Solana avait été complètement surprise par le bruit des trompettes. Entraînée par une foule apeurée, elle avait suivi les courtisans jusqu'à la salle de bal, où les soldats postés devant les portes battantes garantissaient la sécurité des nobles. Dans un état second, elle n'avait pas bronché lorsqu'un des gardes lui avait posé une couverture sur les épaules.
Elle était choquée. Depuis toute petite, elle était enfermée dans ce palais. Elle n'en était jamais sortie, parce que son père lui martelait qu'elle devait rester en sécurité. Et voilà qu'ils étaient attaqués au cœur de la bâtisse même, au centre du pouvoir des Litans, là où elle aurait dû être la plus détendue.
Elle ne répondait pas aux courtisans qui la pressaient de questions. Pour quoi faire ? Elle n'en savait pas plus qu'eux. Elle ne trouvait ni son père, ni Agape, ni Ai-dan, ni même Ars-lan. Personne qui ne pouvait lui exposer la situation. Et si Solana détestait quelque chose, c'était l'ignorance. Mais elle savait qu'il était inutile de partir à leur recherche. Elle ne se faisait pas d'illusions sur ses chances en cas de combat, et comprenait la nécessité de protéger l'héritière du trône.
Prostrée, silencieuse, cachée dans sa grande couverture rouge, elle attendait. Elle attendait que les trompettes cessent de hurler, que les questions cessent d'affluer, que la peur cesse de l'étreindre, que les réponses cessent de se dérober. Solana savait bien attendre. C'était une qualité qui importait peu aux yeux de son père, aux yeux des instructeurs, aux yeux des courtisans. Mais elle connaissait sa valeur. Et elle attendait, calme.
Pourtant, lorsque quelqu'un posa sa main sur son épaule, elle faillit crier. Peut-être n'était-elle pas si calme que ça, après tout. Solana n'avait pas l'habitude des contacts. Les serviteurs avaient bien trop peur d'elle pour la toucher, son père n'en voyait pas l'intérêt et les gardes n'étaient pas là pour ça, même Agape. Alors elle attrapa vivement le poignet de celui qui en avait eu l'audace et fit volte-face pour se retrouver face aux yeux d'un bleu-vert malicieux de Jonas.
Soulagée, elle poussa un soupir, avant de l'interroger.
— Jonas ! Que fais-tu là ? Tout va bien ?
— Madame, je vous... cherchais... répondit-il en essayant de reprendre son souffle, visiblement exténué par une course. C'est votre garde... le grand Sevadain...
— Agape ? Qu'a-t-il ?Solana sentit son coeur battre plus fort, et resserra inconsciemment sa prise sur le poignet de Jonas, lui tirant une grimace de douleur. Elle le lâcha, désolée.
— Il est avec votre... fiancé. Mais je l'ai vu... couvert de... sang.
Solana rattrapa son poignet immédiatement, et le traîna derrière elle.
— Amène moi vers lui. Tout de suite.
Jonas poussa un soupir désespéré mais comprit au ton de Solana qu'il était inutile de discuter. Alors qu'ils s'approchaient des portes, un des soldats qui les gardaient interpella la jeune fille.
— Imperatorina, vous devez rester à l'abri.
— Ne vous avisez pas de me donner d'ordres. Quelqu'un est venu dans mon palais avec pour intention de commettre un meurtre. Je ne me cacherai pas.Sans s'arrêter, elle sortit de la salle. Derrière elle, Jonas, impressionné, adressa un clin d'œil au soldat avant de la rejoindre. Dans les yeux du garçon de cuisine, l'affection était remplacée par autre chose. Quelque chose de plus puissant. De l'ébahissement, peut-être. De l'admiration. Les gens se méprenaient souvent, s'arrêtant à sa surface calme et douce. Ils ne voyaient pas la lave qui bouillonnait sous la surface, attendant l'explosion.
Solana filait comme une flèche dans les couloirs, et ne sut pas s'arrêter à temps lorsqu'elle croisa un plastron métallique. Elle buta donc contre l'armure couverte d'hémoglobine, avant de relever les yeux et de croiser le regard doux d'Agape.
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Imperator
FantasíaUne tour dont la puissance ne voit jamais le jour, Une reine qui préserve son peuple de la peine, Un cavalier par son devoir et son amour tiraillé, Un pion auquel personne ne prête attention, Un roi plus faible que l'on ne le croit, Un fou à la rech...