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A ce moment précis, je me fais la promesse de protéger cette nature, quoiqu'il en coûte. Je veux pouvoir revenir dans ce genre d'endroit, autant que je le veux, respirer l'air pur, entendre ces bruits si apaisants, savoir que je ne suis plus jamais la seule à ressentir cette plénitude.

Kaïs arrive à mes côtés, regardant les grands arbres qui nous entourent. J'ai l'impression qu'il ressent la même énergie que je sens ici. Je ne l'ai jamais vu aussi détendu, ses épaules sont relâchées, son visage aussi. Je remarque que moi aussi, je n'ai jamais été aussi calme. C'est donc cela, le pouvoir de la nature ?

Je ferme les yeux quelques secondes pour apprécier encore plus le moment et me concentre pour essayer d'entendre tous les bruits. J'entends les oiseaux chanter, le battement de leurs ailes, les pattes d'un écureuil qui grimpent sur un arbre, les feuilles qui volent un peu, l'eau qui coule un peu plus loin. J'entends tout ce qui se passe ici, comme si j'étais connectée à cet endroit.

J'ouvre de nouveau les yeux et observe l'écureuil que j'ai entendu. Il ressemble à celui que j'ai vu chez moi. Il monte le long de l'arbre avant de se cacher dans un petit trou à l'intérieur. C'est sa maison, son lieu à lui. Tous les animaux vivent ici comme on vit dans un village.

Nous, les humains, nous ne sommes pas si différents d'eux, au final, bien que nombreux d'entre nous se sentent supérieurs. Comment pouvons-nous détruire un lieu comme celui-ci ? J'avance un peu plus loin pour regarder si je peux apercevoir d'autres animaux mais, hélas, aucun ne veut faire son apparition.

Je me retourne vers Kaïs puis remarque qu'il s'est transformé, sans que je l'entende. Il marche dans la forêt et je le suis, me demandant où il m'emmène. Il est grand, si majestueux et incroyablement impressionnant à la fois. Au soleil, j'aperçois quelques teintes de roux dans son pelage, me donnant l'impression qu'il a toujours fait partie du paysage. Ses pattes brisent les morceaux de bois au sol, poussent les feuilles sur son passage. Sa présence ne me fait plus peur. Il est dans son élément et chacun de ses pas sont silencieux, comme si la nature lui permettait de cacher sa présence.

Je marche à ses côtés, ayant l'air d'une fourmi en vue de sa taille. Nous arrivons devant une grande étendue d'eau avec une petite cascade juste à côté. C'est de là que provient le son que j'entendais tout à l'heure.

Je m'approche en retirant mes chaussures pour y mettre les pieds pendant que mon ami rentre dans l'eau de tout son corps. Moi aussi j'ai envie de rentrer dedans mais je ne me sens pas encore assez à l'aise pour me mettre en sous-vêtement devant lui. Soudain, j'entends une voix dans ma tête alors que personne ne parle.

Cette eau est si bonne.

- Qu'est-ce que tu as dit ? demandé-je, pas sûr que ce son provienne de Kaïs.

Quoi ? Elle m'a entendu ?

Il tourne la tête vers moi et même si je l'entends, sa gueule ne bouge pas, aucun son ne sort de celle-ci. Suis-je en train de devenir folle au point d'imaginer des voix dans ma tête ?

Merde ! Merde ! Elle est si belle ! Non chut ! Merde !

Je fronce les sourcils, maintenant sûre que ce que j'entends vient de lui et visiblement, il est aussi surpris que moi.

Amélia, est-ce que tu entends mes pensées ?

- Il semblerait bien oui.

Comment c'est possible ? Merde ! Il faut que je fasse gaffe à ce que je pense.

- Je ne sais pas comment ça se fait. Je ne t'entends pas comme ça habituellement.

Heureusement parce que sinon ça serait ultra-gênant. Si tu savais tout ce qu'il se passe dans ma tête... Euh... non rien oublie !

- Qu'est-ce qu'il se passe dans ta tête, Kaïs ? dis-je en croisant les bras, amusée.

Que tu es a...

Soudain, il redevient humain, m'empêchant d'entendre ce qu'il est en train de penser jusqu'à la fin. Cela risque de devenir intéressant si je peux entendre ce qu'il se dit, lui qui est si secret. Je me languis d'en savoir plus.

- C'est mal de ne pas finir ses phrases.

- Tu n'entends plus mes pensées, là ? demande-t-il, inquiet.

- Non, plus rien.

Il soupire de soulagement, comme s'il venait de vivre le pire moment de sa vie. Je le comprends, s'il pouvait aussi entendre mes pensées, cela deviendrait monstrueusement gênant. Il se passe tellement de choses dans ma tête que moi-même je n'arrive pas à suivre, parfois.

- Comment ça se fait ? fini-t-il par dire.

- Je n'en ai aucune idée.

- Serait-ce possible...Non... marmonne-t-il.

- De quoi ? Kaïs, arrête de me cacher des choses !

- Je me demande juste si tu es un Hierdun comme moi, dit-il avant de me regarder et de se rapprocher.

- Quoi ? Je le saurais quand même, tu ne penses pas ?

Il se rapproche de plus en plus de moi, à nouveau torse nu. Pourquoi faut-il qu'il finisse toujours torse nu quand il se transforme ! C'est une manie ou c'est fait exprès ? On dirait une histoire d'amour débile comme dans les contes de vampire et de loup-garou.

Mais attend, peut-être que c'était la vérité ? Bella n'est donc pas juste un personnage de fiction ?

Je récupère la chemise qu'il a laissé tout à l'heure en se transformant et lui lance dessus pour qu'il se rhabille. Il la récupère en plein vol, souriant un peu au même moment. Il l'enfile ensuite, continuant de se rapprocher.

- Tu ne supportes pas de me voir torse nu ?

- E-Exactement ! C'est une manie, enfin !

A vrai dire, le voir torse nu ne me dérange en aucun cas, c'est même plutôt agréable à voir. Ce sont plutôt les envies que ça me procure qui me dérange.

En voyant qu'il ne compte pas s'arrêter de s'avancer vers moi, je fais quelques pas en arrière. J'ai beau avoir confiance en lui, je n'apprécie pas pour autant cette soudaine proximité. Il me prend le bras avec un peu plus de force qu'à son habitude.

- Qu'est-ce que tu fais ?

- J'essaye de voir si tu es un Hierdun, toi aussi. Arrête de gigoter et fais-moi confiance ! explique-t-il.

J'ai du mal à le laisser faire tellement je me sens mal à l'aise. Mais si je veux comprendre la raison pour laquelle j'entends ses pensées quand il est en loup, il faut qu'il le découvre. Au fond, ai-je vraiment envie de le savoir ? Cela implique tellement de chose si j'en suis un, moi aussi. J'en ai assez des mensonges, des histoires de politique. Je prie pour qu'il ait tort.

La Chasse Hierdun - Et si tout était faux ?Où les histoires vivent. Découvrez maintenant