Chapitre 15

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Après le départ de Sandre, Dao resta encore un moment dans la chambre. Il se sentait épuisé. Il avait passé la matinée à s'angoisser et s'était mis tout seul dans un état impossible. Bon sang, il était prêt à se battre avec sa compagne et jeter leur relation par la fenêtre, juste parce qu'il s'était laissé happer par ses peurs. Heureusement qu'elle était arrivée et l'avait ramené dans la réalité. Une réalité pleine de menaces et de difficultés certes, mais où sa relation avec elle était quelque chose de concret et de rassurant. Il avait confiance en elle et son amour, c'était certainement la seule personne sur quoi il pouvait compter. Et pourtant il avait tellement peur de la perdre qu'il avait failli tout gâcher.

Sandre elle-même l'avait bien résumé : à trop passer de temps seul dans cette chambre, il allait devenir fou. Il avait déjà commencé à perdre pied. Sans s'en rendre compte, sa compagne l'avait rassuré de la plus belle des manières, mais il fallait absolument qu'il se prenne en main. Tout d'abord, qu'il sorte s'aérer un peu, bouger, découvrir, flâner. Un peu comme la voyageuse avait l'habitude de faire. Lui-même d'ailleurs appréciait également de faire ça chez lui, alors autant essayer ici. Ça lui ferait du bien. Il s'habilla rapidement et sorti de la chambre, pour tomber sur ses trois gardes. Il les avait presque oubliés et eut un petit moment de déception. Il avait vraiment envie de se balader tout seul, aussi leur demanda-t-il gentiment de rester un peu en retrait et de se faire discret.

Il prit une grande respiration et se lança dans une promenade. Il explora un moment le palais puis osa sortir dans la rue et visita un peu le quartier. Il ne s'éloigna pas trop, car Sandre lui avait expliqué que la ville était devenue plutôt dangereuse, hormis dans les quartiers riches où la sécurité était accrue, aussi resta-t-il dans ce qu'il réussit à identifier comme les quartiers riches. Il n'avait pas particulièrement peur pour sa propre sécurité, après tout il avait un solide entraînement et était absolument capable de se défendre tout seul, ou avec l'aide de son dieu si nécessaire. Mais il n'avait pas envie de créer des problèmes en étant inconscient. Il ne pensait pas risquer grand-chose, mais si des combats s'engageaient autour de lui, ses adversaires ou ses gardes pourraient être blessés ou pire, ce dont il n'avait absolument pas envie.

Aussi resta-t-il dans les beaux quartiers, qu'il détermina comme étant les rues où patrouillaient de nombreux miliciens. Il admira les bâtiments, les statues, les fontaines, les ponts, et découvrit même un très beau jardin qui réunissait tout cela, avec de nombreux bosquets fleuris à l'odeur entêtante et très agréable. Il s'installa, profita du soleil de fin de journée sur son visage, ferma les yeux et se perdit dans les sons et les odeurs. Le jardin était désert, les gardes étaient discrètement en retrait. Il respira profondément et savoura la solitude et la beauté de cet endroit nouveau.

Au bout d'environ deux minutes, il s'ennuyait. Il rouvrit les yeux et commença à regarder un peu nerveusement autour de lui, à la recherche de quelque chose vers quoi tourner son attention. Il observa un moment les gardes, installés dans des endroits différents, essayant de se fondre dans le décor et de ne pas regarder dans sa direction. Suivant ses ordres. Il finit par craquer et alla s'asseoir près de Rhya, la plus sociable de ses trois gardes, qui était un peu plus âgée que lui mais pas de beaucoup. Contrairement aux deux autres, elle n'était pas vraiment une issue d'une armée. D'après ce que Dao avait compris, en temps normal elle appartenait aux patrouilles qui sillonnaient le désert, en surface.

Elle n'était pas très imposante physiquement, mais elle remarquait tout et semblait penser à tout.

Elle était debout près d'un rosier très odorant, un regard rêveur perdu dans le lointain, feignant d'ignorer son protégé. Dao s'assit dans l'herbe tendre, pratiquement à ses pieds, et la scruta intensément d'un air joueur. Elle semblait ne pas avoir remarqué sa présence. Le jeune elfe savait pertinemment qu'elle surveillait tout ce qui se passait avec acuité, mais surtout il était impressionné de voir à quel point elle n'avait absolument pas l'air gênée par la situation. Lui-même, à sa place, transpirerait à grosses gouttes. Il finit par éclater de rire. Elle ne réagit toujours pas.

T3 - L'Incarnat (terminé)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant