

A cette heure tardive, je suis lasse entre ses bras qui m'enlacent et me cadenassent
Son souffle chaud dans mon cou me donne la nausée.
Je dois me libérer, me délivrer.
J'écoute sa respiration calme et profonde pendant que dans mon ventre le tonnerre gronde.

Je delaisse sa tendresse qui me blesse et je me rends à la salle de bain pour mon plaisir clandestin.
Mes doigts s'enfoncent pour une putain de défonce.
Au dessus des toilettes, je flirt avec ma luette et la bile dans un soulèvement habile devient abrasive et jouissive.
Vomir en silence, faire rugir ma panse, c'est terriblement fantastique, terriblement orgasmique.
Il n'y a plus que ma colère comme un tragique tremblement de terre.
Ma rage explose comme un orage et mon dégoût, ravage tout comme une coulée de boue.
Les filaments de sang annoncent le vide réconfortant et la respiration haletante je me laisse glisser totalement pantelante.

Quelques minutes plus tard, à l'heure où rentre les fêtards, pour parfaire mon plaisir clandestin, je m'explose la tête avec un joint.
Dans ces heures nocturnes, je voudrais n'être plus qu'une urne, alors en équilibre sur la fenêtre, je rêve de la disparition de mon être.

*******************

Le soleil s'apprête à glisser au dessous de la ligne d'horizon.
Assise sur les berges de la Garonne, un verre de vin à la main, je fête mes 37 ans avec Violaine.
Le spectacle est magnifique.
Je regarde les couleurs feu dans le ciel lorsqu'une grande lassitude s'abat sur mes épaules.
Je suis usée, épuisée par cette vie vide de sens, par cette vie terne, cette vie à faire semblant.
Toujours faire semblant..
Semblant d'etre heureuse, d'être amoureuse.
Semblant de sourire, de rire, de vivre...
Je suis devenue une petite coquille vide, tellement vide.
Et ce vide... ce vide sidéral fait tellement mal.

La Morsure Du DésirOù les histoires vivent. Découvrez maintenant