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Je vois les filles s'installer et se ruer sur leur téléphone, connaissant mes parents, le fait qu'elles viennent ainsi, pour ne pas être avec nous ne va pas leur plaire.

- Les filles, vous ne pouvez pas ranger vos téléphones cinq minutes ?
- Désolée cousin mais on est à fond dans un jeu l'une contre l'autre et on capte très mal en haut.
- Eh bien allez dans le jardin dans ce cas.
- Ah non avec le soleil on ne va rien voir sur nos écrans, dit Thérèse.
- Oui, puis on gêne personne on ne fait pas de bruit, continue Stéphania.

D'où je suis j'arrive à voir que Thérèse fait semblant de pianoter sur son téléphone de plus son regard reste sur un seul point de son écran, ce qui n'est pas idéal pour jouer selon moi.

Je les laisse donc ainsi, en espérant que les parents ne feront pas de scène pour ça.

- Stéphania ? Il faisait quoi le... Enfin... Le colocataire de Mélian là haut ? Tu as bien un verrou à ta porte hein ? S'inquiète ma mère.
- Je sais pas et oui j'en ai un, je crois. Dit elle sans quitter son écran des yeux.

Je remarque que le pianotement de Stephy est différent de celui de Thérèse. Et les yeux de ma cousine bougent davantage sur son l'écran.

- Maman, cesse de stresser autant, il n'est pas dangereux.
- Tu ne peux pas nier qu'on ne peut pas faire confiance à ces personnes, de plus c'est normal que nous nous inquiétons tellement ta mère et moi, et tu ne peux pas nous l'interdire.

Et dire que Stéphania entend également ces propos. Apparemment mes parents ne savent pas pour son homosexualité. Dans un sens c'est mieux, mais là, je me sens mal pour elle.

- C'est quoi ces bruits ? Demande ma mère.

Elle a l'ouïe fine, mais effectivement un bruit de grincement de caoutchouc parvient jusqu'à nous. S'en suit des gémissements puis des râles venant de Fabien. Ils semblent vrais mais après nos câlins je sais que c'est faux.

- Ah non ! Ne me dis pas qu'en plus il fait ça ici ! S'offusque ma mère.
- Il a le droit, moi aussi des fois je me fais plaisir. Dis-je naturellement pour essayer de le défendre.

Teddy et les filles gardent le silence, puis les bruits cessent. Enfin. Mais désormais j'entends des bruits de pas. Non Fabien, ce n'est pas le moment de descendre, pensé-je.

Je vois soudain Teddy cacher légèrement son visage dans sa main. Je regarde alors les escaliers et vois... Une poupée gonflable ? Tenue par Fabien, vêtu uniquement d'un caleçon. Je jette un coup d'œil à mes parents, leurs yeux semblent vouloir quitter leurs orbites.

- Oh bonjour. Excusez-moi j'ignorais qu'on avait des invités.

Il regarde alors tout le monde et regarde ensuite vers quoi tous les regards sont tournés. Sa poupée.

- Oh oui, ne faites pas attention à nous, on ne fait que passer. Je vais lui donner un bain, je sais pas ce qu'elle a aujourd'hui, j'ai l'impression de la gonfler...

Il se dirige ensuite vers la salle de bain, comme si de rien n'était. Chéri, tu me tueras un jour... La porte de la salle de bain se ferme et nous entendons également le verrou.

- Han ! Quel malotru ! S'horrifie ma mère. Tu ne vas pas me dire que ce genre de comportement est naturel ?
- Eh bien... Il a le droit d'avoir de la compagnie. Puis Ted en vend bien dans sa boutique n'est-ce pas ?
- Tout à fait, c'est même moi qui la lui ai conseillée ce modèle. Dit calmement mon jumeau.

Je viens de réaliser que les filles n'ont pas réagis, elles devaient être au courant je pense. En y repensant je n'ai pas vraiment fait attention à elles.

- Mais c'est une honte d'agir de la sorte ! Où a-t-il été éduqué ? Il n'a donc aucun respect ?

Le verrou de la salle de bain nous alerte et j'entends la porte s'ouvrir. Quelques instants plus tard mon amant revient, dans la même tenue, sa poupée quelque peu dégonflée.

- Finalement pas de bain, elle est timide et n'aime pas savoir qu'on risque de l'entendre, ça a tendance à lui faire perdre son souffle, puis je crois qu'elle est crevée. Dit-il très naturellement.

À ses mots j'avale ma salive de travers et m'étouffe légèrement. Je ne peux m'empêcher d'être mort de rire dans ma tête mais je fais mon maximum pour le dissimuler à mes parents.

Teddy lui, étant légèrement en retrait ne se cache pas pour rigoler en se retenant d'émettre le moindre son.

Mes parents quant à eux sont plus mortifiés que jamais. Ce qui est assez comique à voir.

Les filles, elles, sont toujours sur leur téléphone, un rictus au coin des lèvres, soit elles sont vraiment à fond dans leur jeu, soit elles sont dans le coup.

- Bon, nous ne vous dérangeons pas plus longtemps. À très bientôt.

Et le voilà reparti, j'essaie de reprendre mon air sérieux, naturel, ce qui est loin d'être évident.

- Tu dois lui dire de partir c'est pas possible de vivre ainsi. Dit mon père.
- Oui chéri tu ne dois pas rester avec cet énergumène sous ton toit, ce n'est pas sain.
- Mais enfin il ne fait rien de mal.
- Au contraire ils se font du bien j'ai l'impression, enchaine mon frère un sourire aux lèvres.
- En tout cas, là c'est trop pour moi. Viens chérie on s'en va.

Mon père se lève en prenant la main de ma mère.

- Bah vous ne prenez pas un bout de tarte ?
- Non, dit ma mère, puis si elle est aussi cuite que l'autre fois ce n'est pas la peine. Au revoir.

Je me lève pour les raccompagner à la porte mais ils sont déjà dehors, la porte d'entrée déjà fermée.

Je baisse ma tête puis Teddy vient me prendre dans ses bras. Ça fait des années qu'on n'avait plus eu de tels moments d'affection, ça fait du bien.

Les filles aussi sont près de nous. Gênées.

- Je ne comprends pas... Je cuisine si mal que ça ?

Tout le monde se met à rire. Et je remarque que Fabien nous a également rejoint.

- Et toi hein ? Tu ne me dis rien ? Tu ne me dis même pas que je cuisine mal !

- Chacun ses défauts chéri, ma poupée a parfois des coups de mou et toi tes desserts sont trop durs...

Nous rigolons de plus belle et naturellement je me rapproche de mon homme pour l'embrasser passionnément.

- Faudra tout de même qu'on discute de cette fille entre nous... Dis-je sérieusement.
- Je te la prêterai si tu veux.
- D'accord. Rigolé-je. Et vous alors les filles ? Ce jeu ?
- Eh bien, c'était des vidéos ? Dit timidement ma cousine.
- Sérieux ? Des parents ? Demandé-je joyeux.
- De vos parents et de vous deux. Dit-elle.
- Venez on regarde.

Nous faisons les manipulations pour avoir l'écran du téléphone sur la télé puis nous installons. Teddy, Stephy et moi sur le canapé et mon chéri assis sur mes cuisses.

Thérèse allait se mettre sur le fauteuil un peu plus loin mais mon frère l'invite à s'asseoir sur ses cuisses. Elle hésite quelques instants puis s'installe finalement sur lui.

- Par contre vous n'aviez pas dit que vous nous aviez filmé tous les quatre ? Demande mon jumeau.
- Si mais tu es sur le téléphone de Thérèse, on regardera tout à l'heure, répond ma cousine.
- Oh OK...

La vidéo commence et ce que nous voyons est assez comique, même si dans le fond c'est assez tragique de voir que mes parents prendront vraiment mal le fait que je suis gay. Mais je n'ai pas le choix, je vais devoir leur annoncer, tôt ou tard.

Au regoubillonnement des chambriersOù les histoires vivent. Découvrez maintenant