UN NOUVEL AIR

Chapitre 8

Le lendemain matin, je ne sais absolument pas comment je me suis retrouvé dans la chambre de Merredia, mais j'ai à peine eu le temps de m'en rendre compte que la panique monta en moi plus rapidement que prévu. Elle était couchée là, juste à côté de moi, elle dort si paisiblement que je n'ai pas envie de la réveiller, je m'extrais du lit très doucement et vais dans la pièce principale qui s'avère être le salon, je réfléchis à comment sortir d'ici sans que personne ne me voit. Mais quand je repense au fait que je me suis tout de même retrouvé dans sa chambre, je réfléchis à comment la soirée s'est terminée.

Je préfère ne pas y penser pour le moment, peut-être, se rappelle-t-elle.

Quand je tourne la tête, elle se tient devant moi avec sa robe de chambre blanche transparente.
Mon dieu qu'elle est belle.
- Te rappelles-tu comment je suis arrivé dans ta chambre.
- Tu m'as juste raccompagné, et je t'ai proposé de rester dormir, mais cette fois tu as dormis avec moi, dans mon lit.
- C'est étrange que je ne me souvienne de rien.
- Si je me souviens bien, nous avions bus quelques
verres.
- Intéressant. Il ne s'est rien passé n'est-ce pas ?
- Non en effet, tu rigolais beaucoup trop.
- Dommage. Dis-je le plus doucement possible.
- Comment ?
Hein ?
- Je disais que cela devait être vraiment n'importe
quoi.
- Effectivement.
Nous rigolons un instant et lorsque je me décide enfin à me lever pour l'embrasser il est déjà onze heures du matin, je ne compte pas rester ici indéfiniment.
Je me demande si elle a fait son choix. Elle m'avait pourtant dit qu'elle viendrait avec moi cette nuit-là.

- Max ! Ouvre ! C'est moi !
Quand Max ouvre la porte, il y un jeune homme qui se tient à ses côtés.
- Arthur ! Je te présente Tony.
- Enchanté.
Tony est grand, brun avec les yeux très noirs. Plutôt joli garçon. Il a une attitude étrange, il n'est pas timide comme il devrait l'être en rentrant dans une chambre qu'il lui est inconnue, il a un regard dédain, hautain, comme s'il avait une idée derrière la tête.
- Tony et moi avons discutés un long moment tout à l'heure sur le pont, pendant que tu étais certainement avec...
- Alors Tony quel âge as-tu ?
Je ne veux surtout pas qu'il dise à tout le monde avec qui je passe mes journées, je ne le connais pas, il pourrait tout raconter à n'importe qui.
- Dix-neuf ans.
Nous discutons encore un long moment et Max ne semble pas vouloir me questionner sur le fait que je lui ai coupé la parole en plein aveux.

Apparemment, Tony viendrait de loin, d'Italie, si je ne me trompe pas. Tony est le diminutif d'Antonio. Il nous raconte plusieurs autres faits sûrement très intéressants, mais pas suffisamment pour que je loupe le repas du midi.
- Allons manger, il est déjà tard. Nous n'aurons plus de choix.
En ce moment les repas de la cantine sont très bons, je pense que Merredia a fait quelque chose, car c'est très bon tous les jours depuis que l'on en a discuté.
Pendant le repas, je surprends Tony qui fait un clin d'œil à un grand bonhomme brun avec des cicatrices sur le visage. Je me pose beaucoup de questions, et ma meilleure amie, la parano revient me dire bonjour.

Je ne sais pas si je dois vraiment en parler à Max, il a l'air de plutôt bien l'apprécier.
Mais je dois lui dire, je n'ai absolument pas confiance en ce Tony, et j'ai la forte impression qu'il cache quelque chose. J'espère que Max n'est pas assez naïf, pour ne pas l'avoir remarqué. Ou plutôt, je préfère me tromper.
- Max, as-tu remarqué le clin d'œil qu'a fait Tony à un grand bonhomme avec des cicatrices sur le visage. Tu sais, il ne m'inspire pas vraiment confiance, je me dis qu'il cache quelque chose.
- Tu dis n'importe quoi. Tony ne cache rien. Tu ne le connais pas et au premier regard, tu penses que c'est une mauvaise personne.
- Une intuition.
- Laisse tomber. Tu verras, il ne cache rien je te l'assure.
- Toi non plus, tu ne le connais pas.
- Je le connais depuis plus longtemps que toi, j'ai eu le temps de voir qu'il était sincère.

Je décide de ne pas répondre à cela, il n'est apparemment pas de mon côté. Je soupire et vais marcher sur le pont, qui est inhabituellement très vide et calme.
À l'arrière, il y a le capitaine, Mr McCall.
- Il fait un temps magnifique aujourd'hui.
Je me dis que je ne risque rien si je lui parle de la pluie et du beau temps.
- En effet, Arthur Davies.
Comment connaît-il mon prénom ? Et mon nom ?
Nous avions fait le voyage ensemble, la dernière fois, mais je ne pensais pas qu'il savait mon prénom, et encore moins mon nom, je ne le donne à personne. Personne ne connaît l'existence de la famille Davies.
- Je connais tout le monde.
Allons bon. Lui aussi se met à lire dans les pensées.
- Vois-tu l'île, là-bas ?
- Oui.
- C'est là où j'ai grandi. Mes parents me mettaient
dans la tête qu'il ne fallait surtout pas que je me retrouve près de l'eau, car les sirènes pourraient m'emmener. Je sais que tu as entendu parler de cette légende Arthur, et tu ne peux pas me cacher que depuis quelque temps, tu es convaincu qu'elles existent. Tu en es convaincu, puisque la fille que tu aimes, en est une.

Qu'est ce qu'il vient de se passer la ?

- Oh ! Comment savez-vous tout cela ?
- Je suis le capitaine, je sais tout ce qu'il se passe sur mon navire.
- Comment êtes-vous au courant qu'elle en est une ?
- Je la connais depuis très longtemps avant de vivre en Écosse, elle habitait aux États-Unis. Comme moi. Elle se confit souvent à moi. Et cela, je le sais depuis le début. C'est d'ailleurs étrange qu'elle vous en ai parlé. Elle ne le dit à personne, elle doit beaucoup vous faire confiance.
- J'imagine.
- Elle t'aime, c'est une certitude. Et toi aussi tu en es fou amoureux. Je me rends compte qu'elle n'est pas du tout d'accord pour ce mariage arrangé, je ne sais pas si elle va abandonner la terre pour aller régner sur son royaume. Qu'en penses-tu ?
Euh...
Il parle beaucoup.
Il en sait des choses, j'ai l'impression qu'il est décidé à me faire un petit résumé de ma vie.

- Je ne sais pas du tout. À vrai dire, elle ne sait pas non plus. Elle est en train de réfléchir. Il lui reste quelques heures avant que le bateau ne passe devant Océana. Un soir, elle m'avait dit qu'elle viendrait avec moi, et qu'elle abandonnerait tout. Mais j'ai l'impression qu'elle ne le fera pas. Je pense qu'elle va aller dans son royaume, là où est sa place.
- Si elle t'a dit qu'elle viendrait, cela veut dire qu'elle veut être avec toi, peut-être, pour elle accepterais-tu d'aller dans son royaume.

Il n'y pense pas.

- Certainement pas ! Je ne veux pas me retrouver à vivre sous...

Je n'y avais pas du tout pensé. Mais est-ce possible ?

- Il y a de la magie en elle. Merredia est effectivement capable de te donner la même forme qu'elle lorsqu'elle est dans l'eau, ainsi que toutes les capacités nécessaires.
- Je vais y réfléchir, c'est certain.
- Naturellement. Tu as envie d'être à ses côtés. Tu as besoin d'elle, et le simple fait que tu te retrouves loin d'elle te serais impossible désormais.

Il m'irrite, il a raison et ça m'énerve.