10| Les étincelles

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HÉLIOS

Daphné est revenue à la maison.

En surface, tout semble revenu à la normale. Allison et Daphné s'aiment plus que jamais, s'embrassent partout et dansent dans le salon à deux heures du mat' en buvant du punch et moi, je sors avec mes amis et on révise pour préparer la rentrée tels des nerds appliqués et disciplinés. Je joue à la console comme un pied, je bois, je danse, je déconcentre Barbara à l'association et je considère désormais Axel comme un pote alors que je ne le connaissais pas il y a encore trois mois et que je ne sais toujours pas quelles études il fait, ni d'où il sort et s'il est bel et bien humain ou si de la vodka coule dans ses veines à la place du sang – et au vu sa descente en soirée, je ferais mieux d'avoir une réponse incessamment sous peu.

Bref, tout va bien. Ma vie est banale, celle de mes colocs aussi, tout le monde me connaît et m'apprécie, j'ai une hygiène de vie relativement acceptable même en étant en vacances et plus le temps passe, plus j'apprécie Barbara. Peut-être que dans un mois ou deux, je lui demanderais de sortir avec moi si tout se passe toujours ainsi. Enfin, si j'ai le courage.

Ouais, tout va bien. Tout va trèèèèèès bien, même. Alors pourquoi est-ce que fais inlassablement le tour du quartier en espérant croiser Maia, hein ?

Peut-être que j'espère qu'elle s'excuse ? Non, non, c'est impossible ; elle n'a pas l'air du genre à dire pardon, même quand elle est en tort. Sérieusement, je me demande encore pourquoi est-ce qu'elle n'est pas devenue meilleure amie avec Allison : elles ont tellement de points communs que ça en devient agaçant.

Qu'elle fasse un pas vers moi, alors ? Non plus. Elle n'aime pas les humains et aux dernières nouvelles, j'en suis un.

Que je tombe sur elle et que je puisse feindre la surprise avant de renouer le contact ? Ouais... Soyons clairs, c'est définitivement ça que j'espère.

Aussi, j'ai déjà révisé mon texte en espérant que la troisième option arrive très bientôt :

« C'est vrai, tu es partie sans rien dire il y a cinq ans. Mais en soi, ça ne me concerne pas du tout et je n'avais pas à réagir comme je l'ai fait. Après tout, si tu as envie de te barrer à l'autre bout du monde sans prévenir personne, à qui tu devrais des comptes ? Moi-même parfois je me dis que je devrais m'acheter une tente et partir vivre en Normandie, mais ça c'est juste parce que j'ai peur de prendre l'avion et que je suis un gamin qui flippe de partir loin (et que ma sœur me tuerait si je me créais une vie loin d'elle). Bref, désolé de m'être comporté comme un con. Tu as le droit de partir quand tu veux, et personne n'a rien à te dire là-dessus. Maintenant si tu le veux bien, j'aimerais qu'on continue à se croiser de temps en temps, que tu me détestes et que je dise des trucs cons en espérant que tu me proposes un rencard. »

Oula, non, je ne pourrais carrément pas dire ça.

D'ailleurs, je ne sais même pas si je le pense. Maia me plaît, c'est indéniable et il faudrait être complètement con pour ne pas le voir. Elle est canon – et je parle ici de ses yeux et non de son fessier, bien qu'il soit particulièrement ap... OK je me tais –, drôle et sarcastique. Et elle ne parle à quasiment personne, donc ça réduit carrément les possibilités d'amants qui pourraient graviter autour d'elle.

C'est bête, mais ça me laisse plus de chances.

Je jette un énième coup d'œil aux alentours en espérant apercevoir sa tignasse brune, mais toujours aucun signe de Maia. J'espérais qu'en venant faire un tour à ce brunch entre voisins organisé sur la pelouse devant l'école je pourrais l'y trouver, mais je me trouve de plus en plus idiot. Ce n'est pas du tout son genre de vouloir se retrouver avec plein de jeunes qui se connaissent – ou plein d'humains tout court, d'ailleurs.

GRENADEOù les histoires vivent. Découvrez maintenant