Chapitre 9

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Le dragon avait volé de longues heures au-dessus des mers agitées qui séparaient la principauté d'Antillia du grand royaume forestier de l'Arduinna. Cela faisait maintenant de longs instants que la princesse Clarence, lasse, avait cessé de s'agiter. La jeune femme n'était plus qu'une petite silhouette frigorifiée et grelottante collée contre la poitrine écailleuse de son ravisseur. Le froid et la panique avaient provoqué le ruissellement de quelques discrètes larmes sur ses petites joues délicates. Ses oreilles, quant à elles, avaient finies par s'habituer au son provoqué par le battement régulier des ailes de la bête.


L'envergure impressionnante de ces dernières permettait au dragon de voler parmi les nuages avec aisance. Les os de cet être de légende, à présent creux et légers, lui facilitaient grandement cet exercice de vol. Les vents impitoyables et maritimes ne cessaient de jeter des gouttelettes d'un froid polaire sur sur ses écailles aussi dures que l'acier. Ses yeux, d'un jaune vif et pétillant de magie, où se trouvaient deux fentes serpentines en guise de pupilles, ne cessaient de scruter le ciel embrumé. Sa gueule aux mâchoires puissantes, située au bout d'un long cou, grimaça d'agacement.


Il craignait s'être perdu dans ce bataillon de nuages. Ses sens, devenus pourtant plus sensibles et plus affinés suite à sa métamorphose, ne l'aidèrent pas énormément. Il était simplement parvenu à flairer la détresse croissante de son otage. La perception des émotions demeurait en effet ce que certains considéraient comme un sixième sens chez ces créatures.


Un souffle d'agacement s'échappa de ses larges naseaux, ce qui ne manqua pas d'interpeller la princesse.


- Le dragon est perdu ? le provoqua-t-elle sur un ton qui se voulait hautain.


- La ferme, siffla froidement le dragon.


Clarence pouffa :


- Votre client ne sera pas content si vous égarez sa marchandise, lâcha-t-elle.

- Ça suffit, grogna la créature.


- Quelle décadence, tout de même, ajouta la captive. Des dragons au service de vulgaires humains. Quand on sait que les Dieux nous ont initialement créés pour vous servir de nourriture, cela peut prêter à sourire.


Un grognement contrarié s'échappa de la gueule de la créature.


- Continue ainsi et je verrai quel goût peut bien avoir une princesse... Après tout, le « client » te veux vivante. Tu n'as peut-être pas besoin de tes deux bras et de tes deux jambes.


Une boule se créa dans la gorge de la princesse Clarence tandis que la bouche du dragon s'étira pour former un sourire satisfait. La créature avait en effet flairé quelques agréables notes de résine dans l'air. Les vastes forêts de l'Arduinna ne devaient plus être très loin... Celles dans lesquelles il avait passé son enfance.


Il ferma un court instant ses yeux, se remémorant avec nostalgie ces années où sa vie était plus facile et plus innocente. L'insouciance de l'enfance lui avaient permis de passer de merveilleux instants dans les grands bois du royaume. Fils du bûcherons, il avait souvent été amené à accompagner son père dans ces terres giboyeuses. Tant de fois, il s'était retrouvé émerveillé par la majesté des grands épicéas qui étaient légions en ces terres.

L'Alchimie des LégendesOù les histoires vivent. Découvrez maintenant