Je regardais tranquillement la télévision dans ma chambre lorsque mon père nous fit appeler, mes frères, mes sœurs et moi. Je me dirigeais donc vers la vaste salle à manger où nous devions tous nous réunir. Je faisais parti d'une fratrie de cinq : trois filles et deux garçons ; issue d'une mère disparue et d'un père aux principes inflexibles.
Il était là, assis droit comme un "i", trônant au bout de l'immense table rectangulaire en ébène. Il ne laissait aucune émotion transparaître sur son visage vieilli par l'âge. Ses cheveux poivre et sel étaient coiffé d'une façon strict qui accentuait son air sérieux. Il regardait droit devant lui, ne prêtant aucune attention à notre présence.
D'un geste de la main, il nous fit asseoir à nos places respectives. Beaucoup de temps s'écoula avant que ce dernier ne prenne la parole :
"- Mes chers enfant, je vais être bref. Je n'ai plus un sou, ou presque."
La pièce auparavant silencieuse se transforma en quelques instants en une véritable cacophonie. Mes frères et sœurs, de nature plutôt exubérante, jouèrent à celui qui criera le plus fort. Ils avaient aussi en commun leu superficialité. Au contraire, j'étais de nature plus discrète. et au lieu de dépenser mon argent de poche en habits comme le reste de ma fratrie, je le faisais plutôt en livres. Je restai donc à l'écart de ce bruyant tapage, réfléchissant aux conséquences que cela auraient sur ma vie.J'étais encore dans mes pensées lorsque mon père prit de nouveau la parole :
"- J'ai été obligé de vendre notre villa... Nous déménageons demain et nous nous installerons dans une vielle ferme rénovée. Pour résumer la situation nous quittons la capitale où nous vivions comme des rois pour une vie plus modeste dans la campagne au sud de Paris. N'est-ce pas ironique comme situation ?"
Il éclata d'un rire sarcastique qui nous fit tous frémir. Nos yeux s'arrondirent tels des soucoupes sous la stupéfaction de ses propos. Ne pouvant contenir sa rage plus longtemps, Tanzy laissa éclater sa colère, suivie de près par mes frères et ma sœur. Le brouhaha était de nouveau de retour. Ce tumulte continua sans que j'entre dans ce débat. Mon père quant à lui gardait le silence, les mains jointes, signe de sa mauvaise humeur. Ne pouvant plus en supporter d'avantage, il rétablit le silence à l'aide d'un seul mot.
"- Stop."
C'était clair et net. L'effet fût immédiat. Tous se turent et baissèrent les yeux. Ce silence se prolongea, aucun de nous n'osait ne serait-ce que respirer, jusqu'à ce que mon père décide de le rompre :
"- Bien, je préfère cela. Maintenant vous allez m'écouter sans broncher. Vous n'avez pas le choix. À ce que je sache je suis le maître de ces lieux et votre père par la même occasion, alors si je décide que nous devons déménager, nous déménagerons. Maintenant, vous allez tous dans votre chambre et vous commencez à faire votre valise, et j'ai bien dit une car là où nous allons il n'y a pas beaucoup de place. Je veux plus vous voir jusqu'à ce que je vous appelle pour manger. Toi, Bella, tu viens dans mon bureau avec moi, j'ai à te parler."
L'assemblée se dispersa, se dirigeant là où mon père leur avait indiqué d'aller. J'attendis que la salle se vide avant de suivre mon père, laissant environ deux mètres entre lui et moi. Il ouvrit la porte de son cabinet et la laissa ouverte. Je traversais le seuil à mon tour et refermais la porte derrière moi. Je redoutais ce qu'il allait me dire. D'un mouvement il me fit asseoir sur le siège marron d'un matelassé assez confortable en face de lui. Seulement un large et froid bureau nous séparait. Il me regardait intensément avec ses yeux gris perçants comme s'il cherchait quelque chose sur mon visage. Cela avait le don de me mettre mal à l'aise.
"- Et toi, qu'en penses-tu ?
- Par rapport à quoi ?
- À ce déménagement. J'ai pu observer le comportement de tes frères et soeurs... Mais toi tu es restée impassible, tu sais que c'est une qualité que j'admire chez toi, alors j'aimerais savoir ton ressenti.
- Et bien...,hesitai-je d'abord avant de prendre mon courage à deux mains, et bien, au début, j'étais assez choquer comme eux, mais en y repensant, il n'y a rien qui me retienne ici, pour tout dire je n'ai pas vraiment d'amis... Alors tant que je peux emmener mes livres avec moi et qu'il y a une librairie à proximité, ce changement ne me dérange pas vraiment.
- Hmmmh... Oui, je vois... Tu peux y aller... N'oublie pas de faire ta valise."
Je ne pris pas la peine de lui répondre et m'échappais à pas de souris du bureau de mon père. Cette conversation résonnait étrangement dans ma tête. C'est en montant les escaliers menant à l'étage des chambres à coucher que je surpris leur conversation.Celle de Tanzy et Zoé : mes sœurs.
Elles étaient toutes deux assises sur le lit de Tanzy à manucurer leurs ongles d'orteils d'un rose fuchsia. La porte était entrouverte et je pus les observer sans qu'elles ne remarquent ma présence. Je n'avais pas l'habitude d'écouter les conversations des autres mais un mot avait retenu mon attention. Bella. Mon prénom. C'est ainsi que j'entendis tout ce qu'elles se dirent.
"- J'espère que père va lui donner une bonne correction !
- Moi aussi ! Je n'en peux plus de cette Sainte-Nitouche !
- En plus, je suis sûre que si maman est partie c'est à cause d'elle."
Zoé hocha la tête en signe d'approbation. Elles continuèrent à casser du sucre sur mon dos, tout en ricanant de leurs méchancetés.
Ne pouvant en entendre d'avantage, je courus jusqu'à ma chambre, des larmes mouillant mes joues. Je jetais les quelques affaires qui me servaient de vêtements dans une petite valise et remplis une dizaine de cartons avec mes livres. Je ne descendis pas du reste de la soirée et m'endormis dans un océan de larmes.
Ce déménagement était l'occasion de repartir sur de nouvelles bases, de tout remettre à zéro.
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La Belle et La Bête /En Réécriture/
Teen FictionRedécouvrez le monde fantastique du conte de notre enfance dans une version revisitée qui se déroule à notre époque. Bonne lecture :)