Du même sang ! - partie 2

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À mon réveil, ma tête tournait à m'en donner la nausée. J'avais l'impression d'émerger suite à une longue soirée bien arrosée. Pourtant, je ne m'en souvenais pas. À dire vrai, je ne me remémorais rien...

Quelle migraine à la noix.

Je soupirai, la cervelle en ébullition autant de questions que de douleur, quand un courant d'air glacial me tira de mes pensées.

Suis-je dehors? m'inquiétai-je.

Une nouvelle brise me siffla aux oreilles. Mes souvenirs restaient flous, mais j'étais bien en extérieur.

J'ouvris les yeux pour vérifier mes craintes, mais une couche de neige m'empêchait d'y voir clair. Et elle ne disparut pas de simples battements des cils. Ses flocons me semblaient comme gelés sur ma peau.

Je levai un bras pour les essuyer... du moins, je l'espérais avant qu'une vive douleur dans le coude ne m'en dissuade. En plus d'être allongé dans la poudreuse glacée, j'étais apparemment bien amoché.

Qu'avais-je donc fait ?

De mouvements délicats, je testai mon état physique. Mon corps entier me criait de douleur, et plus particulièrement mes articulations.

Sale journée...

N'ayant guère d'autres choix si je ne voulais pas moisir sur place, j'insistai malgré la souffrance lacérant mon corps pour dégager ma vue. Au bout de quelques minutes à battre des cils et malaxer délicatement mes paupières d'une main, je pus enfin découvrir dans quelle situation je me trouvais.

Je me figeai d'horreur.

Perdu au fin fond des bois, allongé au pied d'un talus abrupt, je levai les yeux sur la toile sombre de la nuit. L'heure tardive me glaça les sangs plus que la neige qui m'entourait.

Je bouge ou je fais le mort pour ne pas être pris en chasse? hésitai-je intérieurement.

Mais je doutais qu'une bête sauvage se laisse duper si aisément. D'autant plus ce sale monstre aux yeux jaunes qui semblait assez malin pour leurrer un village entier. Se rendre compte que je faisais le mort restait sûrement trivial.

Je devais foutre le camp !

Dans le plus grand silence et avec une lenteur presque irréelle, je me dégageai des brindilles et tas de neige qui me retenaient au sol. Mon corps me faisait souffrir, mais ma peur restait bien plus oppressante pour que j'osasse gémir.

Une fois debout, j'observai les alentours. Une boule d'anxiété me tordait les entrailles, tandis que je ne reconnaissais rien. Je ne discernai qu'épineux et bosquets ensevelis dans la pénombre.

Comment avais-je atterri là ?

Le souffle court, sifflant malgré mon désir de rester discret, je tentai de remettre de l'ordre dans ma tête. Je visualisai ma matinée aux côtés de mon père... d'abord, pioche en main, ce qui me valait probablement ces sales douleurs aux épaules. Je pensais me soustraire de cette tâche ingrate en jouant les coursiers, mais transporter des caisses de bois s'était avéré bien plus physique que je l'imaginais. À tel point qu'une cargaison m'avait échappé des mains, m'attirant vers les rires de dames au fond de la forêt.

Je frissonnai alors que mes pensées s'éclairaient ! Mon approche silencieuse, la neige cédant sous mon poids... Je jurai à mi-voix. Voilà donc à quoi me menait ma mauvaise conduite.

La nuit semblait calme, mais je savais cela trompeur. Phil m'avait enseigné brièvement la marche à suivre si je venais à me retrouver en position de proie. Je ne devais surtout pas courir, cela attirerait l'attention des prédateurs, mais me déplacer avec furtivité. Plus facile à dire qu'à faire quand on n'était pas chasseur de métier. Et d'autant plus alors que mon cœur menaçait de bondir hors de ma poitrine en imaginant la faucheuse qui me talonnait, sa faux acérée entre ses doigts osseux !

Brume [TERMINÉ]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant