Assise dans mon lit, je ne pouvais m'empêcher de pianoter sur mon téléphone, faisant le même parcours, dans un sens, puis dans l'autre, passant sur le numéro de mon père et me dégonflant. Tout semblait devenir si pressant, mon père voulait vraiment me voir et me parler, le stress montait en moi tout comme la culpabilité. Papa était lié à maman et maman était morte à cause de moi, c'était pourquoi la seule vision du mot « papa » dans mon répertoire faisait grimper mon rythme cardiaque.
Alors que tout le monde s'amusait dans la chambre, je sortis pour prendre l'air, descendant les escaliers jusqu'à la porte d'entrée des dortoirs. J'entendis des pas derrière moi et Mathéo poussa la porte pour me laisser sortir avant de me suivre dans la nuit. On s'assit sur les marches, nos souffles s'échappant dans l'air et rejoignant le ciel d'un noir profond ce soir.
« Qu'est-ce qui te tracasse ? », il me demanda.
Sa voix était comme une ancre dans les ténèbres, quand il sentait que je n'allais pas bien il l'adoucissait volontairement pour apaiser mon âme. Je plaçais une cigarette entre mes lèvres, l'allumant en espérant calmer mon stress.
« Mon père veut me recontacter ces temps-ci », je lâchai enfin le morceau.
« Effectivement... », il répondit, réalisant que ça n'allait pas être facile. « Tu veux en parler ou tu veux qu'on parle d'autre chose ? »
Nouvel angle d'attaque, il s'était rendu compte que l'attaque constante n'avait fait que me forcer à me replier sur moi-même. Pas si bête Mathéo...
« Je veux pas rentrer dans les détails, mais je me sens coupable de quelque chose qui l'a énormément affecté et j'ai peur de lui reparler depuis. Je pense qu'il doit me détester à l'heure qu'il est », j'expliquais.
Il prit la cigarette de mes lèvres et tira quelques taffes avant de me la rendre, me prenant de court. Il était si à l'aise avec moi, j'avais oublié cela pendant notre période de froid.
« Je connais pas ton père ni la relation exacte que vous avez, mais en voyant ton dessin la dernière fois, il m'a semblé qu'il avait beaucoup été présent pour toi quand tu étais petite. Ce qui m'amène à penser qu'il tient à toi. Je pense qu'il y a peu de choses qui pourraient le conduire à te détester »
« Eh bien, il se pourrait que j'ai fait ce peu de choses en fait »
« T'as jamais eu de mauvaises intentions, je ne t'ai jamais vu faire du mal à quelqu'un pour le plaisir pur. Quoi que tu ais fait, je ne pense pas qu'il te tienne pour responsable de ce que ça a engendré. Mon père ne m'en voudrait jamais d'avoir essayé de faire de mon mieux »
Je laissais mon téléphone glisser dans mes mains, jouant avec les contours de celui-ci sans jamais l'allumer. Ce que disait Mathéo avait du sens, mais l'appréhension et la possibilité qu'il n'ait pas raison me nouaient l'estomac. Il était loin de s'imaginer que j'avais causé la mort de ma propre mère.
« Arrête de te monter la tête et appelles-le, il ne pourra rien faire derrière un téléphone de toute façon », il continua en voyant ma réaction.
« Je suis une meurtrière Mathéo... »
« Et ton père est un criminel, qu'est-ce qu'il en a à foutre Zoé ? »
« J'ai tué ma mère, je suis la raison pour laquelle elle était dans cette voiture et celle pour laquelle on a eu cet accident putain de merde ! », je lançais en me levant, commençant à faire les cent pas.
Il se leva et me prit fermement par les épaules pour m'immobiliser et me regarder droit dans les yeux.
« Et ton bras est maintenant détruit à jamais, tu crois pas que t'as déjà payé pour ça ? », il était dur mais il avait raison. « Et tu sais quoi ? Je pense même pas que tu le méritais, parce que t'as toujours tenté de protéger tout le monde des dangers ou même de toi-même. Cass, Tim, Hayao, moi ... on a tous reçu ton aide »
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Saint Georges
Teen FictionAprès l'incarcération de son père et la mort de sa mère dans un accident de voiture, Zoé arrive à Saint Georges, un lycée pour les jeunes délinquants ou turbulents perdu en pleine campagne. Faisant face aux blessures de l'accident et aux séquelles d...