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Vers dix-sept heures, on sonne à la porte. Fabien étant rentré du travail plus tôt dans l'après-midi va ouvrir. Il s'agit de ma tante. Elle m'avait envoyé un message dans l'après-midi me demandant si elle pouvait venir en avance, comme cela fait plusieurs semaines que l'on ne s'est pas vu j'ai accepté volontiers.

- Bonjour, vous devez être le colocataire de mon cher neveu je suppose, Fabien c'est ça ?
- Oui, et vous devez être la maman de Stéphania ? Je suis enchanté de vous connaître Madame.
- Oui, moi de même, mais je vous en prie, appelez-moi Andrée, répond gentiment ma tante alors que je me dirige vers eux.
- Tantine. Dis-je simplement en la prenant dans mes bras. Ça fait plaisir de te voir. Je t'en prie, entre.

Après avoir échangé quelques banalités, j'informe ma tante que Stéphania est à l'étage, et nous installons sur le canapé.

- D'accord, j'irai la voir plus tard, me dit-elle. Je suis désolée que tu doives l'héberger, tu es sûr que ça ne te dérange pas ?
- Non, pas du tout, ne t'en fais pas, puis ça faisait plusieurs semaines qu'on ne s'était pas vu donc on rattrape le temps perdu.
- Au fait, il n'a pas l'air méchant ton colocataire, il n'est pas vraiment comme ton père me l'a dépeint.

Je jette un regard à Fabien, qui est installé au bord de la piscine, une cigarette à la main. Depuis quand il fume d'ailleurs ? Je suppose que l'annonce de ce soir doit certainement l'angoisser également.

- C'est la spécialité de papa, juger les gens sans même les connaître, et maman qui le suit. Ils se sont bien trouvés pour ça.
- Ils m'a raconté une histoire de poupée, je n'ai pas tout compris.
- Ah oui, c'était une sorte de complot, Fabien n'était le seul dans le coup, dis-je en riant. Stéphy et Thérèse l'étaient aussi.
- Thérèse ? Qui est-ce ? Ta copine ? Demande-t-elle curieuse.
- Non, ce n'est qu'une amie pour moi, mais c'est la meilleure amie de Fabien et aussi une ancienne employée de Teddy. Elle sera là aussi ce soir, elle ne devrait pas tarder d'ailleurs, du moins je pense. Mais elle a déménagé il y a quelques mois et comme elle est de passage, elle passe quelques jours ici. C'est grâce à elle que j'ai rencontré Fabien.
- Oh, donc vous vous connaissez depuis longtemps Fabien et toi ?
- Oui assez, ça doit faire six ou sept mois je crois. On a rapidement sympathisé. Quelque chose en lui me rappelle Mathieu. Et lui aussi a perdu un être cher, c'est ainsi qu'on s'est rapproché tous les deux.

Je suis dans mes pensées quand je vois mon amant revenir.

- Je reviens je vais au tabac, j'en ai pas pour longtemps. Il manque quelque chose pour ce soir ?
- Normalement non, ça devrait aller, dis-je en lui faisant un clin d'œil que lui seul peut voir.
- D'accord, je vais demander à Stéphy si elle a besoin de quelque chose, sourit-il.

Ma tante et moi le regardons aller à l'étage.

- Il semble plutôt gentil, serviable et souriant. Je peux te demander quelque chose ? 
- Hein ? Oui, évidemment.
- Je ne comprends pas pourquoi tu veux inviter tes parents pour un dîner, avec Fabien, alors que tes parents ne semblent pas vraiment l'apprécier. Et pourquoi m'avoir invitée le même soir ? Bien sûr ça ne me dérange pas de voir tes parents mais ce que je veux dire par là c'est que Stéphy va me présenter... Sa copine... Si j'ai bien compris ? Hors tes parents sont comme Charles, quand ils vont savoir que cette rencontre est au programme, ils risquent de mal digérer le repas. Donc tu m'expliques s'il te plaît ?

Évidemment, ma tante est une vraie fouineuse, j'aurai dû savoir qu'elle allait analyser la situation telle une détective. À ce niveau là, autant être franc. J'allais ouvrir la bouche quand mon chéri redescend les escaliers.

- Bon j'y vais, à toute !
- Attends ! Le coupé-je. Tu peux venir avant s'il te plaît ? Ce ne sera pas long.

Sans vraiment comprendre il se dirige vers nous et reste debout près de nous.

- Vois-tu, ma chère tantine se pose une question...

Je lui explique rapidement le raisonnement de ma tante et la confusion commence à se lire sur son visage, suivi de la panique. Je me lève et vais près de lui, puis regarde ma tante.

- Fabien n'est pas seulement mon colocataire. Si Stéphy m'a parlé de son homosexualité, c'est parce qu'elle a été la première à découvrir la mienne. J'étais d'ailleurs le seul de la famille à savoir pour elle. Un peu comme un secret qu'on partageait. Elle attendait de rencontrer la bonne personne pour vous en parler à toi et tonton. Aujourd'hui que vous savez pour son orientation sexuelle, elle a envie de rendre les choses officielles. Et son courage m'a inspiré, alors je vais également parler de mon homosexualité à mes parents et on s'est dit que le faire le même soir nous donnerai mutuellement du courage. J'espère que tu ne m'en veux pas de te l'avoir caché tantine.

Pendant mon discours, je pouvais voir ma tante verser quelques larmes. De chagrin ? De déception ? Timidement Fabien s'est également rapproché de moi sans que je ne m'en rende vraiment compte, sa main près de la mienne me rappelle tout à coup que je ne suis pas seul, qu'il est là, avec moi. Mon regard se dirige vers le sien, et un léger sourire se dessine sur ses lèvres, un sourire qui se veut réconfortant.

- Oh Mélian...

Je reporte mon attention vers ma tante désormais debout, craignant sa réaction, je n'ose bouger, mais elle se rapproche de moi, et me prend dans ses bras. 

- Je comprends mieux ta ferveur lors de notre appel. Tu ne parlais pas seulement de Stéphy, tu parlais également de toi.

Elle s'écarte légèrement de moi et me regarde tendrement, avant de regarder Fabien. Ce dernier ne sachant pas vraiment quoi dire, se contente de lui adresser un sourire sincère.

- Mais tu es sûr de vouloir l'annoncer à tes parents ? Tu sais qu'ils risquent de réagir de la même façon que Charles ?

- Oui, si ce n'est pire, mais ma décision est prise, je ne veux plus être une autre personne devant eux. S'ils ne m'acceptent pas tel que je suis réellement, je ne veux pas qu'ils acceptent une fausse version de moi. Puis je ne suis pas seul, Fabien sera avec moi, dis-je en regardant le principal intéressé et lui prenant la main, Teddy aussi sera là, et même si on ne partage pas les mêmes émotions, je sais qu'il me soutiendra.

- Ton frère aussi est au courant ?

- Oui, depuis plusieurs années déjà.

- Je suis désolé de vous interrompre, mais je vais devoir vous laisser, intervient mon amant.

- Oui, prends plusieurs paquets, si toi aussi tu fumes un seul paquet risque de ne pas suffire.

- Oui, c'était prévu, rit-il nerveusement. À de suite, dit-il avant de s'en aller.

- Bon je vais aller voir Stéphy et lui monter ses affaires, encore merci de prendre soin d'elle pour l'instant, je sais qu'elle est entre de bonnes mains avec toi.

- Merci tantine, par contre elle est avec sa copine, je préfère te prévenir.

Elle me remercie, récupère le sac avec les affaires de Stéphy et se dirige vers l'étage. De mon côté je vérifie une dernière fois que tout soit prêt pour la soirée. Peu de temps après, Fabien revient, accompagné de Thérèse, ils se sont certainement croisés en revenant, suivis quelques minutes plus tard par Teddy.

Pour bien entamer cette fin d'après-midi, nous allons tous les quatre dans le jardin nous griller une clope. Cette soirée mets visiblement une angoisse à tout le monde. Mais au moins ma tante est au courant de la situation, je pense également pouvoir compter sur son soutient. Malgré le stress présent dans l'atmosphère, je peux sentir une certaine quiétude, probablement grâce à la présence des êtres chers présents autour de moi. Je suis vraiment heureux de les avoir à mes côtés. Puis le moment fatidique se fait entendre par la sonnette d'entrée. Alors que je me dirige vers la porte pour ouvrir à mes parents, mon chéri m'attrape la main par derrière, m'attire vers lui et m'embrasse passionnément en me prenant dans ses bras.

- On est tous avec toi, quoi qu'il puisse se passer durant ce repas, rappelle toi que tu n'es pas seul.

Je lui fais un léger signe de la tête, puis me dirige de nouveau vers la porte, croisant le regard attendrissant de ma tante et de ma cousine à sa suite, puis ouvre la porte à mes parents.

- Maman, papa...




Au regoubillonnement des chambriersOù les histoires vivent. Découvrez maintenant