Lawrence

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Héla ouvrit les yeux doucement. Au fond d'elle, elle ne fût pas surprise de se trouver encore chez Miranbeau. Son sauvetage, elle en avait seulement rêvé. Elle le savait. 

La jeune femme s'assît sur le bord du lit. Elle aurait aimé ne se souvenir de rien, avoir simplement tout oublié, mais ce n'était pas le cas. Elle se souvenait de tout. De tout dans les moindres détails. Héla se rappelait la sensation de vide, de détresse... La douleur aux poumons et les vertiges que lui avaient procuré le manque d'air. Elle se rappelait même du visage de Miranbeau, serein, amusé par moment par ses pleures. Malgré tout, en s'étirant, elle fût soulagée de voir que sa tortionnaire avait retiré le collier de cuir qu'elle lui avait enfilé. Un passage dans la salle de bain lui fît constater la marque violette qu'il avait laissé dans son cou, mais peu importe. Elle se sentait mieux sans cette chose. Héla se doucha et rejoignît le rez-de-chaussée en faisant le moins de bruit possible. Elle espérait que Miranbeau ne soit pas là, mais elle ne fût malgré tout pas surprise de l'entre apercevoir, assise au bar de la cuisine, et lui faisant déjà signe de la rejoindre. 

Héla s'assit à la place la plus éloignée possible de Miranbeau dans un silence de mort. Elle accepta l'assiette que lui tendit sa tortionnaire et commença à manger, tête baissée.

-"Lawrence... Souffla finalement Miranbeau.

Héla se figea et fît mine de ne pas avoir entendu... Avait-elle dit....? Non... Ce n'était pas possible...

-Lawrence... Répéta Miranbeau un peu plus fort. Je me demande bien qui cela peut-être...

Héla releva la tête vers Miranbeau, un voile de terreur sur le visage.

-Pas ta mère en tout cas n'est ce pas ? On ne regarde pas sa mère comme tu m'as regardé hier. Un sourire sadique éclaira le visage de Miranbeau. Elle bût une gorgée de café.  Tu as cru que j'étais elle, si tu te poses la question, se moqua la femme d'affaire. Tu t'es blottie contre moi en me faisant les yeux doux si tu veux tout savoir.

Héla frissonna de dégoût, elle en eût presque la nausée.

-Ne fais pas cette tête, je t'en prie, la réprimanda Miranbeau. Je suis juste curieuse, je voudrais savoir de qui il s'agît.

-Je ne connais pas de Lawrence, mentît Héla qui devenait rouge pivoine. 

-C'est ta petite copine n'est ce pas ? Demanda Miranbeau, mais le visage d'Héla se ternit.

-N-Non... Répondit la jeune femme. Ce n'est pas ça.

Une douleur écrasa la poitrine d'Héla. Bien sûr que c'était douloureux, ça l'avait toujours été. Même ici, entre la vie et la mort, ça restait douloureux. À croire que personne ne pouvait comprendre ce que souffrir d'aimer signifiait.

-Qui alors ? Insista Miranbeau.

-Une amie. Répondit Héla les dents serrées. Elle ne regarda pas Miranbeau mais elle savait déjà quel sourire s'était affiché sur son visage.

-Et tu ne lui as jamais dit ?

-Quoi ? Grogna Héla.

-Que tu étais amoureuse d'elle à en mourir ?

-Je ne l'aime pas. Répondit Héla d'un ton assuré que Miranbeau ne lui connaissait pas, mais malgré tout, elle en trouvait la jeune femme encore plus intéressante. 

-Tu vois, poursuivît Miranbeau, c'est ça, la différence entre toi et moi, moi, quand je veux quelque chose, je le prends. Toi, regarde toi, tu pourrais passer une vie à attendre cette fille qui ne sait même pas ce que tu ressens.

-Je... Je n'ai pas besoin de conseils. 

-Tu es lâche, voilà tout. Assena Miranbeau qui sût aussitôt qu'elle venait de réussir à atteindre la jeune femme en plein coeur.

-Qu'importe... Souffla simplement Héla le regard triste.

-Qu'importe, répéta Miranbeau. De toute façon, tu n'auras plus l'occasion de lui dire.

À cette pensée, les yeux d'Héla se chargèrent de larmes. Elle s'était pourtant jurée de ne jamais lui dire... Pourtant, le simple fait que cela puisse être réel... Le simple fait qu'elle ne lui dirait véritablement jamais... Cela ne faisait que décupler la douleur. Personne ne savait. Personne ne pouvait savoir à quel point ça faisait mal. 

-Elle est comment ? Demanda Miranbeau après un moment.

Héla ne répondit pas, elle se contenta de boire le verre de jus d'orange qui lui était destiné.

-Je pourrais te torturer des heures pour que tu te blottisses contre moi comme tu l'as fait hier. Alors dis-moi. Comment est-elle ?

Héla déglutît difficilement.

-Elle est... Forte. Intelligente, belle... Drôle. L'espace d'un instant, Héla crût qu'elle s'arrêterait là. Mais tous ces sentiments... Toutes ces choses si profondément enfouies, desquelles elle n'avait jamais pu parlé, à qui que ce soit... Ces choses ne demandaient qu'à sortir. Peut importe qui était là pour les entendre. Elle a des failles, reprît Héla, mais... elle garde la tête haute, toujours. Elle est maladroite dans ses mots et émotive... Mais elle est tellement grande et déterminée dans tout ce qu'elle fait... Elle a aussi ce sourire triste et ce regard d'abandon... Elle est pleine de courage et de force de conviction.

Devant ses paroles, Miranbeau ne pût retenir un sourire attendri. 

-Vous êtes proches ?

-Assez pour que ce soit terriblement... Douloureux. Admît Héla d'une voix tremblante. Pour que je l'aide à régler ses peines de coeurs, qu'elle me parle de ces petits copains... Qu'elle me serre dans ses bras et que je me débatte pour éviter de sentir son parfum.

-Pourquoi tu ne lui as jamais dit ?

-C'est simplement que... Les yeux d'Héla se perdirent dans le lointain. Je n'aime pas les gens de cette façon... Je... Je ne pourrais jamais lui donner ce qu'elle veut, même si elle m'aimait en retour.

Miranbeau arqua un sourcil et ce mît à sourire.

-Attends, tu parles de sexe là ?

Héla blêmît.

-Je...

-Tu la veux pour toi, mais tu ne la désire pas. C'est ça l'idée ? Et puis tu as tellement peur de la priver de son bonheur et de son plaisir que tu préfères oublier le tien. Miranbeau soupira avant d'hausser les épaules. Décidément. Une proie.

-A-Allez vous faire foutre. Bafouilla Héla en quittant la table."

Madame MiranbeauOù les histoires vivent. Découvrez maintenant