Chapitre 23

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 Une semaine. Cela faisait une semaine que Geoffroy séjournait au sein du confortable palais de la fée Morgane. Un séjour durant lequel il avait pû récupérer des derniers évènements. Et, même s'il s'était montré méfiant au départ, il avait sympathisé avec plusieurs des fées qui vivaient dans cet endroit. Il avait ainsi accompagné plusieurs d'entre-elles lors de promenades champêtres dans les quelques bosquets qui parsemaient les grandes et vastes Plaines des Murmures. Avec elles, il avait cueilli de nombreuses baies et appris à communiquer avec le gibier... Les disciples de la Voie Véritable l'avaient en effet invité à mâcher de la flandrieuse, une herbe magique qui, une fois placée dans la bouche, permettait de parler aux animaux.

Il s'agissait d'une plante qui avait été créée par Elegast. Ce paladin exilé semblait posséder de larges compétences en alchimie. Mieux encore, l'improbable guerrier à la longue chevelure blonde était, disait-on, doté de curieux pouvoirs tels qu'ouvrir des serrures sans clé ou encore endormir des personnes d'un simple geste de la main. Des talents fascinants pour un jeune homme de son âge.

Geoffroy avait plusieurs fois regretté que celui-ci se soit imposé un mutisme total. Quelles conversations captivantes il aurait pû avoir avec lui. Toutefois, même si Elegast s'interdisait de prononcer le moindre mot, il n'en restait pas moins très expressif. Créatif était peut-être le terme le plus approprié.

En effet, chaque soir, dans ses quartiers, le jeune damoiseau rédigeait quelques poèmes. Un véritable artiste car ces vers étaient ensuite lus ou chantés lors de veillées qui rassemblaient fées, gnomes lutins et même kobolds... Assis autour d'une petite fontaine mélodieuse dans l'enceinte du palais, toutes et tous écoutaient les fées et leur voix douces chanter les textes d'Elegast. Parfois, celui-ci accompagnait les bardes en jouant de la harpe. En plus d'être un poète remarquable, l'éphèbe qui avait tourné le dos au Nouveau Culte était un musicien extraordinaire.

Assis en tailleur entre deux fées aux cheveux aubrun et au teint pâle, Geoffroy se laissait à nouveau bercer par la mélodie du jeune serviteur de la fée Morgane. L'aventurier aux yeux verts et émerveillés sirotait paisiblement la coupe de vin qu'il tenait dans les mains. Il devait être minuit et il se laissait à nouveau envoûter par les douces paroles des chanteurs féeriques. Le chevalier errant se surprenait de temps à autre à penser à Naménielle et à Alexandre. Plus que tout, il souhaitait les amener dans cet havre de paix. Certes, il restait tourmenté par le sale tour qui lui avait été joué par ce scélérat de Mordred. Cependant, les nombreuses heures qu'il avait passé à prier dans la grotte en compagnie des Avoués de la Sainte-Triade avaient apaisé son esprit. À quoi bon chercher la vengeance ? Seul contre un Empire, il ne faisait pas le poids. Aussi, se mesurer aux impériaux l'amènerait certainement à se métamorphoser de nouveau en dragon... Chose qu'il souhaitait éviter.

Pourtant, l'aventurier arduinnien était loin de pardonner à l'Estotiland l'infâme duperie dont il avait été victime. En réalité, il s'en voulait surtout à lui-même d'avoir été si naïf. Maintenant que l'Empire le considérait sans doute comme mort, il lui fallait tirer profit de cela pour se faire discret. Un avantage qui lui permettrait de refaire sa vie dans cet endroit serein et enchanté une fois qu'il aurait retrouvé Naménielle et Alexandre. Il finirait par mettre la main sur ce miroir atlante que Morgane avait dissimulé à toutes et tous. Pour cela, il avait trouvé un moyen discret d'obtenir des « renseignements ».

Depuis qu'on lui fait découvrir la flandrieuse, le jeune chevalier errant s'attardait chaque nuit dans les égouts du palais pour parler aux rats. Rien de très gracieux pour un homme de sa trempe mais il estimait que c'était là un mal nécessaire. Après chaque veillée, il passait de longs moments en compagnie des rongeurs. Il les suppliait toujours de lui révéler où se trouvait le miroir atlante, leur promettant d'immenses quantité de céréales en échange. Hélas, jusqu'à présent, les muridés ne lui avaient rapporté que très peu d'informations... Et ses prières adressées à la déesse Dendria semblaient rester sans réponse.

L'Alchimie des LégendesOù les histoires vivent. Découvrez maintenant