Chapitre 2

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13 Mars 2004


Le printemps.

J'adore cette période. J'ai l'impression d'être bien plus vivante que le reste de l'année. C'est la saison du renouveau.

C'est un fait : la nature est bien faite et elle ne se réveille que lorsque le plus dur est passé, lorsqu'elle peut s'épanouir à sa guise.

Nous sommes faits sur le même modèle, car nous sommes, nous aussi, un fruit de cette nature. C'est comme si notre corps et notre esprit renaissaient, après un hiver passé en veille ou en économie d'énergie.

On efface le passé et on revient sur des bases saines.

Le soleil est encore timide, mais il réchauffe doucement la terre encore refroidie par l'hiver, qui a été particulièrement rigoureux cette année. Les oiseaux reviennent égayer la ville de leurs chants et les fleurs nous ravissent de leurs couleurs vives et de leurs merveilleuses senteurs.

Le printemps, c'est apaisant et j'aime cette sensation de sérénité.

Je lève le nez de mon carnet et je ferme les yeux, en respirant l'air à pleins poumons. D'ici cinq jours, j'aurai seize ans. Je pense que c'est un tournant important de ma vie. J'espère en tout cas que je vais vers des jours meilleurs.

Ce n'est pas que je sois spécialement malheureuse, mais disons que ces dernières semaines n'ont pas été très faciles. Depuis ma rupture avec mon ex-petit-ami, tout le monde semble m'avoir tourné le dos.

Pour être exacte, je ne trouve plus personne pour m'adresser la parole, excepté lorsqu'il s'agit de m'insulter. Scott et son frère ont bien fait les choses. Moi, qui les pensais complètement débiles.

D'accord, ils sont, en effet, stupides mais néanmoins assez malins pour faire le vide autour de moi, en empêchant les autres de me fréquenter ou de me parler. Le pire c'est que personne n'a l'air de se rendre compte d'être complètement manipulé par ces imbéciles.

Je suis devenue la bête noire du lycée et tout le monde semble prendre plaisir à essayer de me piétiner. Certains cherchent à m'humilier, d'autres se contentent de m'ignorer, mais tous me détestent. Même mes soi-disant amis m'ont fui. Il faut admettre que c'est plus facile de rejeter la marginale de l'école, plutôt que les deux stars du foot.

Je fais mine de ne pas entendre, de ne pas en être affectée et ça les fait d'ailleurs enrager de me voir si indifférente à tout ce qu'ils me font subir, mais en vérité, je souffre de cet isolement.

Être toujours toute seule, à longue, c'est épuisant. Je n'ai personne à qui me confier, personne vers qui me tourner lorsque cela ne va pas, plus aucun ami pour me soutenir.

Je n'ai plus que ma famille sur qui compter.

Finalement, ce n'est pas plus mal. C'est vrai, ce sont eux les plus importants même si je suis loin d'avoir la famille idéale. Mais qui peut se vanter d'en avoir une ? Personne que je connaisse et franchement je doute que la famille parfaite existe vraiment.

Alors, oui c'est vrai, ma mère est insupportable et même carrément méprisable, et mon père est un bourreau de travail qu'on ne voit que rarement, mais ce sont mes parents et je les aime, malgré ce que je prétends.

Le seul qui soit parfait à mes yeux, c'est Lucas, mon petit frère. Il a peut-être quelques difficultés à comprendre et à enregistrer les choses mais cela ne veut pas dire qu'il soit idiot, au contraire même.

Je pense que son vrai problème, c'est qu'il vit trop dans son monde. Il passe son temps à rêvasser. Je ne peux pas lui en vouloir, c'est très agréable d'avoir un endroit dans sa tête où l'on peut se réfugier quand bon nous semble mais Lucas le fait beaucoup trop souvent. J'ai l'impression qu'il préfère l'imaginaire au réel et il a tendance à se réfugier dans son monde dès qu'il le peut.

Remember MeOù les histoires vivent. Découvrez maintenant