Chapitre 20

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18 Mars 2004

– Alors ? me demande Deirdre en apparaissant soudain derrière moi.

Elle passe nonchalamment son bras sur mes épaules et me lance un regard avide et impatient. C'est comme si elle attendait que je lui dévoile un secret. Je fronce les sourcils cherchant ce que je peux bien avoir oublié de lui raconter avant de comprendre.

– Félicitations !

Elle me dévisage comme une bête curieuse et je comprends que j'ai fait fausse route. Comme d'habitude, je suis tombée à côté.

– Félicitations ? répète-t-elle.

– Duncan m'a dit pour ton... admission. Avec tout ce qui s'est passé hier, je n'ai pas eu le temps de te féliciter.

– Pas besoin de félicitations. Ils n'avaient pas d'autres choix que de nous prendre. On est les meilleures futures élèves que leur prestigieuse école aura de toute son existence.

Et modeste avec ça !

Je n'irai pas jusqu'à dire que je suis douée mais en ce qui concerne Deirdre, je dois admettre qu'elle a énormément de talent. Je suppose donc que Duncan lui a parlé de mon admission et certainement aussi de notre projet mais je ne résiste pas à l'envie de la taquiner.

– On ?

– Ouais « on ». Toi et moi, on va leur montrer ce que c'est que de véritables artistes. Attention New York, nous voilà ! s'écrit-elle en prenant une pose exagérée de top model.

Avec Sacha, nous avions appelé cette posture « le genre pétasse » et nous nous étions juré de ne jamais devenir une de ces filles qui se prenaient pour mieux que ce qu'elles étaient en réalité. Mais Sacha a brisé cette promesse, comme tant d'autres d'ailleurs.

Deirdre me fait un clin d'œil et je lui souris en retour. Son enthousiasme est communicatif. Elle fait fondre mes dernières défenses et moi aussi je commence à trépigner d'impatience à l'idée de cette nouvelle aventure. Je vais enfin pouvoir faire ce qui me plaît vraiment. En plus, je serai entourée et soutenu par ma famille et même si mon père et Lucas vont me manquer, je sais que je me sentirai à ma place, pour la première fois de ma vie.

– Ils érigeront un autel en notre honneur.

– Carrément ?

– Non, tu as raison, pas un autel c'est ringard, mais au moins une plaque commémorative : « Ici ont étudiés Sarah Matthews et Deirdre McGowan, les plus grandes artistes de notre siècle. »

Cette fois, j'éclate de rire.

J'aime sa façon d'être, de ne pas se prendre au sérieux, d'être elle-même, libre et loin des clichés. C'est ce que j'aime en elle, son originalité et son cran, elle ose. J'aimerais vraiment être comme elle.

– C'est ça, moque-toi mais tu verras ce que je te dis, poursuit-elle. Bref, avec tout ça, tu n'as pas répondu à ma première question. Etait-ce un moyen habile de détourner la conversation ? Peut-être bien, mais je persiste. Donc permets-moi de me répéter : Alors ?

– Alors quoi ?

– Comment c'était ?

– Comment c'était quoi ?

Là, je sèche complètement. Je n'ai aucune idée de ce qu'elle veut savoir et de ce qu'elle attend comme réponse.

– La nuit que tu as passée avec mon frère, pardi.

– Comment tu... ?

J'ai sursauté.

D'une part parce que je n'arrive pas à croire qu'elle ait osé me poser cette question et d'un autre côté, je me demande comment elle sait que nous étions ensemble. Je vois mal Duncan lui en parler, même s'ils sont très proches.

Remember MeOù les histoires vivent. Découvrez maintenant