Scélérat

5 - La culpabilité

MAI 2016

De son côté, Julien avait sorti son nouvel album, Anarchie, et était en pleine promo. Son planning était plutôt chargé et on parlait moins par message. J'avais écouté l'album et je le trouvais surprenant. Le rap c'était pas ma musique de prédilection mais j'aimais bien. Je trouvais l'album ultra bien construit, les sons ultra pertinents et percutants.  

SCH:
Slt la petite, sa va ?

Romy:
Hello, ça va et toi ? 😊

SCH:
Oé, ko avec la promo

Romy:
Normal, ça se termine bientôt ?

SCH:
Oé, je rentre semaine pro.
Je te manque trop c'est ça? 😉

Romy:
😂 tu rêves

SCH:
Fais pas genre 😂
Je voulais faire une soirée à mon retour pour fêter la sortie de l'album.
Tu crois que Tonton sera ok pour faire ça au resto ?

Romy:
Oui je pense, demande-lui 😉

SCH:
Tu veux pas lui demander toi ?

Romy:
Pourquoi ?😂
t'as peur qu'il te dise non ?

SCH:
Non mais jsp
je veux pas que ça le dérange de fermer son resto pour moi 

Romy:
Je lui en parle demain, je te redis

SCH:
Yes merci 🙏 

Sans surprise, Tonton était d'accord. Dès qu'il y avait une occasion de faire la fête, il est toujours partant.

Romy:
Salut ! C'est ok pour Tonton.
Je t'envoie son num après mais tu as juste à lui dire quand tu veux faire ça et c'est bon.

SCH:
Super !!! Tu gères merci !

Romy:
😉

SCH:
Tu seras là ?

Romy:
Y'a des chances, y aura besoin de monde pour le service

SCH:
T folle ! Tu vas pas servir ?

Romy:
C'est mon métier mdr

SCH:
Non mais c'est mort.
Toi et tes copines vous êtes invités
Vous allez pas servir mdr

Romy:
Je verrais avec Tonton

Je ne vous explique même pas la réaction d'Olivia quand je lui ai dit que nous étions invitées à la soirée. Elle a crié, sauté sur place, rigolé, entamé une danse bizarre, puis re crié et re sauté sur place avant de me demander:

— C'est pas une blague rassure-moi ?

— Non promis. Ai-je dit en riant.

— Putain de merde ! S'est-elle exclamée. C'est le début de la fame Romy !

Tonton s'était débrouillé pour trouver du monde en extra pour le soir de la fête et nous laisser profiter de la soirée avec Olivia. Il a vraiment le cœur sur la main. Il n'est pas toujours facile, il est parfois dur mais en vrai c'est la bonté incarnée.

La soirée avait été une réussite. Julien avait invité tous ses amis et quelques membres de sa famille. L'alcool avait coulé à flot mais on avait été raisonnable avec les filles. Sana était de la partie forcément. Olivia et Nour aussi. Olivia m'avait fait essayer une dizaine de tenues. Elle s'était arrêtée sur un jean noir, un débardeur que je trouvais bien trop décolleté de couleur vive, des sandales à talon. Elle m'avait fait un chignon avec un effet, je cite, "un peu bohème genre coiffé/décoiffé" pour dompter mes cheveux bouclés plutôt indisciplinés. Elle avait aussi insisté pour que je prenne rdv chez le coiffeur parce que, je cite encore, "là c'est plus possible".

Sana nous a présentées à tous ses amis d'enfance. Elle voulait que nous passions une bonne soirée et que nous ne nous sentions pas à l'écart. Elle en faisait une affaire personnelle. Nous avons finalement passé une bonne partie de la soirée avec Ahmed et Le Big. Nous n'avons pas beaucoup vu Julien, il se baladait entre les différents groupes qui s'étaient formés et essayait de passer voir tout le monde. Tonton n'avait pas lésiné sur l'alcool et rapidement beaucoup étaient 'bruncha" comme il le disait si bien. Nous ne sommes pas parties très tard avec les filles, Nour, qui ramenait Olivia, était crevée. Je ne me voyais pas rester toute seule à la soirée donc j'ai préféré partir en même temps qu'elles.

SCH:
Vous êtes parti tôt hier soir

Romy:
Ouais Nour était claquée

SCH:
Je préfère quand elle est rébou celle là mdr

Romy:
😂😂
C'était cool 

SCH:
Oé grave
T'étais canon en tout cas les cheveux relevés

Romy:
🙄🙄

Il était de plus en plus clair que Julien me draguait. Il n'essayait même plus vraiment de dissimuler ça derrière des taquineries. J'essayais de rentrer le moins possible dans son jeu. Je ne voulais pas qu'il s'imagine qu'il pourrait arriver à ses fins avec moi. Mais en même temps, je dois avouer que j'aimais bien ça. Je culpabilisais mais j'aimais bien discuter avec lui. J'en avais parlé à Olivia.

— Je comprends pas pourquoi tu culpabilises ? M'avait-elle demandé.

— Je suis complètement tarée, je culpabilise parce que je suis encore amoureuse d'un mec qui est enterré six pieds sous terre.

— Mais non t'es pas folle. C'est normal, tu n'as toujours pas fait ton deuil.

Elle avait raison, je n'avais clairement pas fait mon deuil. Mes nuits étaient encore hantées. J'allais mieux depuis mon arrivée à Marseille, j'avais retrouvé un peu le goût de vivre. Cependant, j'avais encore un vide immense à la place du cœur et une peur bleue de l'avenir sans lui.