Eragon : le Parjure oublié

1. Ennui

   Les armes s'entrechoquaient à une vitesse hallucinante. Des étincelles jaillirent lors des contacts. Les épées devenaient floues, si bien qu'elles ne décrivaient que des trajectoires : lune bleue, l'autre grise. Les deux combattants se faisaient face dans une salle de pierre avec des fenêtres donnant sur l'extérieur. Autour d'eux, dehors comme dans la salle, des Elfes, des Urgals, des nains et des humains les regardaient combattre. Ils feintaient, frappaient, déviaient, et esquivaient les attaques de leur adversaire. Le combat était engagé depuis longtemps.

   Une armure légère protégeait chacun leurs corps des coups de l'adversaire. Ces armures étaient d'une grande valeur, sûrement conçu par les Elfes. Un casque protégeait leur tête ne laissant apparaître que les yeux et la bouche. Sur la ceinture du premier combattant était accroché un fourreau d'un bleu saphir tandis que l'autre semblait plus petit et de couleur grise, comme l'épée de son propriétaire.

   Les combattants étaient des Elfes, sauf celui avec le fourreau saphir qui avait quelques traits d'humain malgré son habileté ahurissante à l'épée. Son adversaire laissait apparaître une fourrure bleu gris, comme un loup. Les elfes avaient la capacité de devenir ce qu'ils voulaient pour se faire beau.

   Après une courte pause, le combattant possédant l'épée bleue passa à l'attaque le premier. Il fonça sur son adversaire, feintant de toucher l'épaule gauche et glissa sur la droite de son adversaire. Dos à sa victime, il  plaça l'épée en travers de sa gorge, qui demanda grâce.

   Eragon relâcha la pression qu'exerçait Brisingr et des cris de joie et de félicitations pour les deux adversaires retentirent dans la salle.

- Bravo Ebrithil ! Bientôt, je ne serai plus assez fort pour vous et vous devrez changer d'adversaire, s'amusa Sänghgarm.

- J'ai toujours du mal à te battre et tu as gagné lors du dernier combat, Sänghgarm le rappela Eragon, un sourire aux lèvres.

« Beau combat, petit homme, et à toi aussi Sänghgarm. »

- Merci Saphira, répondit Eragon.

- Merci, Bjarstkular*, remercia l'elfe.
Il salua Saphira d'un signe de tête respectueux.

   La dragonne avait regardé le combat en mettant son œil devant la fenêtre principale pour regarder le duel. Dehors, la saison des neiges approchait et les arbres jaunissaient dans la plaine entourant le Mont Arngor. Certains possédaient déjà leur couleur marron rouge et d'autres n'avaient plus de feuilles. Les rayons du soleil se reflétaient sur les écailles de la dragonne lançant des éclairs bleutés à travers la pièce.

***

   Eragon s'installa à son bureau en bois. Des tas de rapports le recouvraient et il poussa un soupir de découragement. Saphira, qui s'était installée sur la grande terrasse à côté du bureau regarda Eragon par l'ouverture qui mesurait trois pas de haut, assez pour qu'elle puisse y passer sa tête.

« Eragon, tu ne peux plus continuer à travailler comme ça. Ses activités ne te correspondent pas. Depuis maintenant plus de 3 ans, tu t'entête à lire, signer, rédiger, envoyer des lettres... J'en ai marre, je ne reconnais plus l'Eragon que j'ai choisi dans mon œuf. »

- Tu sais bien que je n'ai pas le choix. Les dragons ont éclos pour des jeunes enfants qui n'ont pas encore l'âge de tenir une épée. Aucun n'est prêt pour se rendre sur le champ de bataille et le plus grand n'a même pas quinze ans ! Je sais que notre tâche prend du temps, mais je ne m'imaginais pas que c'était si long. Maintenant, je dois régler quelques rapports.

   Saphira poussa un rugissement de rage et avant qu' Eragon puisse s'assoir à son bureau, elle lança un grand jet de flammes bleues brûlant les rapports et lettres sur le bureau.

- Saphira !!! hurla Eragon.

   Il avait hurlé si fort que les elfes Astrith et Rflven arrivèrent en courant, l'épée à la main, suivi de Sänghgarm. Voyant la table avec les rouleaux de papiers brûlés et Saphira en colère avec  des étincelles qui sortaient de ses naseaux au rythme où elle respirait, les elfes décidèrent de ne pas s'interposer entre eux.

- Excusez-nous pour le dérangement, dit Eragon, l'air embarrassé.

- Ce n'est rien, tueur d'Ombre, le rassura Rflven. Ghelaya s'occupe de calmer les enfants et leurs dragonneaux.

   Sur ces mots, les elfes repartirent et retournèrent à leurs activités.

- Saphira, pour la première fois depuis des années, on m'a appelé tueur d'Ombre, murmura mentalement Eragon, replongé dans de lointains souvenirs.

« Je ne sais pas la seule à vouloir que tu sorte de tes activités qui te lassent », répondit-elle simplement.

* Les traductions de l'ancien langage, du langage des nains et celui des Urgals est dans le dernier chapitre