Première dispute...

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— Pierre m'a suivie jusqu'au parc à côté de chez Sarah, il sait tout, qu'on est ensemble, que je suis une Lemoine, que tu m'as dit que tu étais dans l'organisation.

Cette phrase a résonné dans la tête de Naël, je le vois très clairement, ses envies de meurtres traversent la barrière du physique, elles atteignent mon âme.

— Calme-toi Naël, il ne m'a rien fait.

— Jure le moi Eileen.

— Je peux te le jurer...

Il me serre contre lui, il tremble de partout, je caresse ses cheveux.

— Je suis là...

Oui, je suis là... Pour toujours.

— Moi par contre, je serai peut-être là moins souvent.

Je lève la tête, le fixe droit dans les yeux.

— Pourquoi ?

Ma voix est plus agressive que je l'aurais voulu.

— Maintenant qu'il est là, on va être bien plus organisés, on va avoir plus de choses à faire. C'est sûr.

— Je veux t'accompagner.

— Non Eileen. N'y pense même pas.

La colère monte d'un cran.

— Alors je vais devoir t'attendre ? Comme les femmes dans les séries ou dans les livres ? Je vais devoir me ronger les os ? En me demandant si tu vas mourir ou non ? Si je vais mourir ou non ?

— Eileen, on va pas s'embrouiller encore sur ça. Tu sais que j'ai pas le choix. Et tu sais que je veux pas que tu me suives dans ça. Tu dois étudier pour pouvoir rentrer au lycée.

— Mais je m'en fiche du lycée ! Je veux être à tes côtés ! C'est trop demandé ?

— Je m'en fous de risquer ma vie. Mais regarde ce qui a failli arriver la dernière fois. Ils t'ont vue avec moi et ont voulu te...

L'image des gars en train de déchirer ma robe me revient en tête, ils me prenaient pour leur gibier, exactement comme Julian et Aiden. En voyant mon expression, Naël continue.

— Tu vois, tu as pas envie que ça...

— Va te faire foutre.

Je sors du lit, m'habille, prends mon portable et descend les escaliers. Il me suit, prend mon bras. Je me dégage de lui, il retente en forçant sa poigne.

— Eileen reste ici !

Comme une hystérique, je me démène pour qu'il me lâche. Après avoir réussi, j'accoure vers la porte d'entrée, avant de sortir.

Je descends les escaliers sans me retourner, mon âme est devenue la Colère elle-même. Une fois sortie de l'immeuble, je sors les écouteurs de la poche de mon pantalon, les mets dans mes oreilles.

Billie Eilish apaise-moi, une nouvelle fois. Mon téléphone sonne, une fois, deux fois, trois fois, puis un nombre incalculable. Je l'ignore, je me pose à un arrêt de car, sans savoir réellement où je vais ni jusqu'à quand. Je veux juste marcher, être en action, comme si l'arrêt allait me tuer, à l'instar du requin, toujours en mouvement.

Seule différence, je suis la proie, pas le prédateur.

Une trentaine de minutes plus tard, je sors du bus, en face de moi, une grande surface. Mon ventre crie famine, c'est le moment idéal pour dépenser de l'argent.

Il y a un hôtel et un parc pas loin, je pourrais vivre ma vie là tout compte fait.

Je rentre dans l'hypermarché, j'explore à peu près tout ce que je vois. Je finis par me retrouver dans l'agroalimentaire, qu'est-ce que je pourrais bien acheter ?

N'y pense plusOù les histoires vivent. Découvrez maintenant