dégénérescence

il m'aime toujours

"Qu'est-ce qu'il s'est passé ?

- Pardon ?

- Il s'est passé quelque chose ?

- Comment vous savez ?

- Je ne sais pas. Quelque chose dans ton regard.

- ...

- Ce n'est pas grave si tu ne veux pas le dire.

- Si, si.. C'est juste que.. Enfin.. Je sais pas.. Si. Si, je veux le dire mais.. Mais c'est compliqué de mettre des mots dessus.

- Compliqué ?

- Oui. Ah, j'ai l'impression d'être en primaire et de devoir réciter une poésie. J'ai l'air trop con.

- Tu peux prendre ton temps.

- ...

- ...

- On.. On l'a fait.

- Qu'est-ce que vous avez fait ?

- Le.. L'a... L'amour. Avec Ken.

- Oh.. Comment c'était ?

- C'était bien. Très bien. C'était.. Hyper stressant. Angoissant. Surtout.. Enfin, vous le savez, ça faisait longtemps que j'y pensais. Que ça me stressait. Qu'à chaque fois qu'on s'embrassait, j'y pensais, j'avais peur. Donc quand.. Quand.. Enfin, au fil du temps, j'ai commencé à en avoir envie. J'angoissais et tout, c'était compliqué mais j'en avais envie. Et après j'ai commencé à angoisser de devoir en parler. Je sais pas combien de temps ça a duré avant que j'en parle.. Que j'ose en parler. Mais j'avais envie de le faire et surtout j'avais envie qu'on en parle avant. Que ça n'arrive pas sans qu'on communique. Donc j'ai fini par le faire et c'était.. Hyper compliqué de se lancer. En fait, c'est toujours le premier pas qui est le plus compliqué. Le premier mot, le premier mouvement en avant.

- Comment s'est passé cette discussion ?

- Bien. Et j'avais pas peur que ça se passe mal avec lui. Parce que je sais que c'est quelqu'un qui est à l'écoute, qui est attentif, qui est compréhensif. Je savais que ça allait bien se passer, qu'il allait faire de son mieux et qu'il serait capable de me dire si il n'était pas d'accord, si j'allais trop vite, s'il ne se sentait pas prêt. Ca me stressait juste d'en parler. Et ça me stressait aussi de.. De me projeter autant en me disant que.. peut-être que ça ne servait à rien. J'avais peur d'en parler pour qu'au final je fasse une crise d'angoisse au moment où ça arriverait et de pas être capable de tenir mes promesses. J'avais peur qu'il m'en veuille si jamais je le chauffais et qu'au final je n'arrivais pas à me gérer. Alors que c'est con, parce qu'il n'est pas comme ça, pas du tout. Mais quand même.

- Et au final ?

- Au final.. On en a parlé, j'ai pleuré aussi. Parce que tout mon stress est retombé d'un coup. On en a parlé, ça s'est bien passé. Et puis on l'a fait juste après. Parce que.. Parce que j'en avais envie et que lui aussi. On a eu l'air un peu cons au début. Parce que je sais pas faire et que lui non plus. C'était trooooop bizarre. Mais c'était bien.

- Et toi, comment tu t'es senti ?

- Au début, assez mal. Parce que je savais pas quoi faire, ni comment. Et j'avais peur, j'avais très peur. Et j'arrêtais pas de penser à.. A mon viol. J'arrêtais pas de comparer et je savais que c'était pas quelque chose à faire, je savais que c'était con. Mais j'arrivais pas à arrêter mon cerveau. Je comparais. Je comparais la douceur, la douleur, la violence. Et au final.. Enfin, ça m'a rassuré de voir combien c'était différent. Mais j'avais aussi plein d'images qui me revenaient et c'était compliqué à gérer. On a dû arrêter plusieurs fois, parce que je devais me poser pour respirer, pour prendre du recul. Mais au final ça s'est bien passé.. Ca s'est bien passé. On a fait l'amour et il m'aime toujours maintenant qu'on l'a fait."