Mikey passe ses mains dans ses cheveux, prend une profonde inspiration et ouvre les paupières, regarde son reflet dans le miroir. Et il a le sentiment qu'une massue s'abat à l'arrière de son crâne, une moue se dessine sur ses lèvres. Lorsqu'il sent ses yeux s'emplir de larmes, il détourne le regard.
"Peut-être qu'en étant maigre on ne me violera plus."
Mikey fixe ses chaussures et il résiste à l'envie de se frapper le crâne contre un mur, de s'arracher la peau et les veines, de partir loin, de disparaître. Il se lave les mains, en silence.
Il se souvient de ces mots, il se souvient de les avoir prononcés, il y a plus de deux ans.
Lorsqu'il relève la tête, son regard se pose sur le terrain de sport du lycée qui s'étend sous ses yeux. Il entend les sons des autres lycéens, étouffés par la porte fermée des toilettes. Il a fait beau, aujourd'hui. Le soleil se couche.
Le temps passe et s'écoule, le temps passe et il ne revient pas, il ne reviendra pas, il ne reviendra jamais.
Il a fini par retourner au collège, sur les derniers mois de l'année scolaire. Lorsqu'il en a eu la force et le courage. Il ne s'en souvient pas vraiment, ces souvenirs sont flous, teintés de culpabilité et d'angoisse, teintés d'envie de fuir et de larmes. Sur ces deux dernières années, il ne se souvient que des pics de violence ; le viol et la peur. L'impression de ne pas pouvoir sortir de son corps, l'impression d'en être loin, très loin, trop loin. L'impression d'ombre et d'orages, l'impression de voir le monde grandir et évoluer, ses proches grandir et évoluer, mais pas lui. Il se souvient de quelques bribes de conversations, il se souvient de Draken à l'hôpital, il se souvient de la peur, de la rage, de la haine, de l'angoisse.
"Peut-être qu'en étant maigre on ne me violera plus."
Il a repris du poids, retrouvé l'envie et le besoin. Il a eu, longtemps, le sentiment qu'il n'avait besoin de rien ; pas besoin de boire, pas besoin de se nourrir, pas besoin de dormir. Pas besoin de proches, pas besoin d'amour, pas besoin de sourires. Pas besoin de vivre, pas besoin de survivre. Pas besoin.
Il trouve ça fou d'être là aujourd'hui. Il a du mal à se repérer dans le temps, il a du mal à faire confiance aux autres, au monde, à lui. Il a du mal à sortir, la nuit, il a du mal à être seul. Mais l'hypervigilance l'a quitté, l'angoisse des regards s'est évanouie et l'envie de voir un lendemain est revenue.
Il trouve ça fou d'être là aujourd'hui. Pouvoir marcher et courir sans sentir le monde s'évanouir sous ses pieds par manque de force. Pouvoir sourire sincèrement, pouvoir tenir une conversation, pouvoir dire les choses. Tout a un peu goût de "comme avant", avec la douceur du renouveau. Regarder des films et lire des poèmes, vouloir aller voir la mer et le reflet du soleil dans l'écume. Écouter de la musique, écouter en cours, écouter les autres.
Il trouve ça fou d'être là aujourd'hui. Au lycée, avec tous ces mois derrière lui, toute la violence du monde qu'il s'est pris dans la gueule subitement, avec toute la haine qui s'est évanouie ; la haine de soi, la haine des autres, la haine du monde.
"Peut-être qu'en étant maigre on ne me violera plus."
Il trouve ça fou d'être là aujourd'hui. Parce qu'il y a quelques mois encore, il continuait de cauchemars dans lesquels il sentait encore et encore et encore leurs mains, leurs doigts, leurs coups, leur violence. Des cauchemars où ils prenaient et reprenaient, encore et encore, son corps et son âme. Il ne sait pas combien de fois il a rêvé de son viol, il ne sait pas combien de fois il a dû revivre la même scène, la même agressivité, la même violence.
Il trouve ça fou d'être là aujourd'hui. Parce que si on lui avait dit, il y a quelques mois, qu'un jour il serait capable d'aller au lycée et de faire tout ce qu'il fait aujourd'hui, il n'y aurait pas cru. Si on lui avait dit que, de nouveau, le monde serait teinté de couleurs et de sons, de lumière et de rires, il n'y aurait pas cru. Si on lui avait dit que ce n'était pas si difficile d'être quelqu'un, il n'y aurait pas cru.
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dégénérescence
FanficLa fatigue et la violence de la veille se font ressentir. « Bref. Parlons du rassemblement du Toman de demain soir. » Draken sent Mitsuya se tendre près de lui, entend le léger soupir qui traverse ses lèvres. Lorsque son regard parcourt le visage d...