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Trois ans plus tard.

Je m'assois sur le canapé en cuir du studio avec ma guitare, mes carnets et un stylo tandis que Clifford va se rouler en boule dans un coin de la pièce. Je promène mes doigts sur les cordes de la guitare, joue quelques notes au hasard. Je les écris dans mon carnet déjà à moitié rempli. Mes yeux se posent sur l'autre carnet posé sur la petite table devant moi. Je mets ma guitare de côté et le prends. Je l'ouvre en plein milieu et feuillette ses pages. Elles sont cornées, certaines sont un peu déchirées et elles ont jaunies, bien qu'il ne date que d'il y a quatre ou cinq ans. Les mots qui les parcourent me paraissent si lointain, pourtant je peux encore sentir l'authenticité des paroles dans mon cœur. J'aurais aimé ne pas l'avoir aujourd'hui. Il devrait être avec elle. Il devrait être entre ses mains, pendant qu'elle le lit sur le canapé, ses lunettes qu'elle déteste mettre sur le nez. Mais le fait est qu'il m'est revenu. Harry l'a trouvé parmi les affaires qu'elle a laissé dans son appartement après avoir déménagé. J'imagine qu'elle ne pensait pas qu'il était assez important pour l'emporter avec elle, alors Harry me l'a rendu. Ça m'a brisé le cœur, si tant est qu'il puisse se briser encore plus.

Mais je ne suis pas venu ici pour remuer le passé. Je suis venu ici pour écrire. Alors je referme mon ancien carnet, prends le nouveau et l'ouvre sur une nouvelle page. Il faut que j'arrête de me tourmenter. Je ne peux pas laisser tout ça briser mon cœur encore plus. C'est du passé. Des paroles me viennent à l'esprit, alors je les écris.

When you love someone and they let you go.

J'ai beau essayé de m'échapper, son souvenir me hante toujours. Je ne peux m'empêcher de revenir à elle. Chaque parole que je parviens à écrire se rapporte à elle. Chaque moment de ma vie me rapporte à elle. J'ai beau essayé, son souvenir reste tatoué sur ma peau, comme un rappel constant de notre amour. Même trois ans plus tard, rien n'y fait. Elle me manque. Tous les jours, je me maudis d'avoir été aussi con. C'est de ma faute si depuis trois ans, je me sens aussi vide et incomplet.

Après notre rupture, j'ai comme cessé d'exister. J'ai arrêté de sourire, de rire. Je paraissais normal devant la caméra, parce que c'est ce que j'étais censé faire. Tout n'était que comédie. Les gars et moi avons sorti notre album, puis on a annoncé notre break et je me suis renfermé dans mon esprit en désordre total. Pendant des semaines et des mois, je me rejouais la scène qu'il s'était passé. Je me demandais comment j'avais pu laisser ça arriver. Quand je l'ai vu passé le portail, les cheveux et les habits trempés, je suis devenu fou. Je suis retourné à la villa et c'est quand j'ai vu sa canette d'Ice Tea sur la table, qu'elle n'avait même pas touché, que j'ai réalisé. Elle était partie. Et elle ne reviendrait pas. Je lui avais fait trop de mal et elle ne pouvait plus supporter mes conneries plus longtemps. J'ai explosé. J'étais fou de rage, contre tout et n'importe quoi. J'étais en colère contre le management, contre Simon, contre Diana, contre l'Univers entier, et contre moi. Parce que j'avais beau essayé de rejeter la faute sur tout le monde, je savais très bien que c'était de ma faute. Que j'étais celui qui avait causé ça. J'ai craqué. J'ai complètement craqué et je me suis saisi de cette putain de canette pour la balancer contre le mur. Elle a explosé mais je ne m'en suis même pas rendu compte, j'ai juste attrapé les coussins du canapé et je les ai balancé eux aussi. Une lampe a volé puis j'ai monté les escaliers en courant et je me suis retrouvé dans ma chambre. Là j'ai fait la même chose. J'ai tout saccagé. J'ai arraché mes rideaux du mur et j'ai retourné toute mon armoire. On n'était quasiment jamais à la villa. Pourtant un bon nombre de ses affaires étaient là, soigneusement rangées avant que j'en fasse un bordel. Il y avait des jeans et des pulls, et ce t-shirt bien particulier. Ce t-shirt si doux qu'elle aimait tant. Elle s'était plainte de l'avoir perdu, et je le tenais dans mes mains. Le canard, que j'avais d'abord pris pour un poussin, semblait m'accuser. Le gros « Duck You » écrit en lettres noires semblait me viser. J'ai porté le t-shirt à mon nez et j'ai humé le parfum qui en émanait. Son parfum fruité que j'aimais tant. Que j'aime tant.

Always YouOù les histoires vivent. Découvrez maintenant