Le temps semble long quand on attend depuis aussi longtemps que nous. Deliah et la troupe de loups qui l'accompagnait sont sûrement rentrés quelque part mais Alex ne veut pas partir tant que nous ne sommes pas certains d'une certaine sécurité.
Je ne sais pas quand nous reprendrons la route mais je ne m'en plains pas, malgré mon ventre qui grogne de faim. La chaleur du corps d'Alex me suffit. Le sentir sous moi est comme une bouée dont j'ai encore besoin après l'avoir vu mort sous mes yeux. Je me crispe en y repensant, le ventre tordu et le son distinct d'un cœur brisé ; le mien. Je ne supporte toujours pas cette idée et me colle un peu plus contre lui, la tête posée sur son épaule.
— Ça ne va pas ?
— Non.
Son souffle chaud vient taper contre mon front et je plonge un peu plus dans cette étreinte rassurante. Sa main caresse doucement mes cheveux et je me prie pour que cet instant dure à jamais.
— Léana...
Mon prénom — ou plutôt le vrai — me tire des frissons agréables.
— Pourquoi ça ne va pas ? À cause de Deliah et de ces hommes ?
— Non, couiné-je.
Ma voix part dans les aigus et mon cœur se serre avec une force sans précédent mais j'enfouis tout mon visage contre son torse pour ne pas faire face à cette terrible réalité qui se dessine devant mes yeux depuis déjà des heures. Je voudrais oublier, oublier tout et croire que c'était un rêve. Mais plus rien ne sera comme avant.
— Léana...
— Ta mort, dis-je abruptement, la voix cassée.
Je le sens se figer contre ma joue avant qu'il ne s'affaisse.
— Je suis désolé, Lé...
— Ne t'excuse pas, ce n'est pas de ta faute. Je veux juste que tu restes, je t'en prie. Reste avec moi, ne m'abandonne jamais, je ne m'en remettrai pas.
Et c'est vrai. Ce n'est que maintenant que je le dis, que je rends la chose plus concrète, que je me rends compte que s'il part, mon cœur finira déchiré. Je ne supporterai pas de le voir encore une fois se vider de son sang, le liquide carmin sur mes mains, l'épée toujours enfoui dans son torse. Un sanglot monte dans ma gorge et je me recroqueville.
Je ne me rappelle que de la présence du jeune homme que quand sa panique m'envahit et qu'il me tient rudement par les épaules pour plonger ses yeux dans les miens. Gris mais éveillés, il semble réaliser la blessure ouverte, saignante mais invisible. Seule mon âme garde cette trace si indélébile.
— Léana.
— Ne me quitte pas, balbutié-je. Je ne pourrais pas le supporter.
J'aimerais pleurer mais plus rien ne peut s'écouler de mes yeux, j'ai trop donné. Je tends les bras pour qu'il m'enveloppe de nouveau de sa chaleur corporelle. La seule chose qui me rassure, c'est lui, ses mains sur moi et sa respiration si près de mes oreilles.
— Je ne te quitterai pas, promet-il en ramenant ma tête contre lui.
Il me sert fort fort et nos jambes s'emmêlent tant qu'on ne distingue plus où nos corps commencent et s'arrêtent. La grotte, comme par magie, m'apparaît flou, comme irréelle. Je ne sais pas où je vais, mais je n'entends plus que mon cœur battre, le seul être vivant doué d'émotions. Chez moi n'existe plus que le vide, impossible à combler. Alexander me caresse le crâne mais la sensation que je suis un corps étranger ne me quitte plus.
Ma respiration se fait lente mais erratique et je me perds dans les tréfonds de mon esprit où rien ne peut m'atteindre, que ce soit la douleur ou la tristesse. Cela me va. Je suis bien là où je réside, coupée de tout, coupée du monde et de ses horreurs, de la mort auquel j'ai fait face et la réalité qui me cisaille à coups de pierres.
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La Malédiction de La Luna (S2)
WerewolfSaison 2 ✓ Un mois et demi après, Rodric et sa famille ne sont toujours pas réapparu tandis que Léana et Alexander dépérissent peu à peu sous l'inquiétude et l'impatience depuis que Nëta, la déesse de la nuit, leur a révélé la vérité. Le Père des Lo...