9| Les regards

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HÉLIOS

— Bordel, elles vont nous tuer, grogne Maia tandis que nous quittons la maison.

J'hausse une épaule, encore hilare. Allison va littéralement me trucider, mais ça valait le coup – pour elle comme pour moi.

— Elles nous remercieront plus tard.

Maia me lance une moue dubitative, mais ce n'est pas son expression qui me frappe. Non, ce qui me marque, ce sont ses yeux – encore. Pourquoi ont-ils l'air si... changeants ? Comme différents chaque fois que je la vois ?

C'est super intriguant.

Et bizarre

Mais intriguant surtout.

Et sexy, d'une certaine façon.

(Merde, je m'égare.)

— Alors, euh, t'as pas eu trop de mal à emmener Daphné ici ? finis-je par demander pour briser la glace.

Maia me raconte son stratagème en quelques mots, mais je ne l'écoute que d'une oreille.

Ses yeux, bordel, quels yeux !

Ils sont d'un vert pur, saisissant tant il est clair et hors du commun. Comme un con, je me dis que ça marque son visage et fait émaner de son regard une confiance inébranlable, un courage et une détermination hors normes. Si elle avait les yeux marron, elle aurait l'air plus sage, plus posée.

Mais, attends, elle n'avait pas les yeux noisette la dernière fois que je l'ai vue ?

Je m'arrête subitement de marcher, mes bras retombant mollement le long de mon corps tandis que je la fixe d'un air hébété.

— Quoi ? demande-t-elle en s'arrêtant à son tour, mais quelques mètres plus loin.

Je continue de fixer ses yeux, la situation me paraissant très claire désormais.

— Tu portes des lentilles colorées ?

Visiblement, Maia ne s'attendait pas à ça. Elle me fixe d'un air surpris, la bouche entrouverte et les yeux légèrement écarquillés. Puis, au bout de quelques secondes, elle se reprend en main et se détourne avec un drôle d'air à mi-chemin entre la surprise et la... déception ?

— Comment tu as su ? questionne-t-elle d'une voix sévère.

Je me remets à marcher d'un seul coup pour revenir à sa hauteur, manquant de faire s'envoler ma casquette au passage.

— J'en sais rien, je... Chaque fois qu'on se voit, je trouve toujours qu'il y a un truc saisissant dans tes yeux.

Maia ne me regarde pas en répétant :

— « Saisissant » ?

— Ouais, saisissant, affirmé-je sans me démonter. Y'a un truc qui marque dans tes yeux, on ne peut pas passer à côté.

À ma gauche, je la sens se tendre légèrement. Je ne sais pas si c'est l'effet de ma présence ou du sujet, qui semble visiblement la contrarier.

— Pourtant tu es le premier à t'en rendre compte, avoue-t-elle ensuite d'un air désinvolte.

J'avale difficilement ma salive.

— Il faut croire que tout le monde ne te regarde pas autant que moi.

Aussitôt dit, aussitôt regretté.

Cette fois, c'est au tour de Maia de s'arrêter de marcher. Elle me regarde d'un air furieux, presque comme si je venais de l'insulter.

GRENADEOù les histoires vivent. Découvrez maintenant