Appréhension...

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Il est là, devant moi, le frère de Naël, son supérieur.

Son bourreau.

— Tu connais mon nom, tu as dit celui de Naël. Je peux savoir t'es qui ?

Sa manière de parler désinvolte fait contraste à son regard menaçant. C'est compréhensible, je le connais des Lemoine, lui ne m'a jamais vu. Il n'était d'ailleurs pas censé être en prison ? 

Que dois-je faire ? Il n'a pas l'air d'être aussi patient que Naël et Sarah, si je feins de l'ignorer, la probabilité qu'il perde patience est élevée.

— Eileen. Eileen Lemoine.

Ses sourcils se froncent, après un instant de mûre réflexion, il soupire.

— Ne me dis pas qu'ils ont remis ça. dit-il, l'air blasé.

— Ça fait un petit moment maintenant, presque un mois que je suis officiellement une Lemoine.

— Et comment tu t'es retrouvée là-bas ?

— C'est... C'est privé.

— Je vois... Il est où Naël ? Tu vas le voir là ?

La notion de vie privée n'a pas l'air de lui être acquise, au fil de la conversation, ça devient gênant.

— Je vais voir Sarah. Naël doit être avec Tanguy.

Son visage redevient suspicieux. La boulette, il a compris que je sais tout de ce que fait Naël, sans crier garde, il me prend la main et me traîne à mon insu. 

Ce qui ne m'était pas arrivé depuis longtemps se réveille. Comme un monstre tapi dans l'ombre, attendant la pénombre pour se réveiller.

— Lâche-moi !! hurlé-je, mordant son poignet.

Ma tête tourne, je l'entends geindre au loin...

Oui sa voix est lointaine...

Je plonge dans un océan, des poissons s'approchent de moi, les dents pointues, leur corps grandissant, jusqu'à devenir de taille humaine. Ils le deviennent, prennent un visage familier.

Mon bourreau, à moi.

Je me recroqueville dans l'eau, la tête dans mes bras, j'implore Dieu, le Diable, Naël, ce que je peux... Rien ne sort, ma voix ne porte pas, je me noie, j'étouffe, je suffoque. C'est l'asphyxie.

Une silhouette apparaît, elle m'attrape alors que je continue ma descente dans les abysses de l'océan.

— Eileen ?! Ma belle ! C'est Sarah !

J'ouvre les yeux, ma tête me fait un mal de chien, elle s'est domiciliée dans le sol, le corps lourd, je me lève, assistée par quelqu'un.

— Sarah ? murmuré-je, en état de choc.

Je réalise enfin ce qui se passe, mon ange gardien est là, elle m'aide à m'asseoir sur le banc, on est toujours dans le parc. Je guette les alentours, sa silhouette est encore là, il m'observe de loin. Une fois qu'il s'est assuré que je vais bien, il s'approche, sinon il n'aurait jamais osé alors que Sarah est là.

— Désolé, je voulais pas te brusquer. dit-il, fixant mes yeux, le visage grave.

— C'est rien...

— Je voulais juste parler dans un endroit tranquille.

— Il y a pas énormément de gens qui viennent ici. Tu avais juste à faire gaffe aux alentours au lieu de faire ça. reproche Sarah, le regard noir.

Il lève ses yeux vers le ciel. Mauvaise idée.

Sarah se lève, lui met une claque, le prend par le bout de son sweat.

N'y pense plusOù les histoires vivent. Découvrez maintenant