Chapitre 1

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Après la révélation à toute la population de l'ile de Paradis de leur condition de reclus du reste de l'humanité, considérés par le reste de leurs semblables par des démons, les choses ont beaucoup changées pour les Eldiens de l'ile.

Certains n'ont pas supporté le vérité et en ont perdu la tête.

Pour d'autres, ce fut une délivrance. Ils n'étaient plus seuls ! Ils avaient une chance de voir un jour l'extérieur de ces murs. Mais pour cela, tout leurs espoirs reposaient sur le bataillon d'exploration.

Bien loin d'imaginer toute la complexité de la tache, les civils tentaient de se réadapter comme ils pouvaient.

Shingashina commença  à être reconstruite et les anciens habitants purent revenir chez eux. La nourriture se fit plus abondante à mesure que les terres à l'extérieur des murs étaient cultivées.

L'école fut aussi réformée. La totalité du contenu des manuels d'histoires était un tissu de mensonges. Des livres datant d'avant l'exil du roi Karl Fritz a l'intérieur des murs refirent surface.

C'est dans ce cadre que de nouvelles bibliothèques virent le jour, engageant des civils volontaires pour s'occuper des nouveaux ouvrages.

Louise était l'une de ces bénévoles. Elle avait travaillé toute la journée dans le grand bâtiment à l'ambiance feutrée et solennelle, à récupérer les livres anciens qui re-apparaissaient mystérieusement dans les greniers ou les caves des habitants.

De là, elle les répertoriait et les classait. Des fois, elle ne pouvait s'empêcher des les feuilleter avant. Les belles pages anciennes, les écritures serrées et délicates, les images à couper le souffle, elle voulait plonger toute entière dans ce monde.

Elle se leva de sa chaise et s'étira. son dos était douloureux et ses jambes pleines de fourmis. Elle secoua un peu sa jupe longue en toile et noua à nouveau ses cheveux sur sa nuque avant de se remettre au travail.

La bibliothèque était vide à cette heure-ci, et tout les autres volontaires étaient partis depuis longtemps. Mais Louise aimait y rester lire, prétendant faire des heures supplémentaires.

Malgré le terme de "bénévoles", des appartements situés au dessus du bâtiment étaient mis à disposition pour ceux qui travaillaient ici et qui n'avaient nulle part où aller.

De plus, la nouvelle reine, d'une grande générosité avec ses sujets, avait mis en place un système de soupe populaire, avec de la nourriture fraichement cultivée dans le monde extérieur et Louise pouvait témoigner de la bonne qualité de ces repas.

Plongée dans un ancien livre de contes pour enfants, la jeune fille entendit les grands battants de la porte en bois de la bibliothèque s'ouvrir. L'heure de la fermeture était normalement déjà passée mais comme elle était là, elle n'allait pas mettre à la porte le visiteur.

Un garçon, plutôt petit mais qui semblait avoir son age, S'approcha d'elle. Il portait un livre avec précaution dans ses bras. Ses cheveux blonds coupés au dessus des oreilles cachèrent un peu ses yeux bleus quand il s'inclina légèrement devant elle.

Un peu gênée, elle lui souhaita la bienvenue et lui demanda en quoi elle pouvait l'aider.

Il lui dit qu'il venait pour offrir a la bibliothèque le livre de son grand père. Ce livre, disait-il, contenait des descriptions détaillées du monde extérieur.

Sa voix était douce quand il lui expliqua que son rêve était d'aller voir ces paysages et que, maintenant que c'était fait, il voulait que d'autres enfants et adultes puissent à leur tour rêver des ces magnifiques paysages.

Elle trouva ce geste admirable et le félicita d'être si gentil malgré le fait que se séparer de son livre semblait très dur pour lui.

Il rougit un peu et balbutia que ce n'était vraiment qu'une maigre contribution. Il lui remit alors délicatement l'ouvrage, que Louise ouvrit avec douceur pour vérifier l'état des pages et de la reliure avant de le mettre en rayon.

Le bon état du livre l'impressionna, étant donné l'age de ce dernier. Elle resta bouche bée devant l'image d'une immense étendue d'eau qui semblait ne pas voir de fin et se promit de le lire une fois que son travail serait terminé. Elle consigna méthodiquement dans le registre le nom du livre et de l'auteur, lui attribua un numéro.

Une fois cela fini, elle se leva et contourna son bureau pour aller mettre le livre en rayon.

Le jeune garçon semblait hésiter.

"- Voulez vous venir m'aider à le ranger Monsieur ?"

Ses yeux s'illuminèrent et il acquiesça en s'approchant d'elle.De près, il était en vérité plus grand que Louise et n'était pas si petit que ça au final. Elle reconsidéra son age.

"Armin, dit-il."

"-Pardon ?"

"- Appelez moi Armin, lui dit le garçon avec un sourire qui fit fondre la jeune fille"

"- D'accord... Armin! Suivez moi je vous prie !"

Il la suivit alors entre les rayons sombres jusqu'à celui qui portait la bonne lettre.La lumière de la lune naissante et du coucher de soleil passait au travers du vitrail au plafond et jetait de jolies couleurs partout. Néanmoins ce n'était pas assez pour voir clairement et Louise se mit à allumer les nombreuses bougies disposées çà et là.

Armin se précipita pour l'aider, et, bien vite, l'endroit fut aussi éclairé qu'en plein jour.

Le jeune homme lui demanda si la bibliothèque possédait des lanternes en cristal de titan, qui étaient très populaires en ce moment pour dispenser de la lumière. Mais son interlocutrice lui répondit que cette matière coutait cher et qu'il valait mieux la réserver aux habitations.

Il acquiesça, forcé de reconnaitre que sa popularité rendait cette ressource rare et donc chère.

Louise désigna une étagère vide et, indiquant le livre, demanda à son ancien propriétaire s'il ne voulait pas avoir l'honneur de le ranger lui même dans la bibliothèque.

Ému, il le rangea délicatement et contenu à grand peine ses larmes. Une roula tout de même sur sa joue. Voyant sa détresse, Louise lui proposa de l'accompagner boire un verre dehors une fois son service terminé.

Il avait l'air si secoué qu'elle ne voulait pas le laisser seul en un moment pareil.

Il essuya ses joues d'un revers de main et accepta avec gratitude. Ils éteignirent les chandelles et, dans la semi pénombre, Louise alla chercher son châle, sa bourse et ils sortirent de la bibliothèque, avant de fermer à clé derrière eux.

A la lumière chaude de la ville et au bruit joyeux des passants, elle sentit que l'humeur du garçon s'améliorait déjà et elle sourit doucement.

Nous verrons la mer ensemble {Armin}Où les histoires vivent. Découvrez maintenant