Chapitre 3

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Je suis assise sur une table d'auscultation et regarde devant moi la petite lumière que le médecin m'envoie dans les yeux.

- Vous avez des vertiges ?

- Non.

- Vous avez pris de la drogue.

Je m'offusque une main sur la poitrine.

- Non, mais vous me prenez pour une junky ? Allez vous faire foutre !

Le doc se tourne vers Ethan, qui lui fait signe de continuer et de ne pas prêter attention à ma façon de l'injurier.

- Les résultats de l'IRM sont bons, vous avez eu un choc émotionnel récent ?

- Non, que, dalle. À part, Antoine qui m'a fait dormir chez lui et qui me prend pour sa nana ! Je ne vois pas ce qui pourrait être choquant ! Vous ne pourriez pas lui poser la même question par hasard ?

Le docteur se tourne vers Antoine pour lui faire signe qu'il veut lui parler en tête à tête et finalement, ils me laissent seul dans la salle de consultation.

Merde Ethan ! Je sens que ça va me rester un bon moment cette histoire...

Je respire profondément et attends sagement, assise, mais d'un coup une lumière se matérialise devant moi et un homme apparait, je recule et manque de tomber à la renverse de mon brancard.

- Putain, t'es qui toi ?

- Salut, Victoire, je suis ton ange gardien...

À force de me pincer, je vais finir par me faire une quantité de bleus louches sur le bras.

Oui, tiens ! Comme une... junky !

- Hein ?

- Je m'appelle Orlando.

Orlando, non, mais trop drôle comme prénom, c'est d'un autre temps. Ça sent la fièvre du samedi soir et John Travolta en pantalon à paillettes moule bite.

Je le regarde et ne peux m'empêcher de rire dans ma barbe. Il n'a pas l'air de le prendre avec autant de jovialité...

- Bon ça va, mon créateur était fan de Dalida.

- Ton créateur ?

- Oui, plus tard. On n'a pas le temps. Il y a un truc qui a merdé, et l'on doit rattraper les choses comme on peut. Je suis là pour t'aider et par la même occasion faire oublier à mes supérieurs l'erreur que j'ai commise.

Je fronce mes sourcils, l'air sceptique.

- Alors tu me dis que tu es mon ange gardien et qu'il s'est passé un truc de travers ?

- C'est exact, en résumé, j'avais ordre de te donner une autre vie, c'est un peu long à expliquer, mais nous avons plusieurs vies en parallèle qui se passent dans le même temps, mais pas le même espace. Là-haut, nous pouvons décider de changer les choses en cours de route, pour voir comment les âmes réagissent dans des environnements différents. Toi, tu devais quitter la vie que tu avais avec Patrice pour vivre un moment celle que tu as avec Ethan. Généralement, tout se déroule bien, la personne arrive dans sa nouvelle peau en ayant oublié l'ancienne tout en ayant appris le passé de la nouvelle. Ce n'est peut-être pas très clair ?

Heu attends, pas très clair ? Comment dire...

- Laisse-moi deviner, c'est là que tu as merdé ?

Il triture ses doigts nerveusement.

Ho, j'ai tout compris en fait ! Yeah ! Trop forte la Victoire !

- Oui, j'ai juste oublié d'échanger les mémoires... Une broutille qui risque de me couter cher si tu ne fais pas ce que je te dis...

Je le regarde niaisement.

- Et tu penses sérieusement que je vais croire un truc pareil ?

- Il le faut, c'est la vérité. Je ne mens jamais !

- Pfff, figure-toi que cette blague commence à devenir beaucoup trop lourde pour moi.

- Mouais, alors comment expliques-tu le fait qu'il n'y a que toi qui arrives à me voir ?

- Ben je n'en sais rien, on est seul en ce moment. C'est peut-être à cause de ça ?

- Comment ai-je apparu devant tes yeux ?

- Tu es David Copperfield... Un mentaliste ? Ha oui, un hypnotiseur qui m'a fait un truc chelou pour que l'esthéticienne me fasse le maillot cette nuit ?

- Foutaise !

- Ha, ben non, tu es juste le descendant d'un clown de cirque qui a le vocabulaire de mon arrière-grand-père !

Je me lève et le toise.

- J'en ai ma claque de ces conneries. Je dois aller bosser !

- Chut, ils reviennent, il faut arrêter de converser en revanche, tu vas répéter exactement ce que je vais te dire. Je connais le passé de ton toi d'ici.

La porte s'ouvre au moment où je souffle de désespoir.

- Madame Verdier.

Je parle d'un coup, en me frappant le front.

- Oui c'est ça Verdier ! Ethan Verdier ! Mais quelle conne !

Orlando me fait les gros yeux.

- Ben, quoi ? Qu'est-ce que tu as le clown ?

Le médecin imagine facilement que je suis en train de l'insulter une nouvelle fois.

- Madame, je pense que vous avez besoin de repos, vous souvenez-vous de certains événements depuis ce matin ?

Alors qu'Orlando se place juste à côté de moi, il est évident que personne ne le voit, ou que le Doc et Ethan font exprès de ne pas le voir. Mon ange gardien finit par annoncer :

- OK, tu vas leur dire que tu as eu une sorte d'amnésie passagère, mais que tout va bien maintenant. Un soudain stress qui s'explique par la prise de nouveaux antidépresseurs. Fais bien, ce que je te dis sinon tu risques de partir en asile de fou et moi direct en enfer...

Je me tourne vers lui, dépitée, voire même déprimée pour de bon, et tout ça sous les regards des autres qui se demandent bien ce que je fais.

Finalement...

- Bon, désolée, j'ai eu une sorte d'amnésie, car j'ai pris de nouveaux antidépresseurs hier soir, sans doute un peu trop.

- Ha, c'est intéressant, vous vous souvenez de choses en particulier maintenant ? La date de votre mariage, par exemple ?

Mais qu'est ce qu'ils ont tous avec cette foutue date de mariage ?

Je me tourne de nouveau vers Orlando les bras croisés.

- Tu dis : 23 août 2010.

- 23 août 2010...

Je viens de parler sans conviction devant ma réponse, Ethan semble soulagé, tiens je ne me suis pas trompée, il enchaine :

- Bien c'est ça qu'est ce que nous avons mangé hier soir ?

Encore une fois, j'attends la réponse d'Orlando et la répète :

- Un magnifique filet de bœuf en croute que Sandra nous a préparé, avec des pommes de terre sautées et un fraisier.

- Bien, j'ai l'impression que la crise est passée docteur.

Le médecin se tourne vers son carnet tout en parlant :

- Bon, il est clair qu'il faudra arrêter ces antidépresseurs pour de bon, je vous en prescris d'autres.

- Hein ? Mais pourquoi faire ?

Orlando se penche vers mon oreille :

- Ton toi d'ici est accroc aux médocs.

Je lève les yeux au ciel et fais tomber mes bras.

- Sois discrète, tu vas finir par faire tout louper, tu es à deux doigts d'avoir une piqure de tranquillisants et moi à deux doigts de perdre mes ailes.

MB MORGANE - Mon double, son mec et moi ! [Terminé]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant