Les Créations (session 3)

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« Le couvre-feu venait de sonner et cela me met dans une rage noire.

Cela fait des années que je reste cloîtré chez moi. L'extérieur me faisait peur, très peur. Les gens m'effrayaient purement et simplement.

Et puis, la semaine dernière, dans la cage d'escalier, je me suis cogné dans quelqu'un. J'ai failli tomber dans la bousculade. Le sourire d'Étienne est lumineux, ses yeux brillent de malice. Nous avons passer une bonne partie de l'après midi à discuter. Et le lendemain aussi. Pour la première fois, j'ai envie de bouger, de sortir de cet immeuble. Il doit venir me chercher ce soir après son travail. À 22 heures. Alors, tant pis, je m'oppose à suivre cette règle. Couvre feu ou pas, je sors.

22h30. Je suis à côté de la porte d'entrée, dans le noir pour ne pas être repéré par qui que ce soit. Étienne m'a laissé un message, il arrive. Il a perdu pas mal de temps, il a du sortir du métro, il a pas d'attestation, il travaille au black.

La porte s'ouvre et son sourire illumine le corridor.

-Tu n'as pas changé d'avis ? On peut attendre un peu, le couvre feu ne durera pas longtemps...

-Cela fait deux ans que je suis enfermé, que j'ai peur de l'extérieur. Avec toi, j'ai confiance. Si on se fait arrêter, je paierai pour toi.

Notre promenade a duré deux bonnes heures, Étienne connaît la rue, il a su nous faire éviter les forces de police. Avec lui, je ne crains rien.

Demain on recommence... »

Mayou82 (@Mayou82)


« Le couvre-feu venait de sonner...

*ding dong ding dong*

Dans un lent battement cuivré, la cloche du village prévint les passants de presser le pas.

Les rues en ruine se vidèrent. Les coups de feu se turent.

Les cadavres pouvaient enfin commencer leur longue nuit d'hiver, allongés sur le champ de bataille, la tête enfoncée dans la terre.

Les portes des maisons qui tenaient encore debout abritaient des habitants tremblants, qui ne pouvaient s'empêcher de tendre l'oreille. Les avions étaient-ils partis ? Quand pourrait-on espérer apercevoir enfin le trou du tunnel ? Quand les enfants pourraient-ils manger à leur faim et retourner à l'école ?

Quand pourraient-ils enfin revivre ? »

VALEM77 (@VALEM77)


« Le couvre-feu venait de sonner...

Comme chaque soir à cette heure-là, j'avais l'impression de revivre. Je me risquais derrière le rideau et observait les derniers passants se dépêcher de rentrer chez eux à travers les vitres teintées. D'ici quelques dizaines de minutes, je m'emmitouflerai chaudement dans plusieurs épaisseurs de vêtements, et je sortirai dans la rue. Pour quelques instants, je pourrais savourer l'air du dehors et sentir le vent frais dans mes jambes, sans qu'aucun humain ne vienne m'importuner. Je serais seule, enfin libre.

Les hommes qui peuplaient habituellement les rues, le soleil qui éclairait la ville, les couleurs vives des affiches m'oppressaient. Cela faisait des années que je ne sortais plus de chez moi à cause de cela. Ce couvre-feu avait été pour moi une libération.

Enfin, j'avais la certitude de ne croiser personne, dans les rues alentours. Enfin, je pouvais sortir sans m'exposer aux rayons dévastateurs de l'astre diurne. J'appréciais chaque instant que je passais au dehors comme un don du ciel, pour moi qui était restée cloîtrée à l'intérieur depuis mes douze ans.

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