épisode 4. grenouilles et papillons

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après un rendez-vous désastreux en compagnie de sa mère et un autre bien plus appréciable auprès de Milada, June se sent débordée par sa propre vie

samedi - 15h20

Karina s'étira, balançant ses bras graciles au dessus de son visage déformé par un bâillement, sous les yeux rieurs de son amie.
Ils venaient tout juste de parvenir à destination et c'était aussi bien, aucun des trois n'aurait pu supporter plus longtemps ces petites routes sinueuses.

Portant sa valise terne à bout de bras, June se dirigea sur les pas de Yago jusqu'à la maison qu'ils allaient occuper tous les trois pour ce petit week-end entre amis.
Après tout, la saison des partiels n'avait pas encore débuté, il était encore temps de profiter de leurs journées avant qu'elles ne soient dévorées par leurs manuels et autres fiches, que leurs yeux soient cernés par le manque de sommeil et leurs estomacs retournés par l'afflux soudain de stress.

Dès que Yago, le cœur encore meurtri et les yeux humides suite à l'énième rupture qu'il essuyait avec sa petite amie actuelle, leur avait proposé ce séjour reposant – du moins en théorie – en pleine nature, les deux jeunes femmes n'avaient pas hésité une seule seconde et avaient annulé tous leurs plans respectifs.
Milada n'avait pas paru outrageusement vexée que June change d'avis quant à leur brunch, allant même jusqu'à proposer une autre date, rassurant la jeune femme qui ne voulait tout de même pas lui faire de la peine. 

Le copain de la grande blonde, par contre, avait été bien plus lourd, engendrant un léger conflit entre les tourtereaux qui avaient fini par trouver un terrain d'entente.
Même si, d'après ce que les traits tirés de Karina laissaient présumer, tout ne s'était pas aussi bien déroulé que ce qu'elle clamait à répétition, agrémentant ses beaux discours d'un immense sourire qui se voulait rassurant.

Yago posa son sac sous le perron, déverrouilla difficilement la porte puis retourna en trottinant auprès de Karina qui avait encore du mal à extirper son énorme sac du petit coffre de la voiture rouge.
Les laissant à leur tâche, sans pour autant rire de leur malheur, June pénétra dans la maison de vacances que la tante de son ami leur avait généreusement prêté, une fois de plus.

Elle jeta ses converses dans un coin, retenant un court instant sa respiration lorsqu'elles heurtèrent l'imposant vase vide qui trônait en maître dans l'entrée.
Mais fort heureusement pour elle, la paire s'immobilisa sans entrainer la pièce fragile, lui évitant ainsi de causer un accident à peine arrivée.
Elle grimpa agilement l'escalier en bois qui grinçait à chacun de ses pas, ayant délaissé sa valise dans un coin, pour aller se jeter sur le grand lit qu'elle occupait toujours lorsqu'ils venaient là.

— June !

— Je suis en haut, rétorqua-t-elle sur le même ton, s'étalant encore un peu plus, son pied droit s'emmêlant dans les baldaquins clairs.

Un martèlement de pas résonna contre le bois, entrainant une floppée de nouveaux grincements, annonçant la venue peu discrète des deux autres idiots qui ne tardèrent pas pour s'élancer dans les airs et sauter à leur tour sur le matelas.
Ou plus précisément sur elle puisqu'ils s'écrasèrent lourdement sur la jeune femme, qui éclata de rire, rire qui fut étouffé contre l'épaule de Yago qui se décala gentiment pour lui permettre de respirer, heurtant la tête de Karina dans la manœuvre.

En guise de réponse à cet affront, la grande blonde enserra ses doigts autour du premier coussin qu'elle put agripper et le balança de toutes ses forces contre le premier membre qui s'offrait à elle, sans prendre la peine de s'assurer qu'il s'agissait bien du coupable et non de la pauvre June qui n'avait – jusque là – rien demandé.
Mais quand le coussin les heurta tous les deux, un éclair passa dans les yeux de Yago, similaire à celui qui illumina les yeux clairs de June et ils s'emparèrent à leur tour de leurs armes, prêts à riposter contre une Karina braillant que c'était injuste de s'allier ainsi contre elle. 

ON NE S'AIMERA PAS CE SOIROù les histoires vivent. Découvrez maintenant