Vers un nouvel ordre

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Mes paupières collent à mes yeux et je n'arrive pas à les ouvrir. Les larmes séchées aux coins de mes cils ont formé un vrai verrou. Je bouge autant que possible mais mon corps est faible, si faible...

« Tiens, tu as fini par te réveiller... »

Je ne reconnais pas la voix... Pas encore, car je sais que je la connais. J'arrive à emmètre une sorte de râle. Puis, je force sur mes paupières, et le verrou cède. Eblouie, je tourne les yeux tout autour de moi mais pour l'instant, je ne vois qu'un plafond flou.

« Reste calme, tu as beaucoup dormi. »

Ça y est, ça me revient ! Comment ai-je pu ne pas y penser de suite. Scod.

Je me redresse lentement, mon flanc me tire mais je m'en sors bien. Je soulève mes mains et je les fais frotter mes yeux. Rapidement, mes larmes mouillent mes paupières et j'arrive à mieux les ouvrir. Peu à peu, je relève la tête et après quelques clignements mollassons, je reconnais la silhouette de Scod, assis sur un tabouret en bois, penché près de moi. Je vois aux mouvements légers de ses yeux qu'il guette une maladresse de ma part. J'inspire autant que possible, et je tente de parler.

« Salut... Tu vas bien ? »

Scod éclate de rire. J'entends bien à nouveau, je crois. Après s'être calmé, il arrive à me répondre.

« Tu m'as volé ma question... »

Je ris. Ça fait mal. Je me crispe et je porte ma main sur mon flanc. Quand la douleur se calme, un simple sourire se dessine sur mon visage.

« Scod, où est Alek ? il va bien ? »

Mon ami ne me répond pas. Il fait un mouvement calme du menton vers l'autre coin de la pièce. Je regarde alors dans cette direction, et j'y vois mon frère. Il est sur une chaise, dormant sur son coude. Je ne vois pas bien son visage, mais je discerne des profondes marques sous ses yeux.

« Tu es dans ce lit depuis quatre jours, me dit Scod en chuchotant. Tu t'es souvent réveillée mais on t'a... forcé à dormir. Tu étais fiévreuse... Désolé. »

Je tente de faire une expression signifiant « peu importe », mais je ne sais pas si le message est clair. Néanmoins, Scod reprend.

« Alek est là depuis le début. Je suis arrivé il y a pas longtemps, quand il tombait de fatigue. Tu sais, des fois j'ai l'impression que c'est lui qui veille sur toi. »

Je tourne les yeux vers mon frère. Il va bien, c'est tout ce qui compte. Une question me traverse l'esprit.

« Scod... Je ne suis pas en prison. Ça veut dire que la Milice a toujours le contrôle ?

— Oui, les choses se déroulent plus calmement qu'on pensait. Je te raconterais quand tu seras capable de sortir.

— D'ailleurs, on est où ?

— Chez Junn. Il t'a laissé sa chambre, il n'en a pas besoin en ce moment. Ses nuits sont courtes... »

Soudainement, la joue d'Alek glisse de sa paume, et par reflexe, il se réveille. Pataud, il regarde vers moi. En un bref regard, et un léger sourire, je sais à quoi je ressemble. Et lui aussi.

***

Je replie la lettre de Rodric. Il écrit bien mieux que je ne l'aurais imaginé. J'ai aussi l'impression que ma lecture devient meilleure. Mais il y a encore plein de mots que je ne connais pas. Selon Rodric, la situation est calme au poste. Les autres ne sont pas forcément d'accord avec la liaison à la Milice, mais les arguments ont joué en sa faveur. En quelques jours, la criminalité a été réduite de moitié et nous avons de nouveaux équipements en cadeau. Pourtant, Scod m'avait assuré que les Miliciens ne roulaient pas sur l'or. Les délits en moins sont simplement la conséquence de la perte de pouvoirs de l'Ovrrul à cause de notre mainmise sur le port et les contrebandiers.

Nevland - cycle des aciers [réécriture en cours]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant