épisode 1. un puits de douceur

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lundi - 20h13

Des murmures parvinrent de plus en plus distinctement aux oreilles de la jeune femme tandis qu'elle gravissait l'escalier menant au troisième étage.
Mais elle n'y prêtait guère attention, trop absorbée dans la lecture des messages que sa personne préférée venait de lui envoyer. Un sourire idiot étirait ses lèvres laquées de carmin, et une tendresse infinie emplissait ses yeux tandis qu'elle les posait sur l'écran de son téléphone portable.

À peine eut elle installé la pointe de ses bottines en cuir sur son pallier, qu'une exclamation jaillit, lui faisant aussitôt relever la tête de son appareil technologique.
À l'origine du cri et des murmures qui avaient servi de fond sonore à son ascension, deux silhouettes qu'elle ne connaissait que trop bien.
L'une d'entre elle appartenait à sa jeune sœur de quatre ans sa cadette tandis que l'autre était nulle autre que celle de son meilleur ami d'enfance et voisin de toujours.

— Bonsoir vous deux, je peux savoir ce que vous fabriquez sur les marches ?

Le ton interrogatif de Milada était apparemment la chose la plus hilarante de leur journée puisque le duo affalé dans l'escalier éclata de rire, la laissant pour le moment sans réponse.
Mains croisées sur sa poitrine, elle attendit patiemment que leur fou rire cesse pour reposer la question, obtenant cette fois-ci un semblant de réponse.

— Oh tu vas rire Lili, pouffa la plus jeune.

Cette phrase ou plutôt le ton employé indiqua aussitôt à Milada que l'explication risquait au contraire de ne pas lui soutirer le moindre sourire.
Et l'air peu intelligent qu'abordait leur voisin n'aidait nullement à songer à une autre conclusion.

— J'en doute mais tente toujours.

— Pour la faire courte, elle a oublié ses clefs dedans, sauf qu'elle a claqué la porte, du coup elle s'est retrouvée coincée dehors.

— Je vois, et donc toi, dans un esprit de charité tu t'es dit que la meilleure chose à faire serait de lui tenir compagnie dans la cage d'escalier ? supposa Milada, leur arrachant un nouveau rire idiot.

— Ce n'est pas tout à fait ce qu'il s'est passé, en réalité. Alors que je venais de me rendre compte de ma connerie, j'ai commencé à un peu m'énerver, ce qui a attiré l'attention de Giorgio, qui est donc sorti de son appartement pour voir de quoi il retournait.

— Sauf que, dans ma précipitation suite aux cris de Jena, eh bien j'ai fait la même erreur qu'elle, nous laissant tous deux enfermés hors de nos appartements respectifs, et donc sans possibilité d'accueil autre part que sur cette maigre surface. J'en conviens, ce n'est pas idéal mais je n'avais pas bien mieux à lui offrir.

— Mais maintenant t'es rentrée donc le problème est réglé, sourit Jena, se relevant souplement pour aller enlacer son aînée.

— Je vous arrête tout de suite, il n'est pas question qu'on ait un parasite dans l'appartement.

— Oh mais t'en fais pas pour ça Milada, une fois que votre porte sera ouverte, je sortirais par la fenêtre. Pour rejoindre la mienne, je n'ai nullement pour plan de me jeter dans le vide, ajouta-t-il très vite face à l'air dubitatif de son ancienne camarade d'école.

— Très bien Giorgio mais je te préviens, tu sors aussi vite que tu es entré.

L'intéressé esquissa une mimique de salut militaire, créant un nouveau ricanement chez Jena, et même un frissonnement des lèvres de Milada.
Elle tourna aussitôt le dos à son voisin, ce qui évita donc une exclamation de victoire de la part de celui qui aimait tant franchir la porte qui n'était sienne, s'affaler dans le sofa, poser ses pieds aux chaussettes dépareillées sur la table basse malgré les protestations outrées de Milada, un pitch dans une main et une brique de jus de pomme dans l'autre, tout ça pour repartir quelques heures plus tard après avoir dérobé un sachet de pâtes d'un kilogramme. 

ON NE S'AIMERA PAS CE SOIROù les histoires vivent. Découvrez maintenant