𝐂𝐇𝐀𝐏𝐈𝐓𝐑𝐄 𝟏𝟐 | 𝐀𝐝𝐫𝐢𝐚𝐧

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Adrian- Vendredi 08 octobre

Enclencher la cafetière ce matin ne m'a jamais paru aussi difficile. La nuit a été longue, putain.

Tellement longue que je dois réappuyer sur le bouton de la machine. L'idiot que je suis a cliqué sur celui du grille-pain.

Une main sur le visage pour tenter de me réveiller, j'essaye d'assimiler les événements de la veille.

Ania qui débarque sans prévenir en pleurs. Incapable de savoir quoi dire, je l'ai prise dans mes bras. Je l'ai serrée aussi fort que possible pour qu'elle arrête de pleurer.

Puis comme un égoïste, je me suis rappelé qu'il y a un an, c'était moi dans cette même pièce, dans les bras de ma sœur, en pleurs tout autant qu'elle en cet instant. Les rôles s'étaient inversés, sauf qu'en réalité, rien n'a changé de mon côté depuis. Les larmes ont séchées sur mes joues, mais elles coulent toujours dans mon cœur.

Je suis toujours le même gars qu'on a laissé, abandonné. Celui pour qui on ne mérite pas de se battre, d'aimer.

Je me suis ensuite réveillé d'un cauchemar, ma sœur dans mes bras en train de pleurer. Ma petite sœur en pleurs.

Mon cœur s'est déchiré à ce moment-là. Je lui ai demandé contre son oreille si elle voulait m'en parler. La connaissant, je me suis dit qu'elle avait besoin de temps, mais au contraire, cette fois-ci elle a acquiescé.

Ma sœur avait besoin de moi. Je l'avais déjà laissé tomber dans le passé, je ne pouvais pas recommencer. Je me devais de faire les choses bien.

Alors, j'ai écouté, pas par mauvaise conscience de devoir me racheter, mais par amour. Ma sœur est mon unique famille, je ne pouvais pas ne pas l'aider, ne pas la soulager de cette douleur qu'elle ressent. Ma sœur ne peut pas ressentir ce sentiment, je me le refuse.

Des pas familiers résonnent dans l'escalier. Et dire qu'il n'y a pas si longtemps, elle vivait ici, avec moi.

─ Bonjour.

Ania dépasse l'encadrement de la porte déjà habillée d'un tailleur, coiffée avec une queue de cheval. Elle a réussi à camoufler avec le maquillage ses légères cernes. Comme si rien ne s'était passé. Comme si hier, elle n'était pas au fond du gouffre.

Je sais qu'elle a déjà enduré des épreuves, mais je l'envie d'avoir réussi à se reprendre en main si rapidement, même si ce n'est qu'en surface montrer aux autres qu'on va bien. En réalité, je suis jaloux.

─ Salut. Comment ça va ?

Elle s'avance, pose son sac sur le plan de travail principal, et ouvre le frigo pour en sortir le jus de fruit.

─ Ça peut aller. Thibault m'a envoyé des messages ce matin. Je lui ai dit qu'on en discuterait ce soir tranquillement à la maison.

Chaque relation est unique, pourtant, celle que Thibault et d'Ania possède me paraît la plus exceptionnelle de toutes. Peu habituel, on ne va pas se la cacher, mais pas moins solide.

Je savais que le psychologue de Thibault avait planifié des séances communes. Celle d'hier a été assez mouvementée. Ania était totalement perdue et bouleversée.

─ Tu sais, pour ce soir, on peut sauter ce vendredi et reporter à la semaine prochaine ?

Ania boit une gorgée avant de me répondre :

─ Peut-être pas annuler, mais raccourcir. Thibault travaille tard ce soir, on peut ce faire notre rituel rien qu'à deux.

Je souris. Ma sœur a autant besoin de moi que moi, d'elle. Je craignais que notre soirée du vendredi soit devenue moins importante pour Ania, mais on dirait bien que je me suis trompé.

Pour me libérer (Tome 1)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant