Apparences

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Me voilà arrivée sous la couette , pour moi qui met un point d'honneur à contrôler chaque moment de ma vie , cette aprèm midi à été riche en émotions , j'apprécie d'autant plus le réconfort de mon lit .
Ici dans ce confort rudimentaire , je tente de calmer mon esprit. Il n'a cessé de travailler depuis cette décision irrationnel de pousser la porte du petit cyber café .
Pourquoi donc ne suis-je pas rentré directement ici , je serais allé me préparer des pâtes pendant que la cuisine était encore vide et je n'aurais donc pas à subir les assauts de mon estomac désespérément vide.
Après m'être flagellée mentalement je décide de passer en revue les derniers événements .
Les paroles de "Mario" tournent en boucle dans ma tête , comment cet homme qui paraissait si absent et absorbé par ses pensées a t'il pu voir mes émotions? Moi qui prend toujours garde à ne pas me laisser atteindre, et à afficher une expression neutre afin que personne n'imagine avoir une quelconque influence sur moi . J'ai l'impression de m'être laissé happer par l'ordinateur , durant les quelques heures passé dans ce lieu j'ai été déconnecté du monde qui m'entourait . Au fond de moi ce soir je me sens pour la première fois vivante , cela fait bientôt 6ans que je n'avais pas ressenti une telle sensation . C'est tout de même paradoxal de se sentir exister a travers un monde qui n'est pas matériel . Et puis cet homme ,Blum , pourquoi donc ce magnétisme , il n'a fait que dire des banalités , il ne brille ni par son intelligence ni par son humour ,alors que fait il encore là a occuper mes pensées ?
Je pense a demain, je ne commence qu'à 10 heure mais impossible de me souvenir à quelle heure ouvre le petit café , est ce bien raisonnable d'y retourner ? Je ne peux vraiment pas me permettre tant d'écart j'ai besoin de manger et si je passe toute mes économies dans ce loisir je serais très vite en mauvaise posture . Il y a bien une autre solution ... Mais non je chasse cette idée , jamais je ne m'abaisserais à ça , pas après tout ce que j'ai déjà subi .

Le lendemain je reste au lit jusqu'au début des cours , en chemin vers le lycée je m'arrête dans une petite épicerie acheter du pain de mie , jambon , soupe en sachet et un paquet de gateaux , avec ceci j'ai de quoi tenir 2 jours. A la caisse j'en ai pour 8 euros , heureusement qu'hier j'ai sauté le repas du soir car la vie est de plus en plus chère et je me demande comment je vais pouvoir m'en sortir à ce rythme .
Grignotant une tranche de pain de mie , je reprend la direction des cours , le vent est glacial mais la pluie est loin .
Comme chaque jour personne ne me prête attention , absorbée dans mes pensées je ne vois pas le temps passer . Je m'évade imaginant ce que pourrait être ma vie dans un monde de pirate , je me vois forte courageuse à la tête d'un équipage . Tout ce que je ne suis pas dans la vie , ce que je ne suis plus ...

"Melle Dupont ? "
"Melle Dupont s'il vous plait ! "
"Eva ?"
"Eva!"
Il me faut du temps pour comprendre que mon professeur de littérature s'adresse à moi . Je me retourne afin de voir ce qu'il me veut , je crois que c'est la première fois qu'un professeur m'interpelle à la fin du cours .

"Melle Dupont , je souhaiterais vous parler d'un projet . Je suis membre d'une association qui à pour but de rendre la culture accessible aux jeunes les plus démunis . Je sais que vous vivez en foyer et vous êtes une bonne élève , je me disais donc ..."

Il rougit légèrement et semble embarrassé mais poursuit tout de même .

"Enfin je pensais que cela vous intéresserez peut être de faire parti de notre programme , ce n'est pas une obligation biensur . Il n'y a aucun engagement , il s'agit plus ou moins de sorties collectives , d'accords avec les cinémas et bibliothèques des environs pour un accès illimité , enfin ce genre de choses . Vous voyez ? "

Ca gène s'accentue quand il ne me voit pas réagir , comme à mon habitude je reste impassible alors qu'en moi monte une soudaine colère . Comment peut il oser me faire la charité ! Il me prend pour une pauvre fille inculte , il ne se rend même pas compte à quel point cette ville , ce lycée ne pourra jamais compléter ma culture , c'est un trou perdu , il n'y a rien , RIEN ! Et lui qui se crois cultivé , est il au moins sorti de son bled ? Qu'a t'il vu du monde ? Que sait il de la culture ?
Mon sang bouillonne dans mes veines , je ne devrais pas m'emporter comme ça .
Quand je l'entend toussoter je comprend qu'il attend une réponse , prenant une grande inspiration je le remercie pour son attention mais la décline poliment sans lui donner de raison puis je m'éclipse rapidement .

À grandes enjambé je me rend à l'arrière de l'établissement un petit patio abrité du vent me sert d'abris pour la pause déjeuné .

" respire , respire , ne pleur pas , respire ..."

J'essaye de me ressaisir mais c'est trop tard des larmes silencieuses coulent sur mes joues .
Cette lutte intérieur me fatigue , comment la vie peut elle être si cruelle avec moi , j'ai déjà tant perdu.
Je baisse les yeux sur mes chaussures et une rire m'échappe , mon apparence me revient en pleine figure , qu'elle idiote évidement qu'il me prend pour une pauvre fille inculte .

J'aurais bientôt 18 ans ça fera 3ans , 3 longues années que je vis ici , que je suis seule .

J'avale péniblement mon maigre sandwich , tout en essayant de faire le point . Ma vie , cette vie , que dois je faire pour oublier .
Soudain une lumière rouge clignote dans mon esprit ... Mon dieux mes 18 ans officiel sont dans seulement 6 mois , me laisseront ils seulement terminer mon année scolaire ? Mon cœur palpite c'est ma dernière année , je dois décrocher une bourse si je veux continuer , mais comment je suis douée certes mais je ne me sens pas exceptionnelle.
Tout en essayant de me calmer , je me dirige vers ma salle de cours , mes mains sont frigorifiée et mes lèvres sont violacée et tremble , je détourne le regard apercevant mon triste reflet dans un miroir.

Lorsque je m'approche de la porte je sens un regard sur moi , je n'ose pas me retourner de peur de subir une nouvelle salve d'insulte ou encore pire un projectile . Il m'a fallu plusieurs mois à mon arrivée ici pour me faire oublier . La petite nouvelle dans le seul lycée du coin , marginale, sans défense , l'âge con on ne le dit jamais assez , tant de méchanceté gratuite . J'ai servie de defouloir à tous , même les plus timides et gentils tellement contents que quelqu'un détourne l'attention d'eux . On me jetté des détritus , on m'affublé des pires ragots , j'étais une junkie un jour , une pute le lendemain , au fils des semaines je suis passée de dépravée à criminelle , on s'éloigné de moi , détournant les yeux .
Puis un jour ça s'est arrêté je suis devenue invisible, une nouvelle mode , un couple de populaire et plus personne ne s'est soucié de la pauvre fille assise sur le côté de la classe qui ne dit jamais rien.
Je m'installe à ma place la pièce étant quasiment vide je risque un regard vers l'entrée mais je ne vois personne susceptible de m'accorder la moindre attention . Je suis pourtant sûre que quelqu'un m'observait .

La fin de la journée se passe comme tout les autres jours , la nuit est tombée quand les cours se terminent, je prend la direction du foyer capuche sur la tête dans le froid .
J'ai un mauvais pressentiment ...